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    L'Épreuve d'Uelema






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    L'Épreuve d'Uelema par Liesel Engelwald Jeu 16 Jan 2020, 20:45
    Liesel Engelwald
    Liesel Engelwald
    Gardien du Savoir







    L'Épreuve d'Uelema 200112021406594351
    L’Épreuve d’Uelema

    Partie I



     Océan.


    Depuis le ciel, les oiseaux ne devaient voir qu’un rectangle blanc au milieu d’une étendue bleue. L’avion de Liesel avait fini par les mener au beau milieu de l’océan. Transformer l’avion en grand bateau avait été un jeu d’enfant grâce à Avel. C’était d’ailleurs plus lui que le vent qui faisait glisser le radeau sur l’eau. Liesel pouvait enfin se reposer. Entre le combat contre Ignia et le vol qu’il avait dû malgré tout diriger, il était épuisé.

    La petite barque les avait portés pendant plusieurs jours, tantôt poussée par le vent et une grande voile, tantôt tirée par un rapide courant ouvert par le mage d’eau. Si les odeurs d’une vie en mer commençaient à piquer le nez, la faim et la soif n’étaient au moins pas un problème. Il suffisait de demander et la mer offrait de petits orbes d’eau remplis de poissons. Enfin, c’était plutôt Avel qui les lui arrachait humblement.

    La nuit, Liesel dispersait des feuilles en feu autour du bateau pour éclairer les alentours. Il les enflammait grâce à une torche de papier qu’Avel allumait le jour à l’aide d’un disque d’eau pour un effet loupe sous le soleil… Toute une entreprise.

    Bien que leurs compétences de survie fussent mises à l’épreuve, les deux garçons appréciaient ce voyage, et ce malgré l’odeur infâme qui émanait de leurs aisselles.


    « On ne devrait plus être très loin.
    — Tu es sûr ? Pas de terre en vue…
    — Taewe est isolée, entre Sin et Enca.
    — Ma foi… Si tu en es sûr…
    — Je reconnais l’océan. »

    Liesel leva les yeux au ciel. Reconnaître l’océan ? Il délirait. Mais bon, il devait savoir de quoi il parlait.

    « Ah, demanda Avel, en pensant à autre chose je me pose la question : comment tu as fait face à Ignia l’autre jour ? Les clones je veux dire. »

    Liesel se lança dans des explications farfelues qui semblèrent sans aucun sens.

    « … et c’est comme ça que j’ai pu tester la création de souvenirs, erinnerung machen, en berg. Je ne suis qu’un novice, ça commence par des illusions puis en progressant tu peux recréer les souvenirs complètement. La mémoire du présent est la plus facile à exploiter, le cerveau n’a pas le temps de les archiver. En l’occurrence, son souvenir de nous en face d’elle. Chaque copie qu’elle abattait mettait à jour cette mémoire à court terme avec ces clones, me permettant d’en invoquer plus, et ainsi de suite.
    — Woah… Comment tu as su que ton plan de renvoyer son onde paralysante sur elle allait marcher ?
    — Aucune idée. Si ça n’avait pas marché le totem l’aurait attaquée autrement, j’aurais bien trouvé quelque chose dans le feu de l’action…
    — Purée… J’ai du mal à réagir du tac au tac, j’ai échoué les épreuves du village plusieurs fois à cause de ça… »

    Il était en revanche plus doué en diplomatie, pensa Liesel. Il l’avait convaincu de le suivre malgré ses promesses. Peut-être qu’il était juste trop dramatique au final, mais bon, il y avait de quoi l’être, celui lui.

    Le bateau s’arrêta. Immobiles, perdus au milieu de l’océan, les deux garçons se regardèrent. L’incompréhension chez Liesel, un enthousiasme incroyable chez Avel.


    « On y est ! Aaaah… Taewe… »

    Le bruit des vagues et du vent se moquèrent de la confusion de l’albinos. Il regarda aux alentours, pas le moindre bout de terre en vue.

    « Euh… Tu es sûr ? »


    Avel fit oui de la tête et, tout fier, pointa du doigt ses pieds.

    « Sous l’eau, il scanda.
    — Quoi ?! »

    Liesel se rua sur la rampe pour toiser le fond de l’océan. Il ne vit que la surface instable de l’eau qui sembla lui rire au nez.

    « Oui, fais-moi confiance. Ne t’inquiète pas pour l’apnée, je connais un sort pour faire une bulle d’air.
    — Non non mais non ! Je… Je peux pas plonger !
    — Tu ne sais pas nager ?! fit Avel, outré.
    — Mais si ! Mais… Mon manteau, mes papiers, enfin je suis sans défense sous l’eau !
    — Je te protègerai.
    — Mais non mais… Tout est en papier ! Ma cape, mes habits… Tout !
    — T’es pas sérieux j’espère ?
    — Bah… si… »

    Liesel était gêné. Il n’allait quand même pas plonger nu ?! Quelle tête ils feraient, les habitants, en le voyant débarquer ? Et puis même, hors de question de se déshabiller devant Avel !

