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    [Entraînement 5] Dépaysement septentrional [Corrigé] par Nina Andersen Sam 13 Aoû 2016, 00:53
    Nina Andersen
    Nina Andersen
    Briseuse de Mythes








    Entraînement 5



    Dépaysement septentrional (PARTIE 1)

    « Comment ça 6,5 ?!
    — C’est la dureté, sur 10, de la pyrite. Je suis navré de briser tes rêves mais ce n’est pas très solide… »

    J’étais si déçue que j’avais haussé la voix… Je soupirai longuement pour calmer mes quelques nerfs qui avaient mal pris l’information de Sirius. Ce n’était pas si étonnant finalement…
    Histoire de raconter ce qu’il y avait à raconter, je me trouvais actuellement dans la bibliothèque Est. L’utilité qu’avait eue mon arme en aethernium contre Hélène, la mage noire, lors de ma dernière mission dont j’étais justement rentrée la veille, m’avait mis en tête de poursuivre ma quête de nouvelles dagues aux possibilités magiques parfois insoupçonnées. Je disposais déjà de plusieurs couteaux dans ma dimension de stockage et, grâce à ma progression en tant que mage, je m’étais permis de commander à Dirk un renflouement de mes stocks, disposant ainsi non plus d’une dizaine de couteaux basiques – au moins deux fois plus petits que mes dagues – mais de quarante. C’était le nombre maximal que je pouvais manipuler en même temps, sur une courte durée. Et j’espérais qu’au fur et à mesure de ma progression cela me coûterait moins d’énergie d’en appeler plus et plus longtemps.

    Mais, comme je le disais, des dagues, j’en voulais plus. J’en avais une non-magique, dotée d’une valeur symbolique à la place. Je pouvais en manipuler une autre, mais sa valeur à elle était sentimentale car elle n’avait rien de magique non plus. Seule ma dague en aethernium disposait de propriétés de ce genre, comme j’avais pu le constater très vite. D’aucuns diraient certainement que trois dagues et quarante couteaux étaient amplement suffisants, mais… Pourquoi se contenter du bien quand l’on se savait capable de viser le mieux ? En l’occurrence, en ce qui concernait la magie, ma magie, je m’en sentais capable. J’avais pu remarquer au fil du temps ma progression : un mois plus tôt, je ne me serais peut-être pas sentie capable de viser ce mieux.
    Mais comme chaque trait psychologique susceptible de freiner l’épanouissement d’une personne nécessitait un déclic chez elle, j’avais reçu le mien. Après avoir tué Hélène, j’avais, en dépit du contraire dont il me semblait être sûre, été emplie d’un certain sentiment de remord. Je voulais combler cela. Dans ce monde, dans ce combat contre les mages noirs, je savais à quel genre de jeu je participais : tuer ou être tué. Mes remords représentaient pour moi une forme de faiblesse, un sentiment parasite qui ternissait la mémoire de ma mère, tuée par l’un des pions adverses que je devais faire tomber. Ce sentiment, je devais l’abandonner, et pour cela il me fallait faire tomber d’autres pions.

    Ainsi, mes pas m’avaient conduit sur le chemin de la bibliothèque Est que je connaissais par cœur. Mes mains, elles, avaient empoigné un livre bien particulier : un ouvrage sur les matériaux magnétiques. Ce n’était pas un livre de magie, donc. Juste de science. Et depuis quelques minutes je parcourrais ses pages, intéressée, jusqu’à ce que l’une d’entre elles pique ma curiosité. Ce minerai s’appelait la pyrite : il développait des propriétés magnétiques si on le chauffait. De ce fait, une dague taillée dans de la pyrite me serait très utile contre un mage de feu, entre autres choses… Il m’en fallait. Et voilà où nous en étions…

    « Mais après, ça ne t’empêche pas de t’en faire une dague, tu sais, si ça te fait plaisir. Tu peux juste me demander où l’on trouve de ce minerai et je…
    — Métaillou.
    — Pardon ?
    — Ils disent que c’est une roche métallique donc un caillou méta… Oh et puis oublie-moi.
    — … En effet, cela vaut mieux. »

    Je n’avais même pas honte. Au contraire, je boudais un peu… Après tout, si n’importe qui d’autre que moi avait fait ce jeu de mot il aurait été pris au sérieux ! Mais bon, soit… Je songerais à me taire encore plus, à l’avenir… De toute manière, je voulais de ce minerai, alors j’en aurais.

    « Donc éventuellement tu pourrais me demander où en trouver et je te répondrais…
    — Tu veux juste que je te demande sa localisation, hein. Tu trougnes encore pour la dernière fois, n’est-ce pas…
    — Même pas. Onentrouvonordefiore.
    — Merci de confirmer mes dires, mon cher Sirius ! Au Nord de Fiore, donc… »

    Trougner… Voilà bien un mot que je ne prononçais qu’à cause et en compagnie de Dirk…
    Plus précisément, le minerai se nichait dans les montagnes septentrionales du pays. Au moins, je n’aurais pas à demander de l’aide à Kabaret et de toute façon ce n’était pas prévu. Si je ne perdais pas la mémoire, Hélène avait dit que sa mère fondait une guilde noire à Callune, également au Nord. Je demandai alors quelques précisions à Sirius et décidément, le sort me poussait à faire ce voyage : la mine qui extrayait de la pyrite entre autres minéraux se trouvait une poignée de kilomètres plus loin ! C’était sûr, je partirais pour le Nord d’ici une heure. Comme il était midi, je pris une collation avant de réunir quelques affaires dans ma chambre. Une heure me laissait amplement le temps de réfléchir à mon trajet. Premier arrêt, les abords du village minier. Devant le portail de la salle des dimensions, je posai une dernière question à Sirius ; en effet savait-il en détail où je devais me rendre, mais ce n’était pas mon cas.

    « Dis-moi juste le nom de ce village s’il te plaît, Sirius ? Que je sache où je mets les pieds…
    — Huhu…
    — Que signifie ce rire ?
    — Que le monde est infiniment petit, Nina. Passe-leur le bonjour de sa part ! »

    Ni une, ni deux, je n’étais plus à la guilde mais en bordure d’un village forestier haut perché dans le relief nord-fiorien, plus précisément dans une petite clairière en contrebas, très en hauteur tout de même. J’eus à peine le temps de manifester mon irritation à mon ami immatériel à l’égard de sa mauvaise farce – en tout cas que j’avais prise comme telle – que mon regard se posa droit sur un panneau. Un petit écriteau de bois, en forme de flèche et un peu abîmé, et gravé d’un nom, en rouge argile. Je me figeai au moment de le lire… C’était une nouvelle blague n’est-ce pas ? Sirius avait la rancune facile, c’était juste cela. Non ? Si ce n’était rien de tout cela, alors peut-être que Kazad Thingaz était bel et bien ma destination…

    * * *


    Kazad Thingaz. Si mes oreilles connaissaient bien ce nom, mes yeux ne pouvaient pas se targuer d’en savoir autant. Un frisson parcourut mon échine tout le long de ma grimpée des hauts escaliers de bois qui menaient à la ville. Plus je m’en approchais, moins la lumière était intense. Puis une rampe commença à s’élever à chaque bord de l’escalier, tandis que l’obscurité diminuait un peu plus à chaque marche gravie. Les quelques lampes à huile qui avaient éclairé mon chemin à l’ombre de grands arbres densément feuillus ne furent plus qu’un souvenir lorsque la canopée s’ouvrit çà et là, permettant à des rayons du soleil de se frayer un chemin jusqu’à la ville qui se dressait devant moi. J’étais à Kazad Thingaz, la ville forêt. Le village natal de Dirk.

