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    Ce que l'on fait des Mythes | SOLO par Nina Andersen Jeu 09 Jan 2020, 21:31
    Nina Andersen
    Nina Andersen
    Briseuse de Mythes







    CE QUE L'ON FAIT DES MYTHES

      Vers un pays dangereux.


    Lorsque Nina se leva de son lit, elle ne prit même pas le temps de le faire et fila vers la salle de bains. Une fois nue, elle effectua le même rituel que depuis trois jours : contempler sa blessure au bras. Elle enleva son bandage précautionneusement, tiquant malgré tout lorsque la cicatrice s’accrochait au tissu.

    C’était repoussant. On aurait dit qu’elle s’était fait griffer par un loup géant ou quelqu’autre bête dotée de pattes appropriées. La chair était encore rose, suintante par endroits plus profonds. Mais le pire dans tout cela était les démangeaisons !

    Après sa douche, Nina nettoya encore, délicatement, ce qui lui fit beaucoup de bien, puis enroula un nouveau bandage. Il était certain que toutes les autres cicatrices de son corps n’étaient rien à côté. Cependant, même si ce n’était pas son bras directeur, elle se souciait quand même de la douleur élastique ressentie à chaque mouvement, chaque contraction musculaire. Et plus encore de la perte de motricité que cela entraînerait à l’avenir. Le médecin avait bien dit que des muscles et terminaisons nerveuses importants avaient été endommagés...

    Cependant, il lui en fallait plus pour tirer un trait sur son prochain objectif. Igni était retenu par les Théologistes, après tout... Et il était de son devoir de maîtresse de le récupérer. Intact.

    Alyce était en fait la plus inquiète à propos de cette mission. Elle savait que la haine motivait Nina. La haine et la colère. Mais Sin était l’antithèse d’une terre accueillante, et même les magiciens les plus forts préparaient bien leur séjour avant de s’y aventurer.

    Malgré son emploi du temps très chargé, attelées à superviser diverses recherches militaires, la tête d’Altaïr trouva le temps d’aider aux préparatifs. Avant toute chose, elle leur résuma les dernières informations découvertes sur cette organisation terroriste et, pour le moins que l’on pouvait dire, beaucoup trop ambitieuse pour le bien du monde entier. Les Théologistes étaient les philosophes d’un mouvement plutôt ancien, né en Pergrande durant les siècles précédents où la religion était encore la clé de voûte des civilisations.

    Ces gens-là avaient passé leur vie à étudier tous les dieux, absolument toutes les divinités, fascinés par elles et leurs similitudes récurrentes malgré la diversité des peuples les vénérant. Avant que le modèle de pensée ne devienne obsolète suite à l’émergence de la science magique ayant expliqué beaucoup de choses naturellement ignorées par le passé, les Théologistes avaient publié une ultime revue commune. D’après ces travaux philosophiques, l’ère d’Asgard avait montré que l’humain était à même de considérer comme divine toute entité qui lui était supérieure. Car ils pouvaient en avoir peur comme besoin, l’admirer comme ne pas la comprendre.

    En mêlant ces trouvailles aux événements regrettés de Précipice, il était ainsi possible que l’organisation contemporaine des Théologistes nourrisse une soif de domination mondiale, de transhumanisme. La seule raison pour laquelle leur chef aurait pu désirer Nina était la découverte de la présence d’Asgard en elle. S’ils avaient enlevé Igni pour sa magie précisément, pour sa nature éthérée, et qu’un de leurs membres – au moins – possédait une rune asgardienne...

    Alors il était peu probable qu’ils ne sachent pas.

    Envisager qu’ils puissent vouloir dépouiller Nina des âmes qui l’habitaient, qu’ils puissent posséder le pouvoir de plusieurs runes aux pouvoirs amplifiés par la corruption, imposaient la crainte à Alyce.

    « C’est la raison pour laquelle je vous confie cet objet. Il s’agit d’un communicateur-mouchard denier cri, développé par les laboratoires d’Aprilia. Il est à moi, mais comme je ne risque pas de quitter Pergrande de sitôt, vous en ferez meilleur usage. J’insiste là-dessus : activez-le dès qu’un problème se présente à vous. Sin est une terre sauvage, dangereuse et par-dessus tout impitoyable. Je refuse qu’on me ramène vos cadavres parce que vous aurez pris des risques inconsidérés, c’est compris ?
    — Bien sûr, sourit Ényo. Nous n’avons pas l’intention de mourir de la main des Théologistes ! »

    Certainement pas. Tout ce qui comptait pour Nina était de récupérer Igni et détruire cette organisation. Et plus tôt ils partiraient, plus tôt ils auraient l’opportunité de réaliser ces desseins.

    Asgard avait la capacité de localiser Igni, sa propre création, dans le monde entier. Tout comme il était en mesure de certifier sa vie, quelque part. Malheureusement, la magie nécessaire dépassait ce qu’une demi-âme d’Ange et Nina pouvaient fournir. Les Crystal Claws n’avaient qu’un seul plan à mettre en œuvre : un partage de magie via rituel spécifique pour se rendre dans le pays du Péché, au plus près de l’endroit où l’énergie d’Igni serait identifiée.

    Loki et Ényo quittèrent le bureau d’Alyce tandis qu’elle demandait à Nina de rester un peu plus.

    « Tu portes une grande responsabilité, Nina... Je suis inquiète pour toi. Je ne devrais pas être si maternaliste avec une magicienne de rang S, mais il ne faut pas sous-estimer cette organisation. »

    La femme pointa du doigt le mouchard dans la poche de Nina.

    « Je ne l’ai pas dit, mais cet objet est relié à un dispositif d’analyse. Régulièrement, il nous enverra des informations sur l’environnement qui vous entoure et le laboratoire l’étudiera. En vérité, vous n’aurez même pas à l’activer vous-mêmes pour nous prévenir du danger. Pas nécessairement, en tout cas...
    — Pourquoi avez-vous "malencontreusement" éludé ce détail face à Loki et Ényo ? Avec tout le respect que je vous dois, je ne pense pas mériter un traitement de faveur... déplora Nina sans cacher sa méfiance.
    — Car je les connais ! Ils seraient capables de se croire assez forts, ou ne pas se rendre compte qu’ils sont trop fiers pour demander de l’aide ! »

    C’était donc cela... Leur dépit de ne pas avoir pu aider Nina lors de son combat contre Mattheum illustrait parfaitement ce comportement. Les deux magiciens avaient le cœur sur la main quand il s’agissait d’aider les autres, mais pour ce qui était d’admettre avoir besoin d’aide...

    Nina finit par remercier une dernière fois Alyce et la saluer, prête à rejoindre les autres qui devaient s’impatienter et avoir les oreilles bourdonnantes. Dans le couloir, elle croisa Maëlina, la magicienne novice qu’elle avait dû protéger lors de son épreuve de passage au rang S. Tout enthousiaste, elle demanda familièrement à Nina ce qui l’avait amenée au bureau d’Alyce.

    « Disons que je vais encore avoir à me déplacer, répondit nonchalamment la brunette tout en traçant sa route.
    — Oh je vois, c’est encore à cause de ce qui se trame en Pergrande j’imagine ? Depuis l’attentat de la Place, rien ne va plus, c’est horrible... J’aimerais être plus utile, mais mes missions se résument à arrêter des voleurs ou nettoyer des champs infestés de monstres, haha !
    — Tu sais, ma première mission consistait également en l’arrestation d’un voleur. Cela ne semble pas très utile de prime abord, mais je te souhaite d’en profiter autant que possible. »

    Car c’était toujours plus gratifiant au final que toucher sa récompense les mains en sang, avec au ventre la peur perpétuelle de perdre quelque chose de très important.