    Il avait appris à essuyer les flammes et les boules de feu, même les ondes, une faiblesse inattendue, et encore, il pouvait tout à fait bloquer un jet sous pression lancé par un mage mais… l’océan ! C’était pas la même échelle !


    « Tu comptais quand même pas nager tout habillé ?
    — Attends qu’est-ce que tu sous-entends ?!
    — Roh… »

    Avel déboutonna sa cape et son haut, sous les yeux de plus en plus écarquillés de Liesel. Il rougissait. Il ne fallait quand même pas tout enlever ? Avel inspira puis réfléchit un instant.

    « Pardon, tout ça, c’est assez évident, chez moi… Probablement pas à Iceberg…
    — Pas vraiment non !
    — Enlève ton haut et tes chaussures, sinon tu couleras net. Je m’occuperai de tout sécher en bas.
    — Juste un pantalon… je dois pouvoir faire ça… »

    Le soulagement s’entendit dans sa voix alors que son épais manteau se dissipait en un tas de feuilles. Ses chaussures aussi disparurent, alors qu’Avel pinça les lèvres. Il trouvait stupide cette idée de ne porter que du papier.

    Liesel reforma une tenue, imperméable, désagréable, mais surtout bien trop peu couverte à son goût, malgré le soleil qui tapait sur sa peau blanche. En maillot, il pressa Avel de plonger, embarrassé.

    Il n’était vraiment pas tranquille… Ces vagues, cette étendue immuable, aucune forme à laquelle accrocher son regard. Il dissipa le bateau à contre cœur et hocha la tête pour dire qu’il était prêt. Tout ce papier gaspillé…

    Avel fit apparaître une bulle d’air autour de leur tête, ils pourraient respirer sans encombre jusqu’à l’entrée de la grotte. D’après lui, il leur suffisait de trouver les coraux lumineux et ils arriveraient. Le plus vite était le mieux, pensa Liesel, qui plongea en premier pour en finir.


     Plongeon.


    Sous l’eau, il n’y avait rien. Liesel eut presque envie de remonter à la surface pour reprendre son souffle tant les ténèbres au fond de l’océan étaient sombres. Seul l’écho de sa respiration contre son casque le certifia qu’il ne craignait rien, car à mesure qu’il descendait, il sentait l’eau écraser sa poitrine.

    « Ça va ? » mima Avel. L’albinos fit oui de la tête, mais il n’était pas rassuré.

    Il devait cependant admettre qu’il comprenait maintenant pourquoi Avel avait insisté pour les vêtements. Perdu au cœur de la pénombre, la lumière chatoyante de la surface semblait presque irréelle, mais surtout, le liquide dans lequel ils baignaient était si lourd… Liesel ne fit pas de pause par fierté mais il était étonné de l’aisance avec laquelle nageait son ami, qui s’arrêtait par moment pour s’assurer qu’il suivait bien.

    Liesel hocha à nouveau la tête pour signifier que tout allait bien, pourtant il sentait dans sa poitrine un malaise grandissant. Taewe n’aurait pas pu être une île dans le ciel ? Dans les airs c’était tellement plus facile de se mouvoir… Sous l’eau chaque mouvement demandait des efforts incroyables, et la silhouette torse-nu de son camarade était la seule chose qu’il distinguait encore.

    Après ce qui avait semblait être plusieurs minutes, les deux garçons ne virent toujours aucun signe de ces fameux coraux luisants, ni même du sol, et Liesel commençait à avoir de plus en plus de mal à progresser.


    « J’ai besoin d’une pause… » il mima écartant les bras, essoufflé. Avel remonta les quelques mètres qui les séparait et tapota son épaule pour faire comprendre qu’il pouvait prendre son temps.

    Entendre l’écho de sa respiration dans ce scaphandre d’eau était paradoxalement hypnotisant, et même aux côtés de son ami, Liesel se sentit isolé. Il s’en voulait un peu, de le ralentir, mais il devait admettre que seul dans ce milieu, il aurait très vite fait une crise d’angoisse.