    Kazad Thingaz:

    Mon père m’en avait souvent parlé comme d’un endroit qu’il aimait beaucoup, calme, loin de la densité de population en milieu urbain – Rinnovo était si calme en comparaison de grandes villes… – et surtout doté d’habitants ayant le sens de l’honneur. De la part de Nains, je ne pouvais en douter. Je ne remarquais pas beaucoup de monde dans les rues, à vrai dire à part quelques Nains au loin et une poignée d’Humains devant les stands marchands, l’on ne pouvait pas parler d’affluence.
    Je savais de Dirk qu’il s’était disputé avec son père des années auparavant. Peu avant de trouver Dimitri et de le recueillir, sachant que si je comptais par rapport à moi, qui avais soufflé métaphoriquement mes vingt bougies dernièrement – la vie à la guilde me l’avait fait complètement oublier… -, il avait aujourd’hui 26 ans. En somme, depuis une quinzaine d’années, Dirk avait quitté les siens pour s’installer au centre de Fiore. Et pourtant… il m’avait parlé d’y revenir après avoir vendu sa boutique. Je me demandai si cela signifiait que…

    Oh, et puis je pensais trop. D’habitude, je pensais trop mais vite. Là, j’étais restée plantée au moins plusieurs minutes à l’orée de la ville. Je devais m’y aventurer pour dénicher de la pyrite et l’acheter… Mais où aller ? la ville était construite tout en hauteur, un arbre semblait représenter une maison et une passerelle. D’autres, au tronc plus large, en contenaient peut-être deux ou bien appartenaient-ils à des Nains plus riches avec de plus grandes forges. J’en profitai pour faire glisser mon regard le long des arabesques que formaient les différents escaliers et ponts qui connectaient les arbres-maisons entre eux, leurs rampes ou encore les volutes purement décoratives sous les plateaux des bâtisses. Une pulsion se réveillait en moi… Je voulais parcourir l’endroit où Dirk avait grandi et étudié la métallurgie pour devenir le grand – paradoxalement – forgeron qu’il était aujourd’hui. Cet endroit, sa tranquillité, son aura, tout m’intriguait et tout semblait me plaire.

    Ainsi, je multipliais mes pas en son sein, flânant entre deux boutiques d’armes et au-travers de deux ponts. Beaucoup de Nains étaient dans des tavernes au bas des arbres, la plupart donnant directement sur l’extérieur. Au plus près des racines d’ailleurs se trouvaient majoritairement ces tavernes ainsi que les plus grandes boutiques, et surtout les plus lourdes. Alors que les rues presque silencieuses commençaient à accueillir de plus en plus d’individus, je me rappelai à l’ordre. Je repensai à la raison de ma venue, initialement la pyrite et pas autre chose. Mais alors que je vérifiais d’un coup de main ou deux que les tresses que je m’étais faites au matin tenaient encore et qu’aucune brindille ou feuille morte ne s’y était nichée malencontreusement, je me fis bousculer dans le dos un peu trop violemment : suffisamment en tout cas pour me faire vaciller et rencontrer le sol de terre sèche. Une voix caverneuse sonna aussitôt.

    « Ah, jemut men ! »

    Du khuzdul, bien sûr… Je sus que le nain n’était pas tout seul alors que je ne m’étais même pas encore retournée. En effet, une autre voix, un peu plus douce – bien que j’eusse douté de l’usage de cet adjectif pour la désigner – mais tout aussi grave se fit entendre. De ce que j’avais compris grâce à mes bases en langue khuzdul, le deuxième homme avait reproché sa maladresse au premier qui lui avait demandé si j’étais une Elfe, car je ne semblais ni être du village ni être une marchande. Je me retournai alors que le Nain à la voix calme me demandait comment j’allais, dans sa langue, dans le doute, en me tendant la main.

    « Rasup men… » répondis-je en acceptant son geste.

    Ils s’étonnèrent de constater que je leur avais parlé dans leur langue alors je leur fis comprendre, aussi justement que possible, que je ne disposais que de bases mais que je parlais la langue universelle. Ainsi, ils m’adressèrent la parole en l’utilisant et, comme ils la parlaient mieux que je parlais khuzdul, le dialogue était devenu beaucoup plus simple. Je me présentai alors à eux et eux à moi. Cependant… Je ne pus que me trouver coite d’avoir face à moi le chef de la ville ! C’était l’homme à la voix plus douce, l’autre étant son ami de beuverie : ils en sortaient justement, mais ce dernier avait un peu trop forcé sur le rhum selon lui. Le chef avait beau être un nain, il était un peu plus grand que moi – déjà que je me trouvais petite… – et vêtu d’une armure très morcelée, d’or et d’argent, ainsi que d’une fine cape et d’un casque pointu. Il transportait un immense bouclier d’or assorti à son marteau, sublimement forgés et quasiment parfais même si l’on voyait qu’ils avaient servi. Son comparse, lui, était vêtu de plus de tissu que d’or mais pas dépourvu pour autant ; si l’autre avait la barbe d’un roux enviable, lui avait le poil aussi blanc que le marbre.

    Je n’avais connu comme Nain que Dirk, mais… Il m’avait raconté des histoires. De ce que j’en savais, c’était un peuple très restreint mais très respectable. Le chef, qui se nommait Orrok, me demanda ce qui m’amenait ici. Je lui répondis sans fioriture que j’étais à la recherche d’un peu de pyrite que l’on se procurait ici selon… ma source. Lui me demanda en retour de le suivre à sa demeure quand il sut que j’étais une mage. Je ne compris pas pourquoi… Je me mis à douter avant de lui répondre mais j’avais confiance en Dirk, et il ne dirait jamais du mal de son peuple dans sa globalité. Alors je le suivis, tout comme l’autre Nain à barbe blanche très attachée, qui s’était débarrassé de son ivresse superflue, Gloren.

    Orrok:

    Gloren:

    Sa maison était un de ces arbres au large tronc, pas plus grande que les autres du genre, pas mieux décorée, en somme très humble. Cela m’étonna compte tenu de la réputation des Nains vis-à-vis de l’argent mais en même temps, il était malhabile de prendre les réputations pour la plus pure des réalités. Les deux hommes me conduisirent donc dans le bureau d’Orrok, pièce au plafond bas mais à hauteur largement suffisante pour des gens comme moi, éclairée seulement par des lampes à huile, semblables à celles parsemant le parcours sombre des escaliers à l’entrée. À y regarder de plus près, celles-ci semblaient magiques : chacune contenait le même niveau d’huile qui ne semblait pas se consumer. Ce n’était pas le type de bureau de chef que j’avais coutume de voir ou en lesquels j’avais souvent pu entrer. Sûrement qu’à une époque, j’aurais mal aimé me retrouver dans ce genre d’endroits… Mais vivre en bas m’avait permis de passer outre ce bas trait de noblesse et j’en étais fière.

    « Comme tu m’as dit que tu étais une mage et que tu voulais de la pyrite, j’ai songé à une possibilité pour chacun de nos partis de s’en tirer à bon compte. Mais avant j’aimerais savoir quelque chose… Comment connais-tu notre langue ? Nous n’avons pas pour habitude de l’enseigner, vois-tu, et il ne me semble pas qu’un livre à ce sujet ait jamais été écrit pas un de nos ancêtres.
    — En effet, car ce n’est pas un livre qui m’a permis de connaître ces quelques mots… À vrai dire, j’ai été, en quelque sorte, recueillie par un Nain il y a de cela cinq ans. Je pense que vous le connaissez car c’est ici le village natal dont il m’a souvent parlé… Dirk, s’appelle-t-il. »

    Je ne pensais néanmoins pas provoquer un, encore moins deux, étouffements critiques chez mes deux hôtes… ! Tout particulièrement chez Gloren à vrai dire. Tout de même étonnée, je leur demandai ce que j’avais bien pu dire de si particulier pour provoquer une telle réaction ! Il ne me fallut pas plus de temps pour comprendre…
    Gloren était le père de Dirk. Et c’est avec lui que mon père s’est disputé au point de quitter son village pour vivre à Rinnovo. Après que j’eus appris cela, ce n’était plus moi la plus abasourdie, mais Gloren, qui s’assit en trombe sur la pauvre chaise à côté de moi pour me bombarder de questions sur la santé de Dirk, ses conditions de vie, son niveau en forgeage, ses qualités de guerrier… Bien entendu, tout était positif ! Mis à part, il fallait bien le dire, les qualités de guerrier : je n’avais en effet jamais vu Dirk se battre. En réalité, selon Orrok, son comparse s’inquiétait beaucoup pour son fils depuis la dispute, mais était beaucoup trop fier pour l’admettre et s’engager à réparer les pots cassés. Bien qu’une fois il eût voulu partir à sa recherche, son travail de guerrier et superviseur de l’activité minière l’en avait empêché. Il n’avait plus retenté depuis. Je lui racontai comment s’étaient passées les années avec lui, ce qu’il représentait pour moi, dévoilant une partie de mon histoire personnelle. Je parlai vaguement de tout cela jusqu’à en arriver à son intégration à la guilde dans les minutes qui suivirent la présentation de son talent au Maître, précisant par là même qu’il avait quitté Rinnovo.