    Nina ne comprit pas pourquoi elle ne s’était pas contentée de saluer puis ignorer Maëlina. Pourtant, il fallait bien avouer qu’elle était insupportable, toujours à courir partout en déblatérant des phrases interminables avec une voix nasillarde. Bah... Sûrement la nostalgie, la mélancolie face à pareille innocence...

    * * *

      Voyage.


    Lorsque Nina eut retrouvé ses amis, le rituel put commencer. Pour plus d’efficacité, Loki s’était servi de sa magie pour disséminer plusieurs lacrymas excitatrices autour d’eux, en cercle. Les magiciens s’étaient ensuite assis en triangle, les mains jointes et les yeux clos. Asgard, enfoui au cœur de Nina, fut l’arbitre, déterminant la quantité d’énergie manquant encore.

    Nina avait été la plus en peine, à cause de sa blessure au bras. En recevant par lui une partie de l’æther à destination d’Asgard, elle surchargeait de magie ses nerfs et ses muscles, les moindres cellules de sa peau, les rendant tiraillants, piquants. Mais qu’importait tant qu’Igni lui était rendu. Dût-elle perdre son bras, elle le retrouverait.

    Au bout d’une demi-heure environ, car il avait fallu effectuer le transfert suffisamment lentement pour ne blesser personne, Asgard s’était manifesté. Faiblement, il avait ressenti la présence de sa créature au cœur-même de Sin, là où se dressait, d’après les cartes, une forêt de résineux gigantesque. Et très dangereuse.

    Et avec cette destination en tête, le voyage avait pu commencer.

    Dans la roulotte dont les trois compères se partageaient la conduite, Nina feignait le sommeil au creux de son hamac. Cogitant.

    C’était elle que les Théologistes cherchaient, et à cause d’elle qu’Igni avait été enlevé. Si elle s’était écoutée, elle serait partie en Sin seule, mijotant quelque plan pour mimer se rendre à l’ennemi. Sans jamais impliquer Loki et Ényo. Cependant... Il fallait se rendre à l’évidence : seule, ce voyage était destiné à finir en massacre. Et les Théologistes, beaucoup trop puissants, ne se seraient pas laissé flouer par la cible pour laquelle ils se donnent tant de moyens...

    Et pourquoi, au final ? Pour sa magie ? Sa foudre ? Non, bien entendu, elle était inutile à des magiciens porteurs de runes asgardiennes. Nina elle-même n’en possédait plus. Ne restait alors qu’Asgard, son pouvoir et son âme en elle, que l’organisation pouvait convoiter. Peut-être savaient-ils déjà, ou pas, comment l’extraire et s’en servir. Ou leur plan n’avait-il rien à voir...

    « Nina, cesse de cogiter sur ces hypothèses pour le moment. J’ai ressenti quelque...
    — Asgard, tais-toi. Je ne veux rien savoir pour le moment... grogna la jeune femme, désireuse d’une solitude qui lui était inaccessible.
    — Yggdrasil a disparu ! »

    Parlait-il réellement de l’Arbre Monde, gardien de la connaissance Humaine, que lui-même avait créée et...

    ... qui impliquait Liesel ?

    « Mais quand ? Sais-tu comment ?
    — Comme le Hvergelmir, il n’y a guère plus de trace d’elle... Elle a existé, et sa cicatrice sera visible à jamais sur Humanitas. Yggdrasil n’est plus, mais demeure encore en celui qui l’a annihilée... S’il est toujours en vie.
    — Tu veux dire que Liesel la porte en elle...
    — Ce garçon l’a détruite et purifiée, comme tu l’as fait par le passé avec l’autre dimension. Cela signifie...
    — Qu’il ne reste que ma mission à accomplir. » coupa Nina, le ton sombre mais déterminé.

    Elle était là, à se morfondre, combattant des sonneurs de l’apocalypse alors que la réelle fin des Choses pouvait encore être empêchée. La corruption des runes, exponentielle lorsque possédées par un cœur noir, pouvait, non, allait cesser. Peu importait combien de temps ou combien de coups cela prendrait !

    Nina espérait tout de même que son ancien camarade s’en était tiré...

    * * *

      Sin.


    Pour arriver à destination, ils utilisèrent un parchemin de téléportation. Il était essentiel d’économiser ses forces avant d’être confrontés aux Théologistes, aussi le groupe put-il se faire emmener instantanément cent cinquante kilomètres en avant, comme permettait le sortilège. Tout ce qu’ils espéraient était de ne pas tomber dans un nid de monstres...

    Une dense forêt de pins les enlaça froidement. Les arbres semblaient de plus en plus grands au fil de l’horizon, avant d’être bloqués par les montagnes vides. Difficile de pratiquer en roulotte ce terrain humide et glissant, aussi durent-ils continuer à pied. Pour être rassurés en permanence, Asgard leur affirmait qu’il sentait désormais très bien la présence d’Igni. Ce n’était plus très loin, désormais... Le plus important était alors de ne pas attirer l’attention de ces terres désolées, mais surtout... des créatures qui l’habitaient.

    ♦
      Une forêt accueillante.


    « Dans quelle direction devons-nous partir, Nina ? demanda Loki en épiant le ciel où volaient deux vouivres.
    — Le sud-ouest. Nous ne sommes pas loin, d’après Asgard, mais plusieurs heures de marche nous attendent... »

    De nulle part, alors qu’ils marchaient à couvert des arbres, aux aguets, Ényo s’interrogea sur le bon fonctionnement du mouchard de Dame Alyce. Le petit appareil émettait à intervalles réguliers une petite lumière verte, laquelle fut interprétée comme un bon signe.

    Nina demeurait dubitative. Pour elle, Alyce n’avait pas tout dit sur cet objet de la plus haute technologie. Cela ne semblait pas, mais Pergrande mobilisait vraisemblablement une horde de matériel et personnel haut de gamme pour combattre la menace planant sur ses terres. Le chagrin du couple impérial et de leur famille devait être tel, depuis le massacre de la place des Augures, qu’il ne désirait qu’une chose : arrêter les Théologistes.

    Ces derniers, s’ils avaient eu la capacité d’excaver une ou plusieurs des Cloches d’Exitia originelles, devaient disposer de moyens considérables. Une alliance de longue date avec Yakmund, terminée à sa mort avec un goût amer d’inachevé ? C’était à envisager...

    « Selon moi, soutenait Asgard, la question des runes est au moins aussi importante, si ce n’est plus. Les Cloches d’Exitia sont sœurs des Démons, les appellent au monde terrestre sitôt sonnées. Pour connaître leur existence, il faut les étudier et, en ce but, être inspiré par l’envie de pratiquer telles recherches. Et les mettre en œuvre. Parallèlement, les runes de mes filles sont d’essence angélique, presque divine, un opposé drastique. Comment un seul individu pourrait-il dénicher aussi vite l’emplacement de cinq runes ? »

    Nina répondit à ces propos alambiqués en même temps qu’à Loki et Ényo, qui se posaient à peu près les mêmes questions... À une échelle différente.