    Maintenant qu’il était immobile, l’albinos commença à s’imaginer la présence d’autres créatures. La forme qu’il venait de voir filer dans le coin de son œil était-elle un effet d’optique ou un poisson ? Et si c’était un poisson, était-il dangereux ? Il commença à regarder aux alentours, et entendre son souffle s’accélérer le fit paniquer. Il commença à gesticuler devant l’inquiétude d’Avel, il regardait en l’air pour trouver la lumière mais elle n’atteignait pas des profondeurs aussi reculées. Accroché à cette toile omniprésente, il se sentait pris au piège. Pas de ciel où s’envoler ni même de sol où s’écraser, juste une paralysie totale dans ce liquide gluant.

    Il pouvait lire sur les lèvres d’Avel qu’il disait son prénom, sûrement pour le rassurer, mais sa vision était trop floue derrière les larmes pour lire le reste. Il confondit ces pleurs avec l’eau salée qui l’entourait, il crut un instant que sa bulle avait disparu et qu’il finirait noyé dans les abysses, oublié, impuissant, seul, écrasé par cette cage d’eau qui l’étouffait… Spontanément, il s’accrocha au Poema.

    Devant l’état alarmant de son ami, Avel n’avait d’autre choix que de l’emmener en sûreté. Malgré un bras occupé par Liesel, il nagea en direction des ténèbres, aussi vite que possible. Il continua tout en jetant des coups d’œil fréquents à son camarade. Il tenait le coup, ses yeux crispés montraient qu’il était toujours conscient.

    De nouveau, il s’arrêta à la vue de distantes lumières discrètes. Liesel lâcha le bras et se contenta de tenir sa main, embarrassé. Il allait un peu mieux et même si son visage était toujours rougi par l’anxiété, son regard témoigna d’une envie d’avancer. Avel répondit par un sourire réconfortant et prit sa main contre lui, en guise de promesse : ils étaient presque arrivés.

    Effectivement, ils virent bien vite les petits coraux briller au cœur des ténèbres, une arche de lumière qui tendait les bras aux garçons. Liesel lâcha la main d’Avel et le suivit à l’intérieur du passage plutôt étroit. La lueur sur les murs les rendait cependant accueillants, si bien que le garçon était maintenant beaucoup plus calme.


    « Cache tes yeux ! » mima celui qui connaissait les lieux. L’autre s’exécuta, intrigué. Ils devaient être arrivés et voulait lui faire une surprise.

    Tiré par la main de son ami, Liesel s’imagina bien des choses… À quoi pouvait bien ressembler un village sous l’eau ? La grotte devait probablement donner sur une ouverture d’air assez large pour y construire des habitations. Il s’imagina une cavité décorée de coraux et des habitants peu habillés, un agréable parfum marin omniprésent et le bruit de l’océan, sourd, ininterrompu, qui émanait des parois des lieux. Il avait du mal à se figurer autre chose.


     Foyer.


    Pourtant quand on l’invita à ouvrir les yeux, il était encore dans l’eau, sous son scaphandre. D’abord floutée par les centaines de lumières colorées, Taewe se révéla lentement à lui.

    Une tiare d’émeraude accueillit son regard, gigantesque, chatoyante. Dessous s’étalaient des bâtiments, ceinturés par des récifs de quartz parés de tours scintillantes. On y voyait d’autres éclats illuminer des couloirs reliant des bulles de diamant.

    La scène semblait comme un instant de vie absolue figé dans un décor sous-marin : les bulles miroitaient tels des joyaux volatiles, les poissons rappelaient les colombes d’un paradis aqueux et les hommes, ces anges nautiques, se mouvaient insouciamment, bénis par cette lumière. Toute cette harmonie isolée respirait la paix et la tranquillité.


    « C’est…
    — Tu m’avais manqué, Taewe… sourit-il.
    — C’est magnifique... »

    Il tourna la tête vers son ami et vit son sourire radieux qu’il ne put s’empêcher de partager.

     Taewe.


    Toutes les angoisses de Liesel s’étaient dissipés devant cette vue sublime. Même le poids de l’océan qui compressait sa poitrine avait disparu, sûrement un sortilège taelien offrant aux hommes une aisance aquatique sans pareille.

    Il suivit Avel en direction de ce qui devait la porte. Après un tel spectacle, Liesel ne savait plus à quoi s’attendre et son regard était captivé par la grosse créature amicale que caressait une femme au loin.

    Ils arrivèrent bientôt devant un mur de verre ondulant, une porte enchantée retenant l’eau mais laissant passer les hommes, et Avel s’y précipita pour entrer correctement. Liesel en revanche passa le ménisque vertical maladroitement et s’écrasa sur le sol. Ravi de retrouver son milieu naturel, il fut tout de même agacé par le rire moqueur de son camarade.