    « J’ai toujours voulu l’élever selon la voie du guerrier… Il a toujours préféré le forgeage. Mon tempérament a déclenché une dispute malgré nos âge, sans que j’en ai bien honte…
    — Si vous vous inquiétez tant pour lui, je peux vous dire qu’il est un excellent forgeron. Je ne le connais que depuis cinq ans donc je ne peux juger de sa progression mais… Regardez. Ces deux dagues. Il les a forgées pour moi. »

    Je sortis ma dague en or noir, ornée de rubis, et celle en aethernium. Les deux Nains les regardèrent avec une certaine fascination, comme si j’avais usé de qualificatifs trop dérisoires pour parler de ses facultés. Gloren grogna, je levai un sourcil.

    « Boundiou… Quand je pense que j’ai voulu l’empêcher de faire ce qu’il voulait ! Tu en ravives, des souvenirs, petite… »

    Je souris. Il avait l’air d’être un bon père… Très fier, avec un honneur de Nain, comme son fils. Mais la discussion reprit vite son cours lorsqu’Orrok relança le sujet initial : ma pyrite. J’expliquai que je voulais en faire une dague, précisant que je connaissais sa solidité relativement moyenne et en quoi les qualités de ce minéral avaient la primauté sur ses défauts dans l’usage que je comptais en faire. Alors Orrok intima à Gloren de me conduire à la mine. C’était jour d’extraction aujourd’hui, semblait-il, alors en tant que fille de Dirk – adoptive importait peu : « la famille c’est la famille » m’eurent-ils dit – et en tant qu’invitée, ils me proposèrent de venir assister au minage. J’acceptai de bon cœur et fus conduite à l’extérieur du grand arbre et en direction de la mine à la sortie du village, alors qu’un bruit tonitruant que j’identifiai comme celui de l’eau s’amplifiait progressivement.

    Il n’y avait en face de moi après quelques centaines de mètres de marche plus de forêt. Du moins sur une courte distance, celle-ci ne pouvait se développer car était creusée une falaise entre deux monts du massif. Si profonde que je ne parvenais pas à distinguer le torrent qui ondulait en son fond à cause de l’embrun massif de la cascade juste à ma gauche. Elle était vraiment grande et le bruit était devenu assourdissant maintenant que nous passions à côté. Je ne pus m’empêcher de l’admirer… Je n’avais jamais vu de chute d’eau auparavant. Enfin… pas de cette ampleur. Et j’avais tant lu de livres qui détaillaient ce genre de paysages que je ne pouvais qu’être ébahie par un tel spectacle. Aucune photographie n’aurait le potentiel de transmettre autant d’émotions, une telle impression de puissance, un bruit aussi particulier ou cette odeur de roche mouillée. J’étais comme une enfant devant ce paysage si bien que Gloren dût tirer mon bras pour que je continue de le suivre. J’en profitai pour lui poser une question qui m’avait taraudée lors de la traversée de Kazad Thingaz.

    Kazad Thingaz, extérieur de la mine:

    « T’en fais pas, tu pourras revenir la voir quand tu voudras.
    — Oui… Dites-moi ? Comme vous êtes le père de Dirk et que je considère ce dernier comme mon père… Est-ce que cela de vous mon grand-père ? »

    Je baissai les yeux, timide d’avoir posé une question de ce genre… Je rougis en fronçant les sourcils quand Gloren se mit à pousser un rire franc.

    « Je me le demande ! J’aimerais savoir un peu qui j’ai pour petite fille, gamine. Viens, on va te mettre à l’épreuve. »

    Je… J’avais été bête… Enfin, comment pouvait-il considérer comme sa petite-fille quelqu’un qu’il n’avait pas côtoyée une journée entière ? Et moi, franchement… Quel genre de questions posais-je ? Je secouai la tête de droite à gauche en trottinant pour rattraper l’avance que le Nain avait prise en continuant de marcher pendant que je me giflais mentalement. Nous pénétrâmes dans la mine, à l’étage le plus haut. Beaucoup de bois était entassé à l’entrée, sûrement en prévision de travaux à effectuer. Mais je n’eus pas le temps d’observer plus que cela l’extérieur car ce fut à l’intérieur de se dévoiler à mon regard scrutateur. Surtout lorsque nous empruntâmes le tunnel de gauche qui menait à la zone d’extraction de la pyrite.


    Kazad Thingaz, mine:

    Il commençait à faire froid mais j’arrivais à ne pas frissonner. Gloren m’intima que c’était très rare pour un non-Nain d'entrer dans la mine et que je devais donc bien profiter de la visite. C’est ce que je fis sans rechigner ! De nombreux Nains mineurs s’attelaient à frapper les murs de leurs pioches dans un concert agité de bruits métalliques. Cela expliquait le peu de population dans les rues de la ville… Les seules sources de lumière possibles au beau milieu de la roche étaient les nombreuses lampes et lanternes, près des travailleurs et au plafond, le long du chemin de fer surplombé de petits wagons transporteurs. Certains Nains faisaient même le voyage assis sur des montagnes mouvantes de roches, de métaux ou même de pierres précieuses ! Je pensais qu’une si grande variété de minerais dans une seule et même mine était impossible… Alors je demandai à mon guide de plus amples informations.

    « À vrai dire, cet étage est seulement fourni en pyrite. Comme nous ne l’extrayons pas très souvent, il y en a encore beaucoup : cet étage n’a que huit ans. Les autres, au-dessous, sont plus vieux et ce sont les plus profonds qui contiennent les minerais les plus précieux que nous récoltons entre quatre et une fois par an selon leur nature, sa valeur et sa rareté. Cette mine a cent ans, notre village en a dix de plus : nos ancêtres nains ont quitté l’ancienne mine, vide, pour construire un village ici, auprès d’une autre pleine de nouvelles richesse à se faire. Ah, et si tu te demandes combien d’étages elle comprend… Sept.
    — C’est fascinant… Je comprends pourquoi la rivière est complètement invisible depuis les ponts, mêmes lorsqu’on regarde à l’opposé des cascades… ! »

    Tout le long, je n’avais pas même jeté un œil à mon interlocuteur, trop occupée à manifester mon intérêt pour les murs aux éclats cuivre et or ainsi qu’à ceux qui les frappaient de leurs pioches. J’appris que tout ici était extrait manuellement, sans machines à SEP comme celles que l’on trouve assez souvent dans les carrières plus récentes. Du coup, tout était plus cher, mais la faible probabilité de bavure additionnée à l’expertise des Nains en la matière rentabilisaient tout de suite le prix de vente tout en promettant aux Nains de jolis chiffres de bénéfice. Les merveilles du commerce.
    Nous ne tardâmes pas à nous arrêter face à une paroi vide de tout travailleur. Gloren me tendit une pioche qu’il avait ramassée juste à côté et m’enfonça un peu brusquement un casque de chantier sur la tête. J’eus un hoquet de surprise !

    « Tiens. Là, y a de la pyrite, tu la vois ? Frappe ici de toutes tes forces et extraits-en, pour essayer. »

    Il était plus gentil que son apparence le laissait transparaître en tout cas, preuve encore qu’il ne fallait pas se reposer sur elles. Cependant…  je ne me sentais guère capable d’extraire quoi que ce soit… Et si je frappais le minerai au lieu de la roche qui l’entourait ? Je n’allais pas pousser jusqu’à utiliser ma magie quand même ! Le Nain me donna une tape encourageante dans le dos – un peu trop fort une fois de plus, pour preuve je m’étais contractée pour éviter de tousser un grand coup – et m’incita à essayer. Bah… Je n’avais pas de véritable raison de refuser, surtout si l’on me le proposait de manière si insistante. Alors je fronçai les sourcils, pinçai mes lèvres et levai la pioche derrière mon épaule, la tenant à deux mains. Je devais me concentrer sur le point précis qu’il me fallait frapper. Je n’avais qu’à considérer cela comme un bon entraînement de précision ! Concentration sur le point d’impact, canalisation des forces et des aethernanos dans les muscles… Et relâchem-… !