    « Et surtout, ce qui m’inquiète, c’est de savoir pourquoi ces prétendus Apôtres et leur chef prennent le risque de me convier auprès d’une des Cloches originelles. Soit ils sont confiant quant à sa solidité, soit plutôt quant à la puissance de leur organisation. Dans tous les cas, nous devons rester sur nos gardes. Rien ne garantit qu’un vrai Démon n’est pas derrière tout cela... »

    Loki épiait les environs grâce à quelques lacryma-caméras de sa confection. Liées à un émetteur holographique, le Némédien pouvait détailler de lui-même les images qu’elles envoyaient en temps réel. Pour l’instant, mis à part les vouivres desquelles il valait mieux se cacher, aucune bête sauvage n’avait été croisée. Bien sûr, cela n’empêchait pas de se méfier du reste de la faune, plus petite mais peut-être plus vicieuse encore...

    « Tch ! J’ai encore écrasé un de ces satanés scorpions rouges... pesta Ényo en grimaçant de dégoût. Ils ont l’air de bien m’aimer, je dois avoir le sang sucré...
    — Tu confonds avec les moustiques, non ?
    — En fait, corrigea Loki, les moustiques ne sont pas vraiment attirés par le goût du sang mais plutôt par les émissions du corps, que ce soit chaleur ou molécules diver-...
    — Ça vaaaaa monsieur je-sais-tout !
    — Ne crie pas, Ényo ! paniqua presque silencieusement la brunette.
    — Ce n’est pas le moment pour un cours de sciences, occupons-nous plutôt de rester en vie jusqu’à trouver Igni et tout ira pour... le... mi... mieux... ? »

    Les aiguilles crissèrent dans leurs arbres respectifs, pourtant il n’y avait aucun vent. L’eau n’ondulait pas non plus dans ses petites flaques et ruisseaux hasardeux.

    « V-Vous avez entendu ? Senti peut-être ? »

    Nina et Loki restèrent perplexes, car rien ne semblait différent de quelques minutes auparavant. Rien n’apparaissait sur l’écran du Némédien, une caméra placée à chaque point cardinal.

    « Je sens une magie... dérangeante. Puissante, également. Très puissante... Mais ça ne semble pas humain... »

    La jeune femme tremblait. Sa sensibilité æthernanique était conséquente, mais de là à réagir de la sorte... Ses amis s’en inquiétèrent et redoublèrent de vigilance. Il n’était pas improbable qu’une créature beaucoup trop puissante pour eux rôde alentours. La zone entière était trop dangereuse, même pour trois mages de rang S. D’autant qu’il leur fallait économiser leurs forces...

    « Il fait vraiment froid, tout à coup... remarqua Nina.
    — Si ce n’était pas pour toi, chérie, je n’aurais jamais mis les pieds ici !
    — Ché... »
    Nina ne releva pas plus l’appellation de son amie lorsqu’elle sentit un souffle chaud contre sa nuque, son dos tout entier. Puis une goutte s’insinua dans ses vêtements. Et une chaleureuse présence, humide et rêche, caressa sa joue...

    Tétanisée, elle trouva tout de même la force de se tourner et...

    Là, derrière le groupe, se dressait une masse. Elle était immense, velue et écailleuse sur le visage. Elle les regardait comme ses nouvelles proies avec ses deux yeux bleus luisants, se pourléchant les babines de sa longue langue gluante traînant sur d’immenses dents acérées.

    ♦
      Salut.


      Une seule solution.


    « Courez !! » hurla Loki en tirant Nina par le bras.

    La bête était grande, ses pattes aussi longues. Elle semblait recourbée, comme bossue, mais se déplaçait rapidement. Si les magiciens ne tentaient que de fuir et pas de se défendre, c’était car le moindre de ses pas broyait les arbres comme s’ils étaient faits de paille.

    Son souffle, comme un crachat long et à glacer le sang, se répandait entre les pins. Où que les mages aillent, elle semblait les suivre, comme si la créature était partout à la fois.

    À l’écoute des indications d’Asgard, Nina orientait la fuite vers le sud-ouest. Quitte à courir, autant se rendre vers l’objectif ! Le terrain marécageux rendait le déplacement compliqué, aussi Nina déploya ses ailes. Voyant qu’Ényo était en difficulté, que le monstre l’approchait gueule ouverte, elle se jeta sur elle puis se précipita vers Loki, quelques mètres plus loin.

    Le Némédien laissait sur son passage une salve de lacrymas explosives, en guise de vaine tentative pour ralentir l’ennemi.

    « J’aperçois une tour, plus loin ! scanda-t-il en s’efforçant de regarder son écran holographique. Et si nous tentions de nous y abriter ?
    — Pour faire face à des fantômes en plus des monstres poilus ?!
    — Il n’a pas tort Ényo, n’oublie pas qu’Igni n’est pas loin ! Il est peut-être même captif dans cette tour...
    — Vous êtes vraiment trop téméraires parfois ! »

    La bête ne perdait pas patience, derrière. Si elle l’avait voulu, elle les aurait déjà tous tués, embrochés sur une de ses griffes... Le fait qu’elle veuille jouer avec eux était une aubaine, pour le coup. Alors que Nina hésitait à brandir le mouchard pour sonner l’alerte à la guilde, Ényo eut une idée.

    « Eh, Loki ! Tu penses que tu pourrais utiliser ton projecteur pour diffuser une image de nous un peu plus loin ? Avec un peu de chance, il est puissant mais bête ! »

    Comme ébahi par la présence d’esprit de son amie, que lui-même n’avait pas eue – et ainsi quelque peu honteux –, l’homme renard décréta qu’il allait tenter et faire au mieux. Comme la lacryma n’offrait pas une grande image, pour peu que la créature n’ait pas le sens des perspectives, elle les penserait loin. Son attention serait détournée, peut-être suffisamment longtemps pour leur laisser l’occasion de se cacher quelque part, n’importe où...

    Loki lança son projecteur au loin et amena à lui une lacryma-caméra. Manquant de trébucher, il activa le mode enregistrement et ordonna à ses camarades de courir encore un peu, le temps que les images soient captées. Une fois cela fait, et après que Nina ait ébloui le monstre avec une illumination électrique, il put les diffuser. Les magiciens s’efforcèrent, bien qu’essoufflés, de masquer au mieux leur dégagement magique et trouvèrent abri dans le tronc d’un arbre creux.

    « Eh, ça marche ! chuchota fortement Ényo avant de recevoir les mains de Nina et Loki contre sa bouche.
    — Il est peut-être tombé dans le panneau, mais je doute que la supercherie ne dure éternellement... Dépêchons-nous de nous cacher dans la tour. »

    Nina n’était pas mue que par la seule pensée logique et stratégique. Elle voulait savoir si Igni était enfermé dans cette tour... Et si oui, le sauver. Tuer autant d’Apôtres qu’il le faudrait.

    Au sortir de l’arbre creux, l’édifice noir de jais se terrait sous une couche de nuages grisâtres. La créature qu’ils avaient semée semblait si petite à côté... Il y avait de quoi considérer la tour comme une ville entière, bâtie dans une forteresse de ténèbres. Le plus étonnant était sa façade fendue, comme si un sabre gigantesque avait éventré la tour.
    Mais il fallait entrer... Et découvrir ce qu’il y aurait à découvrir.

    ♦
      La tour.


      La Cloche Originelle.


    Nina ouvrait la marche. L’obscurité l’avait contrainte à réutiliser une technique qu’elle aurait préféré oublier. Son corps, rendu bioluminescent, éclairait l’environnement d’une lueur bleutée, pâle, diffuse, afin de ne pas attirer inutilement les éventuels habitants.