    « Oui bah ça va !
    — Haha… ha… T’en fais pas, on y est tous passés… »

    Liesel put l’entendre glousser alors qu’ils marchaient à présent vers le sas d’accueil, une sorte de vestiaire où ceux qui sortaient pouvaient laisser leur affaires et ceux qui rentraient pouvaient prendre le temps de sécher. C’est ce que firent les deux garçons : Liesel s’essuya sur une grande serviette en libre-service et râlait en se rhabillant du peu de feuilles qui avaient survécu le trajet.

    « Tu m’avais pas dit que tu avais accès à Midgard partout ?
    — C’était une théorie, j’ai encore du mal à m’approprier tous ces pouvoirs… Midgard est une dimension instable, sans maître.
    — Je pensais qu’elle t’appartenait ? questionna le bleuet en déverrouillant la porte de sécurité.
    — Oui et non, si c’était le cas mon corps n’aurait jamais la force de supporter cette énergie. Disons que… Moui, je la contrôle, mais je ne la possède pas. J’aimerais être au calme et pouvoir me concentrer si j’ouvre une porte, même temporaire. Je n’ai pas envie que l’espace fusionne ou d’inonder ma tour y accédant d’ici. Va savoir quelle catastrophe pourrait arriver… »

    Peut-être que Mugetsu aurait pu le renseigner, ou même Sirius, s’il n’avait pas complètement perdu contact avec Aeternitas ces derniers mois. C’était sans importance, il finirait ses jours dans ce village. Enfin il avait plutôt l’air d’une ville à ses yeux, mais même sur une superficie aussi grande tout le monde devait se connaître s’ils étaient nés et piégés là.

    Ils traversèrent un couloir de verre et virent depuis l’intérieur toute l’eau dans laquelle ils nageaient quelques minutes plus tôt. Maintenant qu’ils avaient les pieds sur terre, la couronne semblait encore plus grande, elle devait sûrement contenir les habitations les plus riches.

    Au loin, Liesel crut apercevoir une seconde de ces armatures métalliques, éteinte et écrasée par des rochers, mais un sursaut d’Avel l’empêcha de s’attarder dessus. Devant lui se tenaient trois soldats, un harpon à la main. Le Poema se figea. Avait-il oublié qu’il avait bafoué toutes les règles en s’en allant d’ici ?


    « Écoutez, laissez-moi voir Maili !
    — Son Altesse Poema ! corrigea un garde.
    — Quoi ? Enfin c’est ma sœur je ne vais pas m’embêter avec les titres honorifiques, soupira le garçon.
    — Tu as non seulement été banni de Taewe mais tu ramènes en plus un étranger, s’indigna la femme qui arriva, je doute que son Altesse vous gracie pour ces crimes.
    — Générale Laena ! »

    Dans sa longue robe bleue, la femme aux cheveux gris fit signe aux soldats de ranger leurs armes et offrit au garçon un sourire chaleureux.

    « Inutile de faire du grabuge, leur dit-elle, Avel n’est pas un mauvais garçon. Mais tu as enfreint trop de règles, je ne peux pas te protéger.
    — Générale, je sais, j’assume mes actes. Mais je vous en prie écoutez-moi. Liesel peut nous aider ! Il est la clé !
    — La clé ? s’étonna l’intéressé.
    — Nous verrons cela en temps et en heure… En fonction de la décision de son Altesse.
    — Maili m’écoutera, j’en suis certain. »

    Ils furent ainsi escortés jusqu’à la salle du trône. Si tout le monde insistait pour qu’elle soit appelée « son Altesse », Maili avait sûrement dû être couronnée. Il n’y avait rien d’étonnant, elle avait toujours été meilleure que lui, bien qu’il fût plus grand.

    En chemin, Avel recontextualisa les choses pour son invité. Les parents des Poema étaient morts jeunes, ainsi la Générale Laena avait assuré les fonctions à la tête du village en attendant que l’un des deux soit prêts.

    C’était d’ailleurs elle qui avait éduqué les deux enfants. Comme Avel était parti, il ne restait plus que sa sœur pour monter sur le trône, ce qu’elle fit assez rapidement, commenta la générale. Elle avait reçu une liste de consignes de la part de son père avant son décès et la plupart des gens avaient regardé son court règne comme un prolongement du précédent monarque.

    Même si Avel avait peu de temps pour sa sœur à l’époque, il était proche d’elle et savait qu’elle prendrait en compte ce qu’il avait à dire. Il espérait juste que le reste de l’assemblée serait d’accord avec sa décision, mais avec de telles charges qui pesaient sur lui… rien n’était moins sûr.

    Le groupe entra dans la salle du trône, étonnamment humble comparée au reste de la cité. Un trône de bois décoré de coussins roses encadrait une fille à peine plus jeune que son frère et qui lui ressemblait comme deux gouttes d’eau. Elle fronça les sourcils en voyant Avel arriver.