    BOUUUM !

    by Nina

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    Entraînement 5 – Dépaysement septentrional (Partie 2) par Nina Andersen Sam 13 Aoû 2016, 00:58
    Nina Andersen
    Nina Andersen
    Briseuse de Mythes








    Entraînement 5



    Dépaysement septentrional (PARTIE 2)

    « Euh, je… Rassurez-moi, ce n’est pas moi qui ai causé… » murmurai-je, légèrement paniquée.


    Quand je vis le visage surpris puis furibond de Gloren fixer un point en direction de la sortie de la mine, je compris que non, ce n’était pas de ma faute. Cela fut encore plus clair quand il cria à l’attention de tous les Nains présents ainsi qu’à la mienne de quitter la mine et de se précipiter vers le village. La pioche toujours à la main mais le casque au sol, je commençai à courir sur le chemin hasardeux, faisant de mon mieux pour ne pas tomber et me remerciant pour avoir porté des chaussures presque plates. Je fus éblouie par la lumière naturelle aussitôt après avoir rejoint l’extérieur, mais, la main en visière, je ne devais pas m’arrêter. Le bruit de la cascade peinait à couvrir le son des cris de guerre lancés depuis le village. Mais que se passait-il ?!
    Je décidai de presser le pas et finis par me retrouver au niveau de Gloren, lui demandant des éclaircissements sur la situation.

    « Ces mages noirs… Qu’ils aillent au diable ! C’est la troisième fois qu’ils nous attaquent ! Ils veulent nous prendre notre mine et prétendent réquisitionner les lieux… Hier déjà, ils sont venus, moins d’une dizaine, faibles, alors nous les avons rétamés facilement, même si les Nains n’ont pas de pouvoirs. Mais là… »

    Non, c’était certain, une fois arrivés vers l’entrée du village, il était indéniable qu’ils fussent au moins trente. Trente mages noirs venus mettre la pagaille en ville. Et pour réquisitionner de force ce qui ne leur appartenait pas, ils semblaient avoir déployé un moyen aussi vil et dangereux que leur propre existence… Le feu. Magique, qui ne se propageait pas. Un des arbres-maisons juste à côté de l’entrée était en train de brûler, et d’après les cris d’une femme à son pied, son enfant était encore à l’intérieur. Alors que je regardais l’incendie d’un œil horrifié, j’entendis Gloren me hurler de faire attention derrière moi. D’un réflexe, je jetai un œil et aussitôt vis-je un individu très grand, qui n’avait rien d’un Nain, sur le point d’abattre un sort sur moi. Je me retournai en entraînant la pioche avec moi. Quand il tomba au sol, tenant l’outil entre ses côtes, je compris qu’ils avaient abandonné la simple méthode d’intimidation pour obtenir ce qu’ils voulaient… En colère et toujours peinée d’entendre les cris de la femme, retenue d’aller vers l’arbre en feu par ce qui semblait être son mari, je décidai de tenter le diable.

    Après tout, ce feu était magique. Il n’agissait pas comme un feu normal, sans foi ni loi, mais ciblait cette maison. Un homme parmi la foule, qui semblait être le chef, menaça de consumer d’autres arbres si les Nains ne laissaient pas leur mine. C’était la phrase qu’il me fallait pour m’ôter toute peur. Si ce feu était magique, mes aethernanos m’en protégeraient au mieux et, en prenant le moins de temps possible, je réussirais à sortir avec l’enfant, assez indemne pour réduire ces mages noirs à l’état de compost. Je le jurai. Orrok arriva sur place à ce moment-là, hurlant à tous les nains guerriers de protéger Kazad Thingaz.
    L’arbre ne disposant pas d’escalier, je me mis alors à grimper à l’échelle aussi vite que possible, franchissant les barreaux trois par trois, forçant sur mes bras et mes jambes autant que je le pouvais. Le feu avait épargné une majeure partie de l’échelle mais, arrivée à la maison haut-perchée, je dus redoubler d’attention car celle-ci était en piteux état. À peine eussé-je posé le pied à l’intérieur que la fumée irrita mes sinus. Après une toux, j’entendis un enfant pleurer et appeler à l’aide entre deux hoquets, me prouvant qu’il était vivant même si… la fumée ne lui faisait pas du bien. Soulagée mais d’autant plus déterminée, je remontai le col de mon chemisier sur mon nez et m’accroupis, cela étant tout ce que je pouvais faire pour ne pas m’étouffer. J’observai la maison, cherchant la porte pouvant mener à la pièce de l’enfant. En me frayant un chemin vers l’une des les deux que je voyais, celle opposée à l’entrée, j’évitais soigneusement le feu qui ravageait le mobilier disséminé sur mon passage. Pauvre famille…

    Au travers de cette porte, j’entendais l’enfant de façon plus nette, même s’il semblait commencer à s’épuiser… La poignée était faite de métal, je ne pouvais pas la toucher.  Je réunis alors autant de forces que possible dans ma jambe droite et frappai ce qui n’était plus qu’un bout de bois brûlant un peu trop épais. Elle se brisa facilement et je n’eus plus qu’à foncer dessus, mon épaule en tête, pour élargir le passage. Tant pis pour mes vêtements, il y avait quelque chose de beaucoup plus important. Quand je le vis, il leva la tête vers moi, en larmes, allongé sur le sol. Je commençais à être en proie à une légère panique mais suffisante pour se muer en adrénaline. J’avançai vers lui, sortis une dague à la hâte et déchirai une des manches longues de mon haut avant de révoquer mon arme, demandant au petit garçon de tenir le tissu sur son nez. Il devait avoir six ou sept ans. Puis je le pris dans mes bras, relâchant mon col avant de le reprendre une fois que l’enfant fût stable. Des larmes n’arrêtaient pas de couler de mes yeux depuis le début à cause des cendres et ceux-ci piquaient de plus en plus : je devais me hâter de rejoindre la sortie.

    Quand ce fut le cas, je pus avec délice respirer de nouveau l’air au moins à moitié pur de l’extérieur et, avec colère, remarquer le carnage qui se tenait en bas. Je n’avais dû rester que quelques minutes dans la maison et il y avait déjà des blessés de tous les côtés… Et même des morts chez l’ennemi. Cela, par contre, m’emplissait d’une sorte de bonheur macabre. Je m’efforçai de continuer à tenir l’enfant dans un seul bras en même temps que je descendais l’échelle. Ce fut un peu dur mais j’y parvins… Ses parents étaient toujours au sol, mais avaient reculé à quelques mètres de l’arbre, cachés, pour se protéger de la bataille. Mais un mage, épéiste, qui les avait repérés tenta de s’attaquer à eux. Il n’en eut pas l’occasion puisque son épée se retourna contre lui et l’épingla à l’arbre brûlé par le tissu de son t-shirt. Je lui lançai un regard noir.