    « Je ressens clairement une puissante magie, au sommet de la tour... »

    Inquiète, Ényo faisait de temps à autres un petit tour sur elle-même pour observer les arrières. Pour l’instant, à part quelques insectes effrayants mais désintéressés, rien de dangereux ne se profilait. Dehors, le grognement irrité de la créature géante fit trembler les murs, arrachant un frisson aux trois mages. Loki dénicha la cage d’escalier en enflammant deux toiles d’araignée gluantes, immenses et aussi rigides qu’un fil de pêche. Le colimaçon craquait. Parfois même, certaines pierres semblaient prêtes à se dérober...

    Bientôt, ils atteignirent un long couloir donnant sur l’extérieur grâce à de grandes arches. Loki alerta ses amies de la présence de la créature, non loin. Malheureusement, sinon les colonnes inhérentes à la façade, il n’y avait guère la possibilité de se cacher... L’escalier s’arrêtait ici ; il leur fallait impérativement trouver une nouvelle cage au plus vite.

    Déployer les ailes de Nina serait trop visible, tant à cause de la lueur que de la puissance magique en émanant. Le trio ne savait pas si la présence ressentie par Ényo appartenait effectivement à un Théologiste. Si c’était le cas, savait-il également que ses ennemis se trouvaient ici ? Mieux valait être prudent.

    Une fois le couloir traversé en courant et les nouveaux escaliers dévoilés, l’ascension pouvait continuer. Ils étaient enfin hors de portée de la créature, désormais trop petite pour les atteindre... tant qu’il ne grimpait pas.

    Nina ressentait distinctement l’aura étrange de cet endroit. En observant ses murs, ses pièces qui, désormais, dévoilaient de multiples traces d’une vie passée, la jeune femme tentait de s’imprégner de ce qui avait pu être l’histoire de cette tour. Pourtant... Elle ne ressentait que peur, chagrin et désespoir. Sin était une terre terrifiante... Qu’avait-il pu lui arriver, lors de l’Histoire, pour devenir une telle chose ? Il semblait impossible d’être heureux ici... ou même de l’avoir été. Dans son ventre, Nina sentait ses entrailles se tordre. Parfois, elle se maudissait d’être aussi sensible. Au fil des marches et des étages, elle faisait de son mieux pour ne pas prêter attention aux présences. Aux airs froids. Aux sons étranges.

    Puis, alors que le trio pensait avoir encore une fraction de chemin à parcourir, les marches cessèrent une nouvelle fois. Plus de cage, seulement un vaste damier de pavés brisés. La tour se fendait en deux depuis plusieurs mètres et en voilà l’origine : un trou béant fendant le toit, l’ouvrant sur le ciel obscur et les vouivres y dansant. Une lame céleste fracassant en deux l’endroit où des gens avaient vécu. Les libérant, ou peut-être les maudissant, et leur infligeant un désespoir permanant dans cette Géhenne désolée.

    Et au-devant, les toisant de son âge immémorial, se dressait ce qui ne pouvait être que la Cloche d’Exitia originelle tant convoitée. Protégée par un pan de mur intact, était vieille et fendue, mais pas brisée. Comme si le tranchage céleste s’était arrêté sur sa peau, la coupant juste un peu. Assez pour la faire retentir.

    ♦
      La Cloche.


    Le seul danger était cette puissance magique s’approchant d’eux. Ényo invoqua une de ses lances de bases et s’équipa de son armure, histoire de se sentir protégée. Loki fit de même avec quelques lacrymas irisées. Prêts au combat, ne restait que Nina, désarmée, en simple tenue de voyage. La brunette s’avança vers la cloche à pas lent, le regard figé sur elle, attendant impatiemment l’apparition de cette présence sournoise qui les suivait depuis tout à l’heure. Un sursaut indiqua que sa prière avait été exaucée.

    « C’est ma faute, je comprends. Je ne t’ai pas dit de venir seule, alors pourquoi l’aurais-tu fait ?
    — Montre-toi, ordonna Nina. Et montre-moi Igni, par la même occasion... »

    Quand le vent souffla, s’insinuant dans la tour depuis le toit ouvert, un nuage sembla s’ouvrir. Dans un rais de lumière, portée par de la grêle, une jeune fille aux courts cheveux azurés apparut. Une cape noire volait à sa droite, couvrant une seule épaule. D’un geste assuré, elle la remit à sa place, bien droite, bien lisse. Sans un bruit, elle atteignit le sol et planta son regard dans celui, homochrome, de Nina. Les deux femmes se fixèrent ainsi quelques secondes, avant que l’aiglonne ne récidive.

    « Montre-moi Igni.
    — Oh, il est en vie, ne t’en fais pas. Regarde comme il t’attend. »

    En claquant des doigts, elle fit apparaître au sommet de la cloche une petite cage de verre. Lévitant bien à vue de chacun, elle renfermait Igni, lequel n’avait jamais autant ressemblé à une flaque informe qu’à cet instant.

    « Que lui avez-vous fait ?! »

    La jeune fille se contenta d’afficher un léger sourire, comme pour se moquer de Nina. Le petit slime manquait juste d’air, d’oxygène, pour maintenir sa température corporelle.

    « Si tu l’avais oublié, il se serait sûrement éteint définitivement dans la semaine suivante et tout ce petit cinéma n’aurait servi à rien. Je suis donc ravie de te voir, Nina Andersen !
    — Je vois que tu connais mon nom, sorcière, grimaça l’intéressée, un rictus fendant ses lèvres.
    — Je préfère le terme "Apôtre". Je suis la quatrième des cinq, nous nous sommes déjà rencontrées à Précipice. Mon nom est Alphei.
    — On se fiche de ton nom, rends-nous Igni ! scanda Ényo.
    — Le rendre ? Avec plaisir. Mais seulement si nous obtenons, en échange, ce que nous voulons. Et ce n’est pas toi, humaine inutile ! »

    D’un simple geste de la main, Alphei projeta un rayon de givre depuis le ciel. Celui-ci s’abattit sur Ényo, la projetant contre un mur, gelant ses pieds et ses mains.

    « Ce qui est inutile ne mérite pas d’exister. »

    Furieux, Loki dressa derrière lui une multitude de lacrymas incandescentes, rouges comme le feu qu’elles libérèrent autour d’Alphei lorsque le Némédien attaqua. L’Apôtre évita tout, mais Nina manqua d’être touchée. En réaction, elle s’arma de Ragnell et la pointa sur l’ennemie, le visage ne trahissant aucune crainte, aucune peur. Juste un sérieux des plus parfaits.

    « Tout ce que je veux c’est toi, Nina. Ou plutôt... Le Maître désire ton pouvoir, et je me dois d’exaucer son souhait... Qui est aussi le mien. »

    ♦
      Alphei, Quatrième Apôtre.


      Le Ciel leur tombe sur la tête.


    Simplement après avoir cligné des yeux, Nina vit Alphei flotter dans les airs, juste devant elle. Ses mains devant sa bouche, elle envoya comme un baiser à la jeune femme. Un baiser glacial. Les cheveux de Nina s’envolèrent et tout cessa. L’Apôtre retomba souplement sur ses pieds et recula de quelques pas. Soudain, Nina se sentit défaillir... Comme embrumé, son esprit peinait à se rendre compte de ce qui arrivait. Tout ce dont elle se rendait compte était que toute volonté lui était perdue.