    Les gardes se disposèrent autour d’elle alors qu’elle descendit les trois marches qui la séparaient de son frère. La générale se plaça derrière et s’éclaircit la voix. Maili jeta un regard assassin à Liesel puis fit plusieurs signes devant son frère que tout le monde sembla comprendre sauf Liesel. Laena s’empressa de traduire pour le garçon et les hommes qui observaient la scène.


    « Son Altesse dit : es-tu conscient que tu as commis deux crimes de haut rang contre ta nation et que tu mérites la peine de mort ?
    — Oui, signa Avel en baissant la tête.
    — L’assemblée m’en voudra sûrement, mais tu es gracié pour être revenu malgré ton interdiction. Je suis heureuse de te revoir. »

    Elle enlaça son frère, un geste que Liesel put comprendre, et la tension dans la pièce descendit.

    « Son Altesse dit : quel est cet étranger ?
    — C’est un ami. Ensemble, nous avons vaincu la source du moteni o ima.
    — La source du… Tu veux dire que les Sahaguins ne sont désormais plus un danger ?
    — Non, la guerre ancestrale va pouvoir cesser. De plus… Ce garçon a combattu Bellum par le passé… Et a gagné. »

    Liesel hocha la tête. Un brouhaha s’éleva dans la salle, les ministres ou autres figures importantes s’échangeaient des remarques d’incrédulité, régler le moteni o ima et la crise belluaire, c’était impossible ! La générale ramena le silence.

    « Puisque tu prétends lui faire confiance, nous allons lui soumettre à une épreuve. »

    Le prince se tourna vers son acolyte, qui haussa les épaules, perdu dans sa confusion. Maili pris une grande inspiration et signa quelque chose qui provoqua la surprise dans toute la salle.

     Condition.


    « Voyons, votre Alstesse, s’empressa la générale, vous n’êtes pas sérieuse ?!
    — L’épreuve d’Uelema…
    — Si tel est votre ordre… Son altesse dit : si l’étranger réussit, alors il gagnera le statut de citoyen. J’ai confiance en mon frère, mais cet étranger doit me prouver que je peux également lui faire confiance. Le premier défi aura lieu dans trois jours. D’ici là, cet invité sera sous la garde du prince Poema. »

    Alors que l’audience se finit, les hommes se ruèrent vers la dirigeante pour lui expliquer que sa décision était des plus inconsidérées, que Taewe avait réglé ses problèmes seules depuis des siècles, mais Maili resta de marbre.

    Avel aurait dû se réjouir de la nouvelle, pourtant il marchait tête baissée vers ses quartiers. La nostalgie de retrouver son peuple natal s’était bien vite dissipée pour laisser place à l’inquiétude.


    « Mmh… au risque de paraître vulgaire… qu’est-ce que c’était, tous ces signes ?
    — Oh, ça, Maili est née sourde, alors la cour royale a dû s’adapter. La langue des signes est sûrement la première chose de l’extérieur que Taewe a accepté.
    — Je vois. »

    Ils arrivèrent chez Avel. L’appartement comptait trois pièces. Les deux principales n’étaient séparées que part un paravent orné et des draperies pendantes qui rappelaient la chaleur de Desiero. Derrière les décorations se tenait un lit en bois massif, probablement d’une valeur inestimable au fond de l’océan. Posé sur une large estrade, le lit à baldaquin s’entourait de tissus où des perles enfilées formaient des motifs marins.

    Devant le paravent, le canapé en osier, d’un confort discutable mais d’une beauté admirable. En face trônait l’aquarium éclairé et sur la gauche la salle de bain et le bureau.


    « Oooh, vous m’avez manqué ! »

    Avel gagatait devant ses petits amis poissons et les faisait jouer dans des petites arches d’eau.

    « Je me suis occupée d’eux pendant ton absence, signa la reine qui venait d’entrer.
    — Merci beaucoup… Tu savais que je reviendrais…
    —Évidemment, je te connais, tu as toujours agi dans l’intérêt de Taewe. Beaucoup t’ont vu comme un lâche, mais pour briser la loi comme ça… »

    Elle sourit. Liesel, exclu de la conversation, s’assit sur le canapé. C’était étrange, ils communiquaient comme si Avel n’avait jamais quitté la ville, avec un naturel qui témoignait de leur affection. Maili se tourna vers l’invité.