    « Toi, reste ici. »

    Je confiai le petit garçon à ses parents, la mère pleurant maintenant de joie, me noyant de remerciements. Cela me gênait, vraiment… Mais… Peut-être que pour une fois je pouvais les accepter et garder la fierté d’avoir sauvé une vie. Ma gêne se transforma en baume au cœur. Peut-être pouvais-je être une héroïne, en fin de compte… Je pris l’initiative de crier à tous ceux qui ne pouvaient pas combattre et qui étaient encore ici de reculer. La suite ne serait peut-être pas du goût de tout le monde.
    M’élançant au côté d’Orrok après avoir accroché l’autre mage noir à l’arbre par un endroit… plus centré et stable, j’étais prête à en découdre avec l’ennemi. Les Nains avaient bien travaillé, il n’en restait plus qu’une vingtaine. Je jaugeai leur puissance... Le chef ressortait du lot. Aucun n’était particulièrement puissant à part lui, semblant avoir plus d’expérience de combat que de vigueur. Des Novices, sûrement. Mais leur chef, lui, devait être de mon niveau. Je remarquai qu’il usait d’une magie aquatique… Tout ce qu’il y avait de plus basique à première vue. Orrok se battait contre lui, avec son immense marteau sur lequel brillaient des runes. Les Nains n’étaient pas bons en magie mais en enchantements, ils semblaient s’y connaître, car les coups qu’il portaient étaient dévastateurs. Je laissai les autres Nains guerriers s’occuper des mages mineurs. Si Orrok, le chef, et moi, mage, unissions nos forces, j’étais sûre que nous nous en sortirions facilement.

    « Orrok ! Je viens vous aider. Mon pouvoir n’a pas d’ascendant particulier sur un mage de l’eau mais je ferai de mon mieux pour ne pas vous gêner ! »

    Il me remercia puis me demanda quelque chose en khuzdul, chose que je compris.

    « Un peu. » répondis-je.

    En effet, le khuzdul n’était pas la seule langue des Nains. L’Iglishmek, la langue des signes nanesque, était de rigueur. Et quelques signes m’étaient connus. Rien de bien pointu une nouvelle fois mais suffisamment pour nous permettre de prendre le mage noir par surprise. Mais c’était la première fois que je ne me battais pas seule… Il me fallait être d’autant plus attentive.
    Le chef des mages noirs semblait ne pas me prendre au sérieux, sûrement un jugement de faciès tout à fait médiocre de la part d’un supposé « conquistador ». Il lança une gerbe d’eau sur moi de ses deux mains. Il était décidément plus bête que je le pensais ! Je fis signe à Orrok que je m’occupais de lui. J’évitai sa gerbe et fonçai, invoquant une dague simple pour occuper ses mains et concentrer son attention sur moi. Mais alors que je courrais, le sol devint boueux et glissant, et j’en trébuchai ! Le mage noir en profita pour former une spirale aqueuse autour de moi qui me fit pivoter ; je m’efforçai toutefois de garder mes esprits et invoquai une dizaine de couteaux avant de les précipiter sur lui.

    Il les esquiva mais cela lui coûta beaucoup. Alors que je me réceptionnais au mieux sur le sol glaiseux, je levai ma main droite et fis un signe, regardant en direction du mage noir qui s’attendit à de la magie et fondit sur moi afin m’empêcher un sort qui n’aurait jamais été lancé de toute façon. Les paroles de Dirk me revinrent en tête, celles de l’époque où il m’enseignait les rudiments de sa culture. « Peut-être un jour cela pourra t’être utile, alors garde ces gestes bien en tête ».
    Quand Orrok abattit son marteau sur le côté droit du mage noir, à la manière du monstre de la Carrière des Aérolithes, j’aurais presque eu mal pour lui mais je préférai me relever pour épier les alentours. À ma droite, contre un arbre, le chef ennemi peinait à se relever à cause de son bras ballant. Il avait bien résisté au marteau enchanté d’Orrok… Je constatai qu’il y avait de l’eau çà et là au sol… Il avait certainement paré une grande partie du coup.

    Peu importait. J’invoquai une demi-douzaine d’armes avec Kantet Assault pour m’occuper des rebuts qui venaient en renfort… Je dus adapter la hauteur et la portée de l’attaque à celles, restreintes, que m’offrait la forêt, en faisant tout particulièrement attention aux Nains guerriers tout autour de moi. Ceux-ci avaient déjà éliminé beaucoup de mages noirs, menés par Gloren qui était sans pitié, à l’instar de ses camarades. Sept mages restants. Un jeu d’enfant. Je parvins à me rappeler d’un signe pour demander de regrouper l’ennemi alors je l’effectuai. Laissant Orrok affaiblir leur meneur, je levai le bras, un sourire carnassier étirant mes lèvres. Tous en ligne. Quand je baissai le bras, mon fouet frappa la terre et y resta, gardant dans son étreinte les mages pris au piège comme de vulgaires rats d’égouts. Je perçus un signe de Gloren juste avant qu’il ne brandisse son marteau en train de s’illuminer : je pus comprendre qu’il s’apprêtait à porter le coup de grâce. Je décidai d’y apporter mon grain de sel alors… Je lançai ma chère dague en aethernium, qui avait déjà fait des merveilles, comme une graine au beau milieu d’un champ labouré.

    « Khazâd ai-mênu !! » cria-t-il.

    Et la terre se souleva sous les mages lorsqu’il l’abattit. Quand les mages noirs soufflés par une explosion inattendue plurent sur le sol souillé par leur présence, entiers ou non, tout le monde comprit que la plaisanterie avait assez duré. Heureusement que les individus inaptes au combat s’en étaient allés car… ce spectacle me retournait l’estomac. Alors que c’était en partie moi qui l’avait monté. J’avais sous-estimé la concentration en aethernanos des attaques d’un marteau enchanté par un Nain. Il faudrait que je fasse quelque chose pour pallier à ça dans le futur. Que je développe des techniques plus… propres. Démembrer une personne ne me convenait pas… J’en avais mal au cœur…


    Essoufflée, j’avais l’impression de m’en être bien tirée. Il m’avait encore fallu prendre des vies, mais… ç’avait été pour la bonne cause. Tuer ou être tué. Et en l’occurrence, je vivais encore. Les mages noirs… Une nouvelle fois la faiblesse s’empara de moi et je me mis à sangloter de rage, en silence, sans réellement pleurer...
    Je ne croyais pas qu’éliminer les mages noirs effacerait le Mal du monde. C’était une utopie sans fondement, et quand bien même elle en aurait, je n’aimerais pas qu’elle soit réalité car cela signifierait la fin des espèces conscientes à l’origine de ces concepts. Car pour avoir un sens, le Bien avait besoin du Mal. Si l’un n’existait pas, la notion même de l’autre serait impossible. J’avais ainsi fini par me convaincre que j’agissais non pas pour le Bien, mais pour le Mieux. Que j’avais le droit d’être égoïste si cela signifiait venir à bout d’individus qui l’étaient plus que moi. Que je n’avais pas le droit d’avoir envie de vomir chaque fois que je tuais un individu qui aurait pu se délecter de mon propre cadavre.
    La main calleuse de Gloren se posa sur mon épaule.

    « Est-ce que ça va ? Tu n’as pas l’air très bien, le regard dans le vague…
    — Je… Oui, je vais bien, merci de vous en inquiéter. J’étais juste en pleine réflexion. »

    Il me proposa de me rendre chez lui pour que je puisse me laver et manger. Des Nains spécialistes du bois se chargeraient de la reconstruction de l’arbre calciné et d’autres de se débarrasser des corps qui jonchaient au sol. Orrok, lui, avait déjà capturé le chef ennemi en piteux état et s’en allait l’interroger. Il était nécessaire de connaître plus de choses sur eux, au cas où cette attaque aurait été dirigée par quelqu’un de plus haut-placé.
    Il ne fallut pas marcher longtemps pour quitter le sol dévasté de l’entrée de la ville et poser le pied sur le parquet de la maison de Gloren. J’étais en effet ravie de pouvoir prendre un bon bain et me désinfecter : mon état superficiel était lamentable. Coupures, suie, habits déchirés et trempés… Rien n’avait été épargné et encore je m’en tirais plutôt bien. Le repas qui s’en suivit fut tout à fait correct, tout autant que ceux de Dirk en tout cas. La cuisine faisait très terroir et comme je n’étais pas très difficile, j’avais beaucoup apprécié.