    Et brusquement, sans préavis, elle se tourna vers Loki alors qu’il tentait encore de dégeler Ényo à l’aide de lacryma enflammées. Des éclairs jaillirent des mains de Nina pour s’abattre sur le Némédien qui, prit de cours, les encaissa de plein fouet. La jeune femme ne semblait même pas se rendre compte de ce qu’elle venait de faire. Ses yeux, rivés vers sa cible, semblaient vides.

    « Nina ! Que lui as-tu fait, Apôtre ?! hurla Ényo.
    — Admirez le pouvoir d’une rune asgardienne... »

    Alphei écarta les bras et ordonna à Nina, devenue son pantin, de lacérer ses amis à coup d’épée. Brandissant Ragnell, le bras tremblant, elle obéit. Dans ses élans d’esquive, Loki remarqua qu’Ényo était prise pour cible, toujours prisonnière. Il s’interposa, parant comme il le pouvait l’épée avec sa propre dague. Le Némédien mobilisait toutes ses ressources intellectuelles pour à la fois se protéger, préserver Ényo, comprendre le pouvoir de l’adversaire et... tenter de ramener Nina à elle.

    Au-dessus d’eux, le ciel était teint d’un pigment céruléen, enluminant le paysage de Sin d’une autre couleur que le gris. Le vent demeurait glacial lorsqu’il passait sur la peau. D’un coup, l’ambiance changea, les cieux s’embrasèrent et les nuages rougirent. Les yeux de l’Apôtre miroitaient l’incandescence de cet univers soudain... bien trop chaud.

    La glace entourant Ényo se changea en flamme et lui dévora poignets et chevilles. Dans un hurlement, la jeune femme trouva tout de même les moyens de s’équiper d’une lance aquatique. À l’aide des lacrymas de Loki, lequel commençait à comprendre la nature du pouvoir d’Alphei, elle put éteindre le feu. Mais leur vigilance diminuée, ils ne purent éviter un Rafeind s’effondrant sur eux.

    « Nina, tentait Asgard, insinué dans l’esprit de sa vassale. Nina, réponds-moi ! »

    L’Ange tenta d’insuffler un peu de sa magie directement dans le cerveau de la brunette, qui continuait à obéir, impuissante, aux ordres de l’Apôtre. Celle-ci était bien tranquillement nichée au sommet de la cloche, au côté d’Igni toujours endormi dans sa cage. Asgard faisait de son mieux, mais la nature du pouvoir hypnotique était directement liée à sa propre magie... À moins que !

    Pris d’une idée, il commença à absorber la magie parasitant l’esprit de Nina. Ce faisant, il allait probablement pouvoir briser l’æther ainsi canalisé, comme l’on anéantissait les runes une fois possédées. Asgard n’était pas certain du déroulé de ce plan sur le pouce, mais il fallait essayer.

    Victime de spasmes, Nina glissa au sol, y plantant Ragnell pour se retenir. Alphei, de sa hauteur, sembla surprise, puis se recroquevilla sur elle-même. La tête dans les mains. La douleur qu’elle ressentit sembla terrible, intense, et l’espace de quelques secondes, Loki et Ényo purent entrevoir un tracé s’enluminer sur son front. Alphei pouvait sentir la même chose sur sa propre peau.

    « La rune... » constata Loki.

    À côté, Nina haletait également. En sueur, elle semblait retrouver un peu de conscience, mais rien n’était encore joué. Sentant la chaleur déchirer son front, Alphei sembla comprendre ce qui venait de se passer. Cette fille possédait le pouvoir d’Asgard, son âme en lui. L’espion l’avait bien retranscrit au Maître, et c’était pour cela qu’il désirait l’avoir vivante. S’il pouvait se procurer l’âme d’Asgard, alors les Théologistes seraient capables de...

    Sa pensée ne put aboutir alors qu’une salve cristalline s’abattait sur elle. Avec un peu plus de difficultés qu’au début du combat, Alphei évita pour mieux contre-attaquer ; la jeune fille déchaîna le ciel, lui ordonnant de lancer une salve de feu sur ses ennemis. Comme sous soleil d’été caniculaire, la chaleur était telle que des vertiges s’imposèrent aux magiciens.

    « Puiiii ! »

    Sursautant à cet appel inopiné, les Crystal Claws, Nina comprise, braquèrent leurs regards sur la petite cage au sommet de la Cloche. Igni s’était enflammé ; visiblement, Alphei avait commis une erreur.

    « Tch... Comme si je devais craindre un slime, de toute manière. » pesta cette dernière.

      This girl is on fire.


    Malheureusement pour elle, la chaleur semblait abreuver Igni comme une fontaine enchantée. Le petit être brûlait si fort que sa cage fondit et il fusa, droit sur Alphei, à une vitesse phénoménale. L’Apôtre fut projetée au sol, le brisant en des dizaines de roches et de pavés éclatés. Son visage se crispa, elle clama que cet être impur serait annihilé avec les autres, qu’elle ne décevrait pas le Maître.

    « Espèce de vermine ! »

    Alphei se prépara à changer la couleur du ciel une nouvelle fois, mais une salve ardente lui infligea une douleur telle qu’elle se recroquevilla à même le sol démoli. Loki et Ényo, parés de lacrymas et d’armes enflammées, étaient aux côtés d’Igni pour combattre l’Apôtre. La lancière, passant outre la douleur de sa peau brûlée, scanda le nom d’une technique. Loki sembla reconnaître cela comme un ordre et termina ce qui devait être une psalmodie. Toute la chaleur, déformant les choses autour, sembla tourbillonner autour du trio.

    Nina, à peine remise de sa possession, fut ébahie par la puissance que ses amis déployèrent.

    « UNISSON RAID : PROMETHEUS FLARE !
    — PUIIII ! »

    Projetée dans les airs par un geyser de flammes, Alphei, inerte, finit par s’écraser une nouvelle fois.

    « Nina, à toi ! Pourfends-la !
    — Il n’y a que toi qui puisses purifier la rune qu’elle possède ! »

    Sous les appels de ses amis, la jeune femme se rappela soudainement tout ce qu’elle devait accomplir. Quand elle songeait qu’elle avait été possédée... et qu’elle n’avait servi à rien ! Cela bafoua sa fierté et, secouant la tête le temps de se relever, elle était de nouveau en pleine possession de ses moyens. Alors, brandissant Ragnell qui brillait désormais d’une lueur crépitante, Nina fit apparaître ses ailes et s’élança sur Alphei, ne lui laissant pas le temps d’éviter son coup.

    L’Apôtre encaissa de plein fouet, mais la lame se figea dans ses mains. L’ennemie lança un regard cruel à Nina et la lame se mit à chauffer, l’obligeant à se reculer. Alphei préparait de nouveau son souffle glacé, mais cette fois-ci, la rune apparut clairement sur son front.

    « Fais attention, cette attaque sera beaucoup plus puissante que la précédente ! » avertit Asgard.

    La jeune fille à la cape aspira autant d’air qu’elle le put et, joignant ses mains de nouveau, souffla un air glacé. Cristallin malgré la chaleur ambiante, il ne fondait pas ni se détériorait. En revanche, il forma une brume le rendant totalement identifiable, ce qui permit à Nina de l’éviter en s’envolant. L’air froid restait proche du sol. Dans une pirouette arrière, la brunette se plaça devant le nuage et le projeta sur son adversaire d’un grand coup d’ailes.

    « Tu es vraiment stupide ! C’est MON pouvoir, il ne me fera rien !
    — Mais tu ne posséderas personne d’autre pour autant. »
    Nina projeta un Rafeind sur Alphei qui l’encaissa de plein fouet. Profitant de son assommement, la magicienne brandit une nouvelle fois Ragnell au sommet de sa tête, et incanta un sort. La foudre tourbillonnait autour d’elle, et les nuages incandescents du ciel reprirent leur couleur grise et désolée. Le tonnerre gronda, appelant à lui une salve d’éclairs affolés.