    « Étranger. Je ne doute pas d’Avel, mais tu comprendras que je n’ai pas le choix vis-à-vis des autres.
    — Ah, il ne parle pas la langue des signes, intervint Avel en résumant pour Liesel.
    — Merci de m’accueillir ici. En quoi consiste l’épreuve d’Uelema ?
    — Tout d’abord un combat, expliqua la reine doublée par son frère, afin de déterminer si tu es digne d’entrer dans le temple d’Uelema. À l’intérieur, tu devras agir en équipe afin d’affronter plusieurs épreuves mortelles. Je serai ton adversaire pour le test. Je ne te ferai pas de cadeau, je tiens aussi à voir de quoi tu es capable.
    — Je comprends. »

    Liesel rendit l’expression chaleureuse qu’elle lui adressait.

    Un combat… Maili devait sûrement manipuler l’eau, comme son frère. Il était en position de faiblesse. Mais avec son agilité, il pouvait gagner… De plus, il avait trois jours pour s’approprier Midgard et son énergie. S’il arrivait à la canaliser, la création de souvenir atteindrait un palier supérieur.

    La reine s’en alla, rattrapée par ses obligations, laissant les deux garçons seuls dans la pièce. Avel déboutonna sa cape et posa son épée sur son bureau en bazar. Il observa les coquillages et autres reliques sous-marines soigneusement annotées et rangées, perdu dans ses pensées.


    « Tu les collectionnes ?
    — Collectionnais. Je n’avais plus vraiment le temps et puis j’ai dû partir. Quand j’étais petit, je rêvais de publier une encyclopédie et de le partager au monde extérieur.
    — Je ne juge pas… répondit l’invité, étonné.
    — Tu trouves ça bizarre ? Oui c’est vrai que ça ne doit pas être un rêve d’enfance commun… La famille Poema est bien la seule à recevoir une éducation sur le monde extérieur. On nous répétait que les trésors de Taewe étaient méconnus et que jamais les hommes ne devaient les trouver. Je voulais simplement les partager. »

    Liesel regarda longuement le garçon égaré dans la nostalgie. Devant les joues d’Avel qui s’étiraient aux souvenirs de son enfance, Liesel ne put que sourire et se promettre de l’aider à réaliser ce vœu.

    La nuit arriva bien vite et une bonne douche chaude offrit aux garçons le réconfort similaire à celui d’une résurrection divine. Malgré l’insistance de son hôte pour qu’il prenne le lit, Liesel avait choisi le canapé. Allongé dans la pénombre, il écoutait les bruits de l’aquarium qui ponctuaient la respiration de son camarade.

    Tout semblait tellement irréel après toutes ces batailles et cette éternité enfermé dans cette tour sans vie, sans odeur, sans lumière… Même de nuit, l’activité de Taewe lui donnait le tournis. Il était sous l’eau… et rien que d’y penser son cœur se serrait. Il finit par s’endormir, en espérant ne pas ronfler devant Avel.


     Méditation.


    Une bonne odeur sucrée caressait les narines de l’albinos. Séduit par cette invitation, il ouvrit les yeux et vit son hôte le regarder depuis l’autre bout de la pièce.

    « Bien dormi ?
    — Oui, enfin non, j’ai… ah… mal partout… Mais j’ai fait un super rêve. Impossible de me rappeler mais il était super.
    — Ma foi tant mieux. J’ai fait des crêpes. »

    Liesel, l’esprit embrumé, accepta l’offre et goûta. Un étrange goût rugueux distingua cette pâtisserie de ce qu’il avait jusqu’alors mangé. À moitié endormi, il bloqua un moment.

    « Elle a un drôle de goût… Attends, vous avez de la farine ici ?
    — Cendre de corail anthracite, œufs de poulpe gallin, sucre de-
    — Je ne veux pas savoir le reste, interrompit le garçon en retenant un reflux, oublie ma question. »

    Il continua son petit-déjeuner, incapable de déterminer s’il aimait ce qu’il mangeait, bien qu’il se resservît plusieurs fois. La tête penchée sur un cahier annoté, il réfléchissait déjà à son entraînement. Midgard…

    La méditation fut sa première approche, et après près d’une heure à tenter de se détendre, Liesel finit par reprocher à Avel les cris d’amusements qu’il ne cessait d’émettre devant son aquarium.

    Pourtant malgré la difficulté de l’exercice, il ne sentait aucun résultat et se disait qu’il ne s’agissait sûrement pas de la bonne méthode. Il décida plutôt de réfléchir à ce dont était fait Midgard.

    Avel tenta de l’aider, en commentant que les souvenirs étaient l’essence d’Yggdrasil et ce d’autant plus que Liesel était désormais le seul maître de tous ces pouvoirs. Un artefact, aussi insignifiant fût-il, pouvait sûrement l’aider à se reconnecter avec ses souvenirs. La seule chose qui lui restait de sa vie d’avant était la brûlure sur son torse, où avait été tatoué le symbole d’Aeternitas. Un des gardiens de la source du feu l’avait effacé au fer rouge.