    J’avais d’ailleurs passé la nuit chez lui. Le lendemain matin, la famille du jeune garçon – un demi-nain – que j’avais sauvé des flammes avait tenu à me remercier avec un chemisier tout neuf fait par sa mère pendant la nuit sur le modèle du mien. J’avais eu du mal à refuser quand ce petit garçon était arrivé vers moi, son paquet à la main, et surtout son immense sourire et ses yeux pétillants malgré les nombreux bandages qu’il arborait… J’avais été tout particulièrement attendrie par le câlin qu’il m’avait fait en me remerciant de sa voix fluette et adorable, tremblé quand Orrok m’avait remerciée personnellement pour ma participation à la bataille, et offert à Gloren mon plus beau sourire lorsqu’il m’eût dit qu’il était fier que je sois la fille de son fils. Tant d’attention sur moi, tant d’affection portée sur moi, alors que pour moi mes actes étaient si naturels par rapport à ma fonction de mage blanche… Pour la première fois, je me sentais fière d’avoir agi comme je l’avais fait. Je me sentais fière d’être à l’origine du bonheur d’une famille… J’étais si fière que j’en pleurai quand Orrok m’offrit une dague en pyrite au nom de la vie d’Errim, le fameux petit garçon, avant que je parte pour la prochaine étape de mon escapade. Et cette fois, je ne pris pas ces larmes pour de la faiblesse.

    Dague en pyrite:

    Je tentai bien de la payer, mais on me le refusa systématiquement. J’en avais assez de recevoir mes dagues gratuitement, j’avais l’impression que j’abusais de la gentillesse de ceux qui me les offraient… Mais quelque part, je pensais que cette dague en pierre symboliserait la première vie que j’avais pu sauver, malgré toutes mes faiblesses et tous mes défauts. Alors j’acceptai finalement le présent. Elle était très belle, à l’instar de toutes mes autres lames les plus précieuses. J’avais le sentiment qu’à chaque fois que j’en obtenais une, j’avais progressé en tant que mage et en tant que personne. Je me sentais bien, vraiment bien.
    Toutefois, ce n’était pas un bien à prendre pour acquis. Je devais encore lui trouver un phylactère pour pallier à sa fragilité. Un phylactère d’indestructibilité me semblait être un choix tout à fait convenable. Et je devais trouver un mage noir avec un pouvoir cohérent pour sa création. J’espérai que le sort soit de nouveau de mon côté.

    Orrok, avant mon départ, me dit en haut des escaliers que le mage noir était parti rejoindre les siens sous terre. Mais entre-temps, il avait réussi à lui ôter de la bouche le nom de sa guilde. Elle se trouvait à Callune, petit port de pêche à la moule peu fréquenté – ce qui peinait à donner de la crédibilité aux derniers propos d’Hélène à mes yeux. Et puis quand même, quand elle m’en eût parlé, c’était censé être une petite guilde, pas une capable de lancer un assaut… Elle s’appelait…

    « Mistaken Prophecy. Un nom à rallonge.
    — … Je déteste les prophéties. »

    * * *


    Gloren avait demandé au seul Nain qui en possédait une de me prêter sa jument le temps de mon expédition punitive à Callune. Ce dernier avait accepté mais… Je ne savais pas monter à cheval…

    Je me retrouvai finalement sur une selle. Sur la jument, donc. Tenant les rênes aussi fort que je pouvais pour ne pas m’envoler alors que cette furie dévalait les escaliers du village à toute vitesse sans bavure comme si elle le faisait tous les jours, comme si c’était possible pour un cheval tout à fait normal, filant comme le vent qui dispersait mon cri d’agonie à certainement plusieurs kilomètres à la ronde. Lorsque nous arrivâmes en bas de la montagne, je m’étonnai d’être encore en vie – même si j’étais morte à l’intérieur, l’âme ballante… Elle poursuivit sa course sur les chemins de terre, au galop, alors que je peinais à tenir en équilibre et que j’avais très mal aux fesses.
    Selon Sirius que j’avais appelé à l’aide pour me servir de carte routière, doutant que la jument, aussi cascadeuse puisse-t-elle être, sache lire les panneaux, je devais tourner à droite au prochain croisement.

    « Mais comment tourne-t-on ?!
    — Rêne d’ouverture à droite et rêne d’appui à gauche en assistant la direction du cheval avec ton bassin et…
    — S’il te plaît évite le jargon !
    — Tire un peu sur la rêne à droite pour donner la direction et colle la gauche au cou du cheval. Penche-toi un peu à droite aussi. »

    Une fois le fameux croisement en vue, je tentai d’exécuter les mouvements décrits par Sirius mais la jument continua à galoper tout droit !

    « M-Mais tourne ! Tourne, bonté divine ! »

    J’entendais Sirius rire aux éclats tandis que, paniquée, je tirai un peu trop fort sur la rêne de droite : la jument pris un virage serré et je manquai de tomber, m’accrochant in extremis au cou de l’animal pour ne pas me faire éjecter. La route semblant droite pour un petit moment, je pus me redresser… mais le sort ne me laissa pas le temps de bien retrouver mes esprits et Sirius m’interpela de nouveau.

    « Tourne à gauche et tu y es dans deux minutes.
    — Je ne veux pas tourner ! Contrôle son esprit, va dans sa tête, je ne sais pas, mais fais quelque chose !
    — Tu plaisantes ? Je vais la tuer !
    — Mais là c’est moi qui vais mourir !!
    — Quelle égoïste…
    — Non mais je t’en prie ! KYAAA !! »

    * * *



    Alors que ma vie prenait fin en même temps que ma route, la jument me déposa au beau milieu de la ville de Callune. J’avais la tête qui tournait et je ne sentais guère le bas de mon corps, mais je parvins à descendre de son dos sans me casser la figure à l’atterrissage. La ville de Callune… semblait être un gros mensonge. Dans le sens où même qualifier l’amas de six maisons de bois troué de village était ridicule. C’était un hameau délabré où trois paires de septuagénaires devaient résider en vivant de moules et de petits calamars échoués. Mais la jument que j’attachais à un arbre souffla tout à coup très fort du nez dans mes cheveux. Je lui jetai un regard noir mais celui-ci se tourna bien vite dans la direction qu’elle visait.
    En légère périphérie du hameau se dressait un bâtiment relativement grand. Disons aussi grand que toutes les maisons de pêcheurs réunies pour n’en faire qu’une seule. En gros, sur une enseigne grise, droite, rectangulaire et triste, était gravé le nom « Mistaken Prophecy ». Bien… J’avais donc atteint ma destination finale. La mère d’Hélène, maîtresse de cette guilde, devait être tuée pour rétablir l’ordre et venger les habitants de Kazad Thingaz. Je repris tout mon sérieux, respirant abondamment un air salin.

    « Atchii !
    — Très mignon.
    — La ferme, moustique.
    — Moi aussi je t’aime Nina : qu’il est beau de constater l’aura sucrée-pailletée de notre amour, chantonna Sirius en forçant une voix nigaude.
    — Combien sont-ils, ô mon bien aimé Sirius ? ironisai-je en levant les épaules.
    — Quatre. Ils ont perdu tout leur menu fretin, il ne reste que leur maîtresse et trois sbires accessoires, sûrement présents pour le décorum. Mais fais attention, car le dégagement d’aethernanos de cette femme semble un peu plus important que le tien. »

    Je gardais cela bien en tête en entrant dans la guilde, tranquillement, par la porte d’entrée. C’était le moment de montrer ce qu’une mage d’Aeternitas savait faire quand elle avait une idée bien en tête. Architecture : banale. Pas d’étage, juste une pièce principale et deux annexes remarquables sur les côtés. Un bar, sur toute la largeur du mur du fond, et de nombreuses tables et chaises constituaient la seule décoration notable. Mais en disant cela j’oubliais les quatre mages noirs qui me regardaient comme si la Mort venait leur rendre visite. Oh, mais quelle bête je faisais : c’était le cas.