    Asgard, en sa vassale, se prépara. Elle était sur le point de pourfendre l’Apôtre et il faudrait alors purifier la rune qu’elle possédait au moment-même où la lame transpercerait sa chair.

    Alphei peinait à se relever, même en voyant le coup que son ennemie, la cible du Maître, préparait. Elle lui avait promis de ramener vivante la détentrice du pouvoir d’Asgard... Elle, qui avait été Choisie, ne pouvait pas mourir ainsi !

    « Gungnir ! » scanda Nina en plantant son épée dans le sol, provoquant une explosion électromagnétique droit devant la zone d’impact.

    Sitôt après, elle bondit et fusa sur sa cible projetée en l’air. Préparant un coup d’épée latéral, elle était prête à pourfendre l’Apôtre. Elle allait le faire. Ce serait une rune de plus, et un danger de moins pour Pergrande...

    ... et le monde.

    « ANDREAM ! »

    * * *

      Les Théologistes.


    « Tu n’as pas à t’en vouloir, Mattheum. Ton échec ne sera pas puni, dès lors qu’il a permis de confirmer une bonne fois pour toutes mes soupçons. Je ne pouvais avoir tort, bien sûr, mais désormais aucune hésitation n’entravera plus nos actions.
    — Vous êtes trop bon, saint Hésiode...
    — L’avenir s’offre à nous, Mattheum : comprends-tu réellement l’impact que nous aurons sur le monde avec le pouvoir d’Asgard en notre possession ? »

    Le vieil homme se rassit puisque, dans un élan de joie non-mesurée, il s’était échappé de son immense fauteuil de velours rouge avec la souplesse d’un adolescent. Il tritura sa longue barbe, mêlée à ses cheveux d’un blanc parfait faisant ressortir à merveille l’éclat sanglant de ses iris. Il semblait si vieux et pourtant, Mattheum n’avait jamais eu le sentiment que la Faucheuse aurait le courage de s’approcher de lui.

    ♦
     Hésiode.


    « C’est bien parce qu’il me semble le réaliser que je m’en veux autant d’avoir échoué à vous apporter Nina sur un plateau d’argent...
    — Ton échec est dû à ta peur. Cesse donc de craindre ton pouvoir naturel. Il fut le don du destin à ta naissance, le symbole de ta puissance future et je dirais même, histoire de te le remémorer j’espère une dernière fois, l’aune de ta sacralisation. La souffrance dont tu l’accables n’est que le prix à payer pour parvenir à nos fins. »

    Mattheum, de sa carrure musculeuse et son teint de vampire, baissa le torse et la tête, entraînant dans le mouvement ses longs cheveux immaculés. Les mots d’Hésiode ne l’avaient toujours pas entièrement convaincu, fallait-il croire, même après toutes ces années.

    Son pouvoir haï l’avait jadis privé de tout, même de sa propre mère ; cette magie maudite lui avait fait semer la destruction toute sa vie, alors même qu’il ne désirait qu’autre chose : trouver sa place dans le monde qu’il démolissait par sa seule présence. Aujourd’hui, le seul but de son existence était d’utiliser cette magie maudite pour répondre aux desseins d’Hésiode, entremêlés aux siens.

    S’il avait passé son existence à contrôler ce pouvoir d’absorption de l’æther environnant, de manière à ne plus tuer la moindre personne à côté de laquelle il demeurait plus de quelques minutes, au même titre que le moindre arbre, ç’avait été en ce but. Détruire ce qui pouvait être détruit. Achever sa vengeance sur le monde qui l’avait accablé de ce pouvoir, et le reforger en une terre où plus jamais il ne serait un paria.

    « Je compte sur toi pour la suite, Mattheum. Continue d’orchestrer nos exactions dans les quatre coins de Pergrande, que nous montrions à ce pays qu’il est fini. Que jamais il n’aurait dû priver ma famille, ma dynastie, de la couronne. »

    L’Apôtre redressa son corps et planta son regard sanguin dans celui du vieil homme, tout là-haut sur son trône. Avant de partir, il adressa ses dernières salutations à la tête pensante des Théologistes.

    « Oui, père. »

    Dans un silence rompu par le claquement de ses talons contre le sol de marbre, le fils sortir de l’immense salle du trône en laquelle il avait été reçu. Bravant sans même le regarder le dédale de couloirs menant à sa chambre, il méditait en marche, les yeux clos. Dans sa tête se redéroulait la scène de sa défaite contre Nina Andersen, l’assaut de son attaque immense qu’il n’avait pas réussi à absorber. Pourtant, depuis qu’Hésiode avait formé le groupe des Théologistes, orchestré ses actions d’une main de maître au point d’avoir offert à cinq Apôtres le pouvoir des dernières runes asgardiennes... Jamais Mattheum n’avait eu l’occasion de remettre en cause sa puissance.

    Un sourire carnassier étira ses lèvres, dévoila ses canines acérées. Il ressemblait vraiment à l’idée que l’on se faisait d’un vampire...

    Nina Andersen l’avait vaincu, même s’il était toujours en vie pour s’en rappeler. Sans Alphei pour le ramener au QG, il aurait péri de la main d’une humaine. Certes, l’âme élimée d’Asgard l’habitait, mais lui ainsi que les quatre autres Apôtres possédaient le pouvoir des runes créées par lui. Cumulées à leur magie noire, rien ne pourrait les arrêter. Pas même cette fille.

    Il n’attendit même pas d’être dans sa chambre pour éclater d’un rire sinistre, si puissant qu’il fit trembler les murs et les fenêtres donnant sur la nuit noire tapissant les cieux de Stella.

    « Nous nous retrouverons, Nina... Je n’oublierai jamais ton visage. »

    Le Cinquième Apôtre se servit finalement un verre de vin parmi les plus grands crus. Les yeux rivés vers l’obscurité, il se demandait si ses deux camarades envoyés à Enca parviendraient à ramener la porteuse d’Asgard, une des Cloches d’Exitia originelle, ou les deux. Peut-être aucune et, s’il devait être purement égoïste, il admettrait que cela l’emplirait de joie. Après tout, s’il pouvait revoir cette femme et prendre sa revanche sur la seule à avoir dompté sa macabre magie jusqu’à aujourd’hui...

    Le Nouveau Monde pourrait bien attendre un peu plus.

    * * *

      Le bouclier qui protège les forts.


    « ANDREAM ! »

    Comme un cri de détresse, aigu comme le grincement des portes de la mort, un nom sortit de la bouche d’Alphei. Andream. Mais personne ne vint, et ce cri se perdit dans la poussière embourbant le sommet de la tour.

    Ragnell, souplement, trancha le corps de la jeune Apôtre. Ses vêtements s’ouvrirent, dévoilant sa chair rouge. Le sang la survolait par gouttes carmines, et comme au ralenti, Alphei se vit tomber. Personne n’était venu à son secours, et elle allait mourir.

    « C’est lui que tu cherches ? »

    La voix, inconnue, d’un homme résonna depuis le sol, vers l’entrée du toit. Alphei jeta un œil embrumé au-travers la tempête de poussière commençant à s’affaisser. Elle vit comme elle entendit le corps d’un jeune homme en armure caresser le sol gris et rocheux.