    Il décida plutôt de repenser au confort d’Aeternitas et à sa vie sur Ouroboros. Il sentit quelque chose en lui changer, comme s’il revivait les émotions de l’époque mais estompés, comme un vieux film projeté sur un mur rayé. Puis dans les couloirs de la guilde, Nina apparut.

    Là ! L’émotion apparut, un petit orbe chatoyant entouré de volutes de lumière. Liesel perdit sa concentration et la lumière disparut dans un petit éclair.


    « Tu as réussi ?
    — C’était très bizarre… Mais je crois que je tiens le bon bout. »

    Il s’entraîna ainsi un moment, dans le calme total. Entouré de petites lumières, il laissait émaner de son corps des mirages transparents, comme si le Liesel assit sur le canapé n’était qu’une illusion. Il était pourtant bien là, ou du moins en partie, car au bout de quelques heures, entrer dans cet état spectral était devenu beaucoup plus facile.

    Quelques tests confirmèrent que sa création de souvenirs s’était améliorée, car il arrivait désormais à multiplier les crêpes grâce à sa mémoire. Leur goût marquant fut un repère solide pour les ramener à la réalité, mais ce souvenir trop vif fut leur seul caractéristique et même Avel recracha ces copies infâmes pour les jeter.

    Le test approchait à grands pas et Liesel se sentait prêt. Même s’il aurait aimé faire plus d’expériences, il se faisait désormais confiance et gardait cette botte secrète en cas de problème.

    Le combat se déroulerait dans l’arène, apparemment l’une des bulles les plus solides de la ville. Encerclé par une seconde barrière, aucun des sorts jetés dans l’arène ne pouvait toucher les spectateurs, Liesel et Maili pourrait ainsi s’en donner à cœur joie.

    Ainsi, sûrs d’eux, la reine et l’intrus se dirigèrent vers la première épreuve.


     Épreuve.


    Enfermés dans cette sphère de cristal, les deux adversaires s’avancèrent l’un face à l’autre, tous les deux assurés de leur victoire. La voix de la générale présenta à la foule rassemblée à l’extérieur de l’arène les enjeux de ce combat. La possibilité pour un étranger de demeurer en ce lieu interdit.

    « À présent, qu’Uelema vous protège. Le combat va commencer ! »

    Un grand gong fit trembler le sable et Maili dégaina son épée. Liesel déploya quelques feuilles dans son dos. Les deux, immobiles, firent part de leur confiance par le regard.

    Derrière la barrière transparente, Avel et la générale Laena observaient attentivement, chacun supportant leur favori.


    Liesel commença, confiant, par invoquer des lances qui filèrent sur Maili immobile. Un mur d’eau se leva à son commandement et lorsque les armes le traversèrent, il les broya en devenant une barrière aqueuse l’entourant complètement.

    Liesel tendit le bras et un disque tranchant s’élança vers le mur et le scinda en deux. Maili fut réactive et sans sourciller changea l’état de l’eau pour emprisonner la scie dans la glace. L’arme coincée se reforma en un grand bras qui tenta de balayer la fille, mais un coup d’épée trancha le papier et la glace. Tout disparu dans la brume.


    « La vapeur aussi ? » s’étonna Liesel, qui surveillait le petit nuage devant lui. Il ne voyait plus son adversaire.

    Soudain il se dissipa et elle avait disparu ! Derrière lui ! L’adversaire trancha un corps de papier qui se reforma plus loin. Liesel fit un pas en arrière pour amortir sa transformation en essaim et se figea.


    « Argh ! »

    Autour de sa cheville, un grand coquillage denté s’était refermé. Il était piégé sur place et, confiante, Maili signa un grand requin d’eau au-dessus d’elle. L’animal plongea sur Liesel.

    « Zwill ! »

    La combattante sursauta, quelque chose derrière elle la força à esquiver. Un homme de papier enchaîna un combo agile tandis que Liesel bloqua le requin en défaisant son piège. Attaquée par l’arrière, Maili vit aussitôt des pics de papier s’élever devant elle et une salve de lances s’abattre par les flancs.

    Elle planta son épée dans le sol et signa à une vitesse incroyable un tourbillon d’eau qui broya toutes ces attaques à la foi.

    Bien qu’à nouveau calme, l’arène transpirait une tension grandissante.


    « Maili a révélé trop de ses cartes à Liesel… commenta Avel à sa supérieure.
    — Ton camarade aussi. De plus, depuis la crise belluaire, nous avons totalement revu notre entraînement. Ta sœur est loin d’avoir dévoilé tout son jeu. »

    Derrière son épée, la reine sourit à son adversaire. Cette altercation serait un parfait test d’aptitude pour elle aussi, mais elle ne comptait pas échouer devant son peuple. Par des gestes précis, elle invoqua une grande sphère d’eau au sommet de l’arène.