    Je n’avais ni l’envie ni le besoin de parler. Tout le monde comprit pourquoi j’étais ici et ce que je venais faire aussitôt après que j’eus sorti mes dagues en arc de cercle au-dessus de ma tête. Objectif : à défaut de roi, prendre la reine. Un fou essaya bien de m’empêcher de franchir la première rangée en me lançant un éclair dessus, mais je l’esquivai agilement. Sirius ne plaisantait pas en parlant de sbires accessoires : c’étaient de bas novices, à tout casser… Sûrement aurait-il pu prendre le temps de se perfectionner, s’il en avait eu devant lui. Ma lame de pierre avait reçu son baptême et sonné les cloches d’un combat qui s’avérerait tout à fait stimulant au vu du regard meurtrier que me jetait la maîtresse des lieux. Mais elle ne bougea pas. Soit. S’il me fallait vaincre les deux sous-fifres restant, pas de problème.
    Le premier, un mage télékinésiste de bas niveau, tenta de me mettre au sol en me frappant avec des bouteilles d’alcools empruntées au bar à l’arrière. Mais j’ouvris ma dimension de stockage afin de les y entreposer. Je n’eus qu’à profiter de sa surprise pour tout lâcher au-dessus de sa tête et me ruer sur lui pour l’achever sans fioritures. Dans le duel dague en or contre cervicales, l’un avait le malheur d’être désavantagé…

    Il ne restait que le dernier pion debout. Cette femme était odieuse… Regarder ses sbires se faire massacrer et ne rien faire, les envoyer au combat sachant qu’ils n’avaient aucune chance tant ils manquaient d’expérience… Pour moi, dans les faits, cela ne changeait rien. Cela ne me donnait qu’une raison supplémentaire pour vouloir l’éliminer. Celui-ci me surprit. Je ne l’avais pas bien observé en arrivant, car il était resté tapi dans le coin de la pièce que je n’avais pas vraiment balayé du regard… C’était un enfant. Il devait avoir huit, peut-être neuf ans. Dans ces eaux-là. Je fronçai les sourcils face à lui avant de me figer : il sanglotait.

    « Tue-la, qu’attends-tu ? » lança la mère d’Hélène sur un ton monocorde.

    La ressemblance avec le visage de sa fille était terriblement forte, mais elle paraissait bien plus froide que sa progéniture. Mais leur regard était tout bonnement identique. Un regard qui ne promettait pas de bonnes choses. C’était un enfant qu’elle envoyait à la mort, comme ça, sans ciller. Un peu plus jeune et à sa place aurait bien pu se trouver Errim, l’enfant demi-nain. C’était pathétique. Manipuler un gamin ainsi… Je ne retins pas un grognement de mépris. Entre deux sanglots, il sortit un couteau de sa poche et fonça sur moi avec. Je ne l’esquivai même pas, me contentant de l’arrêter avec mon pouvoir. Le petit pouvait y mettre autant de forces qu’il le voulait, jamais la lame ne m’atteindrait. Je soupirai et le regardai de haut alors qu’il semblait utiliser son pouvoir sur le couteau pour le faire grossir encore et encore jusqu’à pouvoir à peine le soulever. Mais il s’efforçait. Tout ça pour une femme adepte de la magie noire qui l’avait converti à son délire. En maintenant mon pouvoir sur l’arme, je m’accroupis à son niveau pour lui parler.

    « Pourquoi es-tu ici ?
    — C’est… (Il se tourna vers la mère d’Hélène et me lança un regard tristement déterminé) C’est ma nouvelle maman. Elle m’a sauvé la vie en me disant que c’était ce que le Seigneur Zéleph voulait. Je dois la remercier en l’aidant !
    — Si tu l’aides je devrais te tuer.
    — Je m’en fous ! Je suis prêt à mou… mouri… Je… sanglota-t-il. Je veux pas mourir… Maman… »

    Après qu’il eut dit ça, je me relevai, lentement, et fixai la femme d’un regard assassin. Cette harpie… Je poussai le jeune garçon qui ne dégageait quasiment pas de pouvoir derrière moi, doucement. J’étais sûre que je pourrais trouver quelque chose à faire pour lui après, pour le remettre dans le droit chemin avant qu’il ne soit trop tard… Pour le moment, une seule chose m’importait : mettre fin aux activités de cette femme. Elle se leva enfin, daignant me faire face. Je lui donnai mon nom, elle me refusa le sien. Tant pis. Elle me regarda de manière hautaine avant d’empoigner à son tour une bouteille d’alcool. Elle en vida le contenu sur le sol mais le liquide sembla soudain s’arrêter… Alors, elle arracha l’eau solidifiée et me dit d’une voix monotone.

    « Je peux solidifier la matière, la rendre telle l’acier trempé sans en être. Essaye donc de me désarmer, mage.
    — Hum… Mais avec plaisir… Voyez-vous, maintenant que vous venez de me donner votre pouvoir, j’ai encore plus de raisons de vous tuer. »

    Aussitôt après avoir dit cela, je me ruai sur elle dans une estocade, ma dague en or noir à la main, les autres volant dans mon dos tout aussi prêtes à frapper. Elle évita habilement chacune d’elle et tenta de me porter un coup avec sa masse d’alcool, sans paraître laisser la moindre faille dans son déplacement. Sirius avait raison, elle dégageait beaucoup de magie… Mais je voyais mal comment elle pouvait exploiter la sienne pour le moment. Alors que je me retournai pour lui faire face, elle avait déjà arraché un des pieds d’un tabouret de bar à côté d’elle et s’en servait comme deuxième arme pour m’attaquer ! Elle allait vite, très vite, si bien que je peinais à faire autre chose que parer ses coups avec mes dagues. C’était à ce moment que je bénissais ma magie qui me permettait, moyennant un peu plus de concentration qu’à l’accoutumée, de manipuler mes dagues en même temps que j’en utilisais une de mes propres mains… Mais je me cognai à une table sur ma route, me retrouvant bloquée.

    Elle tenta de me porter un violent coup à la tête mais je l’esquivai de justesse en me baissant, avant de me reculer et envoyer une lame tailler son poignet droit. Cela ne le coupa pas mais fut suffisant pour lui faire lâcher prise. Je souris, victorieuse, tandis que son visage ne laissait pas transparaître la douleur.
    Dans la seconde d’après, cependant, le mien oui. Je sentis quelque chose me lancer dans le dos, une douleur atroce… Les yeux écarquillés, un maigre son sortit de ma bouche quand je compris qu’un couteau s’était planté dans ma chair. Ma gorge se serra et je me retournai : c’était l’enfant. Victorieux, il eut un rictus à mon égard et retira violemment son arme de mon dos avant de m’entailler l’arrière de la cuisse avec. Mon étonnement était tel qu’il avait pris la primauté sur ma douleur. Je n’en revenais pas d’avoir été aussi naïve.

    « Petit… Je suis si déçue… »

    Il me tira la langue en revenant à l’assaut avec son arme que j’évitai, assez mal car elle frôla ma cuisse une fois de plus. Avant même de pouvoir me remettre d’aplomb, la femme frappa ma plaie avec l’outil qu’elle tenait encore. J’étais vraiment déçue. Pas tant de lui… Mais de moi-même. À genoux, je mordais ma lèvre pour oublier la douleur de mon dos et exprimai toute ma haine à l’égard de cette situation.

    « J’ai été assez bête pour t’épargner… Tu as trahi ma confiance… Héhé… Bien, fort bien…. Ça m’apprendra à l’accorder à un mage noir. J’ai été bête… Terriblement bête d’avoir eu de la pitié pour toi. Terriblement stupide d’éprouver le moindre remord quand je tuais des gens comme vous. Bien… Très bien… »

    Je n’avais pas ressenti une telle émotion depuis longtemps. Sûrement même ne l’avais-je jamais ressentie. Sauf peut-être à l’égard de Stellans. Pas de la colère, pas de la fureur, pas du désir de meurtre… Non, juste du dégoût. Du dégoût et une profonde peine. Le couteau dans les mains de l’enfant n’y était plus. C’était moi qui le contrôlais. Il fut sûrement très surpris de le retrouver dans son estomac.
    Je me levai malgré la douleur toujours présente dans mon dos et sur ma cuisse. Je ne voulais plus avoir de pitié pour les mages noirs. Hommes, femmes, même enfants. S’ils n’avaient jamais existé en premier lieu, peut-être que tout aurait été différent dans ma vie. Si leur dieu n’avait jamais été créé… je n’aurais jamais été déterminée à participer à leur purge.