    « Andream... »

    Dans un fracas, la jeune fille le rejoignit sur la terre ferme tandis que Nina se réceptionnait souplement. Stupéfaite par l’interruption de la personne qui avait jeté le corps d’Andream, elle resta interdite quelques instants, contemplant la silhouette s’avançant lentement vers Alphei puis, d’un coup d’œil, le mouchard d’Alyce. Il clignotait en rouge, mais depuis combien de temps ?

    « Qui êtes-vous... ?! Comment avez-vous pu vaincre Andream ?! » s’époumona l’Apôtre, folle de rage.

    Alphei réunit une force vitale nouvelle pour se relever et se jeter aux pieds de son camarade, mais fut arrêtée par Nina et une salve électrique.

    « Toi... »

    Le vent devint brûlant, le ciel rougeoyait de la même rage qu’Alphei, qui, bestiale, s’élança vers son adversaire, oubliant les intrus venus interférer dans ses plans. Les murs de la tour rompue se brisèrent lorsque la terre trembla, suivant le déferlement éthéré de l’Apôtre, qui projeta d’une vague enflammée par-delà les frontières de l’édifice.

    « Nina ! s’écrièrent les Crystal Claws, impuissants.
    — Alphei ne... n’est pas aussi faible que vous le pensez... »

    Andream, une traînée de sang roulant au coin de son visage, peinait à se relever et faire face à ses ennemis qui ne l’avaient pas achevé. Six contre un, tandis que deux magiciennes aux destins opposés tombaient les flancs de la grande tour de Sin. Mais cela ne l’effrayait pas.

    « ... Je vais la chercher. » dit calmement un des combattants inattendus.

    * * *

    Alphei déchaînait une multitude de flammes magiques, sans même viser ni savoir ce qu’elles atteignaient. S’en servant pour atténuer sa chute, l’Apôtre se maintenait dans les airs tandis que son adversaire battait douloureusement de ses ailes brûlées, dont les plumes commençaient à manquer.

    Ce combat était leur dernier, et ce serait à qui durerait le plus longtemps. La chute était inévitable, mais les deux femmes se battaient pour être la seule à rester en vie car, dans leur état, l’issue serait mortelle.

    Nina peinait à éviter les gerbes flambantes, si chaudes que n’importe quelle épée de fer aurait fondu à leur contact.

    « UNE RACE INUTILE COMME LA TIENNE N’A PLUS LE DROIT D’EXISTER !! » mugit Alphei, emplie de folie, tandis qu’autour d’elle, la forêt carbonisait.

    Nina sentait l’épuisement venir à bout d’elle. La chaleur altérait ses sens, son esprit s’étriquait. Elle avait soif... Elle avait si chaud... Dans un dernier geste, celui du désespoir ou peut-être le contraire, elle regarda Ragnell dont l’acier chaud déchirait son gant et la peau au-dessous. C’était sa dernière chance. Des éclairs crépitèrent autour de la lame, augmentant un peu plus sa température.

    Puis elle la lança. Propulsée à la vitesse d’un éclair, elle transperça l’abdomen de la jeune fille aux yeux de haine, aux yeux de mépris, aux yeux de folie. À seulement quelques mètres de la fin, Alphei fut clouée à la tour comme dernière demeure. Les flammes quittèrent les airs, mais Nina sentit ses yeux se fermer. Et son corps tomber. Dans l’incendie des arbres de Sin sifflant leur douleur.

    Ses ailes avaient disparu.

      Ce que tu es devenu...


    Elle tenta de rouvrir les yeux, sentant un air frais et léger caresser sa joue, mais l’énergie lui manqua. Son oreille interne disait qu’elle tombait, mais pourquoi était-ce devenu si doux ? Et cette chaleur, si proche d’elle ? La chute sembla s’arrêter. Ses cheveux ondulèrent sur son visage, sans aucun ordre, mais des doigts les ôtèrent pour les replacer derrière son oreille gauche. Nina sentait sa joue contre un tissu épais, rugueux. Le genre de tissu dont sont constitués les vêtements d’un combattant. Incapable d’autre chose, elle se laissa porter. Quelque chose lui semblait familier. Une odeur, une aura...

    Une secousse traduisit qu’elle avait atteint le sol, portée par ces bras inconnus. Tout ce qu’elle désirait était alors d’ouvrir les yeux, mais...

    « Ça faisait longtemps, Nina... »

    Impossible. Cette voix...

    « Tu as changé... Si ces gens n’avaient pas scandé ton nom, et dans tout ce chaos, je n’aurais pas compris que c’était toi. » sembla sourire cette voix familière.

    C’en était trop. Elle devait en avoir le cœur net ! Le sien, de cœur, battait la chamade. Elle ne sentit même pas la douleur de ses bras lorsqu’ils s’agrippèrent au torse de celui qui la portait encore. Ses paupières, bravant la force de la fatigue, s’ouvrirent en grand, et elle vit du rouge, tout autour. Sur le torse, sur les arbres dont la calcination avait à peine cessé. Elle vit du rouge dans les cheveux de l’homme. Du bleu dans ses yeux.

    « Non...
    — Désolé de te décevoir, Nina... rit-il. Mais c’est bien moi. »

    Sans prévenir, de lourdes larmes roulèrent sur les joues de la jeune femme, qui ne réalisait pas bien. Son visage était juste figé, stupéfait. Puis elle reprit ses esprits, en acceptant que la vérité ne pouvait être autrement. Il était là. Il la tenait dans ses bras, là, tout de suite. Il était présent à ses côtés, et lui parlait.

    « Tu... »

    Au premier mot, le visage de Nina adopta l’expression appropriée à ses larmes.

    « Tu ne m’aurais pas reconnue ? Tu peux parler... Wilder ! Espèce de... »

    Il la posa par terre, appréhendant sa réaction tout en s’en amusant. Nina se dégagea brusquement de son étreinte, larmoyante, pitoyable, et recula d’un pas pour contempler celui qui n’était autre que Zélos.

    Ses cheveux avaient considérablement raccourci, mais ils étaient toujours aussi mal domptés. Sa carrure, déjà assez élancée, était plus forte, mais tout était fin... Même sous cette armure aux épaules immenses, elle le voyait. Elle connaissait cet homme mieux que quiconque mais il était vrai qu’elle ne l’aurait pas reconnu du premier coup d’œil tant il semblait être devenu une autre personne. Mais cette aura... Non, jamais elle n’aurait confondu cette aura, cette âme. Jamais.

    « Espèce de... ? Tu étais beaucoup plus spontanée, avant ! » plaisanta-t-il, ne souhaitant pas montrer à quel point il était à la fois gêné et heureux.

    Comme si aucun comportement n’aurait pu mieux exaucer ce vœu de spontanéité, Nina s’enfouit dans ses bras, prenant Zélos de court. Elle le serra si fort que les ceintures entourant la taille du chevalier étaient déjà en train de laisser des marques sur ses bras. Naturellement, trop fière pour l’admettre, elle chercha des excuses à ce comportement qu’elle n’avait pu empêcher.

    « Ne crois pas que tu m’aies manqué ou quoi que ce soit... Si je ne m’accroche pas à quelque chose, je risque de tomber. Je me suis battue, tu sais.
    — Oui, je sais bien. Tu es devenue beaucoup plus forte, Nina. Mais ne t’en fait pas... »

    Tendrement, il rendit son étreinte à cette jeune femme toujours aussi fière.

    « Moi non plus, tu ne m’as pas manqué... »

    Ils restèrent ainsi un petit moment, jusqu’à ce qu’une voix nasillarde les interrompe.