    La mère d’Hélène sourit, confiante. Mais moi aussi j’étais confiante. Je crus que des larmes avaient coulé sur mon visage, des larmes de dégoût, à ce moment-là. Tout ce que je voulais était sa mort. Toutes mes dagues m’accompagnèrent dans mon attaque, fusant très vite vers elle. Cette fois, je n’hésitais plus : c’était à son tour de tenter d’esquiver le moindre de mes coups. Mais j’étais comme dans un état second, je ne me rendais pas bien compte de ce que j’étais en train d’accomplir. La vitesse de mes dagues me semblait bien plus lente que ce qu’il en était dans les faits. Je n’avais même pas remarqué que son deuxième poignet saignait car l’un de mes coups l’avait touchée, et qu’elle était maintenant désarmée. La reine semblait de plus en plus en difficulté. Après tout, elle n’avait pas le temps de se procurer un nouvel objet à solidifier, d’autant que je l’éloignais le plus possible du bar afin de l’acculer contre un mur. Mais elle trouva une faille dans mon attaque qui semblait sans fin : elle roula au sol et sauta de table en table jusqu’au centre de la salle.
    Bien. Si c’était l’endroit où elle souhaitait mourir…

    « Kantet Assault – Cloud. »

    Ma dimension de stockage s’ouvrit sous elle et de nombreuses lames en sortirent, celles que je n’avais pas encore rendues à Dirk malgré les jours nombreux qui avaient suivi mon escapade en Caelum. Elles épinglèrent sa jolie robe un peu trop longue au sol de sa propre guilde. Deux de mes plus belles dagues figèrent ses pieds au même endroit. Une idée d’attaque amusante venait de germer dans mon esprit… Et je comptais bien l’essayer. Pour ce faire, je lançai une première dague dans sa direction. Celle-ci s’arrêta au beau milieu de sa route.
    Ma dimension de stockage libéra tout autour de la femme les quarante couteaux que j’avais apportés et ceux-ci formèrent un nuage autour de la reine que j’allais faire tomber. Je pensai qu’elle était sur le point de se rendre compte qu’elle n’avait plus aucune échappatoire, plus rien d’aussi solide que l’acier à exploiter pour se tirer d’affaire. Une fois tout ceci en place, je me rendis face au bord de mon nuage tranchant.

    « Merci pour votre magie. » souris-je en claquant des doigts.

    Kantet Assault - Cloud ; version 40 dagues:

    Les quarante couteaux se précipitèrent tous en même temps sur celle qui venait de me crier sa plus belle insulte. J’étais un peu déçue de la tournure qu’avait pris ce combat… Elle avait dû penser que se battre à son plein potentiel face à moi était inutile. Tant pis pour elle.
    Je la traînai par la jambe, malgré une certaine difficulté, et la ramenai auprès de la jument. Je devais faire de cette femme un phylactère d’indestructibilité pour ma dague de pyrite. Disons par-là que j’offrais la possibilité à son corps de servir autrement qu’en tant que réceptacle d’une âme pervertie. Je ne pus retenir un bâillement… Alors je demandai à Sirius de ramener la jument au village. Je ne voulais pas m’encombrer de cette femme : de toute façon, elle tomberait de la monture.

    * * *


    Quant à moi, je m’étais rendue à la guilde, un poids mort, littéralement, sur les épaules qu’il me tardait de décharger car la douleur de mon dos reprenait et devenait de moins en moins soutenable. L’adrénaline faisait des miracles, mais quand elle n’était plus… Sirius m’aida dans ma peine en me téléportant, moi ainsi que mon ingrédient, devant le bureau du Maître. Malgré mon état peu enviable et mes habits tâchés de sang, je frappai à sa porte. Ma demande était simple : avoir accès à l’Argykosmos. Sans grande surprise, il accepta, mais voyant mon état, il décida de me soigner en premier lieu. Cela me gênait que ce soit encore le cas mais… je ne pouvais pas rester comme ça, c’était indéniable. Il me proposa de m’accompagner après m’avoir félicitée – augmentant considérablement ma part de fierté – mais je refusai. Je préférai découvrir cela seule !

    Sirius m’aida à la sortie du bureau en me téléportant face à cette machine magnifiquement sculptée que je découvrais d’un œil ébahi : l’Argykosmos. C’était donc cela qui allait me permettre d’obtenir mon phylactère… Il m’expliqua que cela concentrait d’abord la magie de l’individu de manière cent pour cent pure – et dans le respect du développement durable – dans une lacryma instable. Cette lacryma pouvait devenir un phylactère : les forgerons savaient généralement s’y prendre pour les graver sur les armes ou les armures.
    Après que le corps fut placé en lévitation entre les deux cornes qui semblaient pousser depuis la base sphérique noir de jais, je reçus cette fameuse lacryma à l’issue du processus qui n’avait laissé aucune trace de la mage noire.

    Libérée d’un poids, je me rendis au côté de Dirk, ma lacryma en main. Je lui demandai s’il voulait bien me rendre un service, puis j’eus une idée lumineuse avant même de lui faire part de la raison qui me poussait à venir le voir. Il savait que j’étais partie en escapade, mais pas où…

    « Papa… Est-ce que ton père te manque ? »

    Le temps d’obtenir une réponse qui signifiait, en langage « homme fier », oui, j’en appelai encore une fois à mon camarade immatériel pour nous téléporter droit devant la maison de Gloren, à Kazad Thingaz. J’espérai que cela leur ferait plaisir à tous les deux de renouer, et c’était là l’occasion parfaite pour moi de faire preuve de ma gratitude à chacun d’eux.
    Je ne pourrais décrire longuement sans me perdre la scène de retrouvailles qui se déroula devant moi. Des nouvelles aux éreintes en passant par les insultes et autres reproches à s’en tirer la barbe. Des hommes, des Nains, des forgerons ou des guerriers… J’avais ce jour-là cumulé beaucoup de sentiments. C’était si agréable d’en ressentir autant, en fin de compte… Je devais avouer que me regarder dans un miroir à ce moment m’aurait donné le vertige. Si peu de temps… En si peu de temps, tout avant tant changé ! J’avais l’impression de n’avoir été qu’une coquille vide des années durant, et que la vie magique que m’avait en quelque sorte léguée ma mère, mage elle aussi, était tout ce qu’il me fallait pour m’épanouir. Mais au moins je souriais. J’étais devenue une criminelle, mais je le faisais pour la bonne cause. Pour une organisation d’origine divine. C’était assez cocasse de dire ça, sachant que je n’avais jamais vraiment eu foi en une religion. Ce n’était toujours pas le cas, à vrai dire… Mais mon Maître était un Archange. Que fallait-il de plus pour avoir foi en sa cause ?

    Ainsi cette vie avait-elle fait de moi une criminelle, certes. Mais une criminelle au côté du Ciel.

    by Nina

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    Nina, tu dépasses les bornes. De façon positive. Home run avec la limite de caractères. S+ !

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    [Entraînement 5] Dépaysement septentrional [Corrigé] par Raziel Sam 13 Aoû 2016, 22:19
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    Voici le compte-rendu détaillé de la correction :

    - c'était un entraînement, et les 300 mots y sont plus que largement fournis. 500 points donc.

    - sans difficulté : S+, 500 points.

    - il y avait un total de... 612 lignes, vivivi, soit 6 120 points de base.

    - toujours et encore : parfait.

    - cohérence irréprochable. 100 points.

    - on ne peut pas dire que le khuzdul soit proprement original. Mais heureusement tout le reste de l'histoire l'est. 50 points !

    - Gloren, Orrok, la vilaine madame (pour laquelle je n'ai ressenti aucune empathie, tant pis pour elle), j'ai beaucoup aimé tes nouveaux personnages et ce qu'ils représentent. Je te mets 500 points d'histoire.

    - ne change rien pour le rendu. 100 points.

    - bonus d'humour pour Orrok : mort violente. Et sale. Et puis j'aime les meurtres d'enfants avec force sarcasmes. Quelle cruauté ma chère... 250 points d'humour, un peu noir, un peu obscur, mais très corsé dans tous les cas.

    - perfection et rendu parfaits ? Syntaxe excellente ? 300 points de rédaction, cela va de soi.


    TOTAL : 8 420 points augmentés à 8 500 par le bonus de perfection !

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