    « Quoi ?! C’est la copine de Zélos qu’on a sauvée ? Ce que le monde est petit ! » s’ébahit le propriétaire de cette voix bien trop portante, un blondinet aux bien larges épaules.

    À ces mots, Nina se retrouva à des années lumières de Zélos, lequel tentait de nier en bloc les suppositions de son camarade. Rouge de honte et avec une fréquence cardiaque beaucoup trop élevée, Nina menaçait de mort ses amis, Loki et Ényo – qui s’avéraient être descendus de la tour eux aussi – s’ils osaient croire ne serait-ce qu’un instant qu’elle était la petite amie de ce "petit prétentieux vaniteux inutile".

      L’espoir n’est peut-être pas perdu.


    « Si vous êtes tous là, c’est qu’en haut...
    — L’Apôtre de renfort est hors d’état de nuire, très littéralement ! scanda le blond. Et nous avons pu récupérer cette bestiole par la même occasion : ces deux-là nous ont dit qu’il était très important pour cette jeune femme... »

    De son épaule sauta une petite boule brune, gluante et tiède comme le slime de feu qu’il était. Igni se précipita sans détour dans les bras de Nina qui le serra tendrement contre sa poitrine. Elle n’aurait jamais cru pleurer autant ce jour-là, mais n’avait pas le temps de s’en rendre compte. Il était sauf, c’était tout ce qui importait...

    Mais il fallait encore faire les présentations et donner quelques explications, au sujet du mouchard notamment. Après tout, ce n’était pas tous les jours que ce genre de rencontre arrivait. Les trois autres chevaliers furent présentés par Zélos, qui en profita pour résumer son lien avec Nina comme "compagnons de voyage". Bien sûr, ce n’était que pour la forme : tout le monde savait que ce voyage avait été une profonde histoire les ayant fortement liés.

    Les quatre combattants en armure n’étaient autres que les Canta Dovahe. La cérémonie remettant sur pied cette organisation centenaire et légendaire avait eu lieu en l’absence des Crystal Claws, lors de leur escapade tragique à Précipice. Mais Nina se souvint que l’un d’eux ne lui était pas étranger...

    « Loki, Ényo, je vous présente mes confrères : le grand benêt blond qui s’amuse avec le petit Igni n’est autre qu’Hypérion van Eldir.
    — Si vous voulez faire plus court, appelez-moi El’ ! ponctua l’intéressé d’un clignement d’œil.
    — Ou ne l’appelez pas, c’est tout aussi bien... soupira le plus petit des quatre, aux cheveux noirs.
    — Hé !
    — Cet empêcheur de tourner en rond s’appelle Ymir Blainn. Il est assez précieux mais on s’y fait vite.
    — C’est l’hôpital qui se fiche de la charité, là...
    — Et enfin, voici le ténébreux A-... »

    C’est là que Nina l’interrompit. Elle recouvrit la mémoire du moment exact où elle avait rencontré cet homme. Ce n’était autre que...

    « Dans l’aéronef que j’ai pris il y a quelque temps déjà. Il était au départ d’Aprilia et pour Alkonost. Qui aurait cru... »

    L’intéressé était un grand homme, quoique plus petit qu’Hypérion. Ses longs cheveux châtains tombaient sur son visage et son armure obsidienne, masquant presque un de ses yeux d’apparence sévères. Pourtant, lui aussi devait se souvenir de cette altercation pourtant brève qui avait eu lieu dans le couloir de l’aéronef. Ils ne s’étaient pourtant échangé que des excuses, mais il s’en rappelait.

    « En effet, sourit-il doucement. Le monde est petit.
    — Ne vous en faites pas, sous ses airs froids comme les plus hauts pics d’Iceberg et effrayant comme... cet endroit, c’est un peu notre papa poule.
    — Tu me surestimes, Zélos... C’est juste que je suis en permanence obligé de te surveiller puisque tu ne sais pas te tenir en société dès lors qu’il y a quelques femmes.
    — Ah, ça fait plaisir de voir que certaines choses ne changent pas, trancha Nina avec froideur.
    — Oui non mais... Bref ! C’est Aiakos Iomon ! » bouda Zélos.

    Aiakos ?

    Nina resta interdite à l’entente de ce nom. Ce n’était autre que celui de son père, un terrible mage noir... Un mage noir que sa mère avait quitté pour revenir dans le droit chemin et qui avait refusé que les choses se passent ainsi et... l’avait faite tuer. Dans son propre jardin.

    Cet homme n’avait probablement rien à voir avec cet Aiakos-là. Pourtant, les traits de Nina se refermèrent. Elle ne pouvait s’empêcher d’éprouver de l’amertume pour le chevalier. Et celui-ci l’avait déjà remarqué...

    « Je voudrais pas faire ma raclette, intervint Ényo, parce que c’est un grand honneur de connaître les Canta Dovahe – j’espère que vous me signerez tous un autographe après ça –, mais nous avons une cloche à détruire, je vous rappelle ! »

    Sonnant comme la voix de la sagesse, ce qui était ironique, Ényo avait fait prendre conscience à tout le monde qu’ils se trouvaient actuellement à Sin, qu’un monstre poilu et sauvage rôdait sûrement dans les parages en quête de vengeance et qu’une cloche démoniaque attendait d’être annihilée.

    La tache fut confiée au plus puissant des Canta Dovahe. C’était Aiakos, ce qui fit tiquer Nina. Elle alla se mettre un peu plus loin vers les arbres, pour réfléchir. Se remettre les idées en place. Zélos était inquiet. Il remarqua que le lien mental qui les avait unis lorsqu’ils étaient encore Zina n’avait peut-être pas tant disparu que cela, finalement... Mais il admit silencieusement que Nina voulait être seule. Ils avaient tant de choses à se dire... Mais cela viendrait plus tard, hors de la terre hostile de Sin en premier lieu.

    Aiakos déploya sa magie des énergies. Au début, quand bien même il se concentrait sur la tour, Loki et Ényo ne sentirent rien. Même cette dernière, particulièrement affine avec les mouvements de l’éther, avait l’impression qu’Aiakos était juste en train de penser très fort. Pourtant, ils furent bien obligés de revoir leur jugement lorsqu’une concentration immense d’æther fit s’effondrer la tour sur elle-même dans un fracas tonitruant. La cloche n’eut même pas le temps de sonner car une centaine de rayons d’énergie la transpercèrent de part en part, ne laissant d’elle que de la poussière.

    Ainsi, une des quatre Cloches d’Exitia originelle ne risquait plus d’invoquer sur Humanitas un flot de démons assoiffés de chaos. C’était une menace de moins, mais trois demeuraient encore. Avant de quitter Sin, le groupe avait décidé d’incinérer les corps d’Alphei et Andream.

    Nina avait désiré s’isoler pour récupérer et purifier leurs deux runes. Elle n’avait pas voulu que Zélos la voie souffrir comme ça, à se tordre de douleur, mordant son propre bras pour que personne ne l’entende hurler. Il en demeurait alors trois... Trois, et ce serait fini.

    « N’oublie pas ma douzième fille, Nina... Je suis incapable de t’assurer qu’il sera facile de venir à bout d’elle, mais nous devrons y parvenir. Je serai avec toi jusqu’au bout... Merci, Nina. De supporter cela pour le monde et pour moi. »

    Pour l’heure, tout ce qu’elle voulait, c’était une bonne nuit de sommeil...

    ♦
      Canta Dovahe.


    by Nina

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