    « Je ne te laisserai pas faire ! »

    Liesel courut vers son adversaire qui leva une grande vague devant lui. Écrasé par l’eau, un bateau de papier émergea sur l’écume. Une fois assez près, il se changea en hache d’arme qui s’abattit vigoureusement sur la lame maintenant brandie de Maili. En l’air, tout le poids de Liesel reposait sur cette parade.

    Malgré ses mains prises, Maili invoqua deux bras aqueux supplémentaires, qui signèrent un sort pour elle.


    « Elle peut faire ça ?! » s’écria Avel, juste commentaire de la surprise de Liesel.

    Le sable se recouvrit d’oursins métalliques, interdisant à l’étranger de poser un pied sur le sol. Pas un problème, il pensa, en sautant sur des marches célestes pour s’élever en direction de l’orbe en suspension.

    Des algues se ruèrent pour l’arrêter mais il les coupa et d’un coup net, il trancha la sphère en plusieurs morceaux.


    « Quel idiot ! »

    Avel frappa des poings sur la balustrade en voyant les fragments de l’orbe tomber en pluie tranchante sur toute l’arène. L’albinos sauta de plateforme en plateforme, se protégeant comme il pouvait de son erreur, au prix de quelques blessures.

    « Geyser concentré… »

    À la traduction de la générale, une colonne d’eau propulsa le garçon contre le plafond transparent, l’emprisonnant contre la paroi en se changeant aussitôt en glace. Devant son ennemi acculé, Maili sourit et le nargua.

    « Son Altesse dit, intervint Laena, est-ce dont là tout ce que cet étranger a à offrir ?
    — Allez Liesel ! »

    Non, ce n’était pas tout ce qu’il avait en réserve, et c’était le moment de leur prouver.

    « Flügel ! »

    Des lames blanches vinrent le libérer de sa prison gelée et il tomba avec confiance. Ses ailes apparurent pour le rattraper et il se vengea de la pluie mortelle qu’il avait traversée en jetant des dizaines de rasoirs sur son adversaire. Le public poussa un cri de surprise en voyant l’homme oiseau prendre son envol. Avel gesticulait sur place.

    Le sol, couvert d’oursins et de flaques, était maintenant ponctué de lames organiques. Sur ce champ ravagé, l’épéiste avait su éviter la majorité des lames tombées du ciel, mais quelques blessures restèrent inévitables.


    « Gaë Bolga !! »

    Armé d’une lance unique, l’Engelwald plongea vers son adversaire en piqué pour mettre fin au combat. Mais le sourire en coin de la reine se cacha derrière une chorégraphie de riposte.

    « Miroir de nacre ?! » s’écria Avel.

    D’un coup de pied, une flaque devint solide et s’envola comme une pièce jetée en l’air puis se figea. Face à son reflet, Liesel vit un double parfait de lui-même, arme à la main, fondre sur lui. Ainsi les deux armes s’entrechoquèrent dans une explosion de feuilles. L’original fut projeté en arrière.

    Il évita la couverture d’oursins en atterrissant sur un faux sol au-dessus. Il prit une seconde pour respirer… Elle avait en effet plus d’un tour dans son sac…


    « Pourquoi elle reste sur la défensive ? questionna le frère.
    — Parce qu’il est agile, mais il s’épuisera avant elle. Regarde comme il est essoufflé…
    — Il ne peut pas perdre !
    — Il n’est pas mauvais, il faut l’admettre. »

    En recyclant toutes les feuilles abandonnées par son reflet, Liesel invoqua un grand golem qui balaya l’épéiste, dont la parade ne fut pas assez rapide.

    Elle glissa, naviguant parfaitement entre les étoiles de métal disposées au sol. Le deuxième poing du golem arriva mais fut pris au piège dans un tourbillon aquatique qui le gela. L’arène dévastée comptait maintenant un iceberg.


    « Oh ?
    — J’aurais utilisé mon épée pour couper le golem… réfléchit le frère.
    — Elle accumule les atouts… Regarde cette arène : il ne peut plus poser un pied par terre, le sol est couvert de flaques, et maintenant ce rocher de glace. Ton étranger ferait mieux de se calmer.
    — Elle est bien meilleure que moi…
    — Avec la menace de Bellum, nous nous sommes préparés au pire. »

    Avel soupira… La victoire de son camarade n’était désormais plus si certaine. Il espérait toutefois qu’il ferait ses preuves même en cas d’échec.

    « Qua… huh… Quadrawurzeln ! Zwill ! » souffla le garçon. Quatre petits satellites semi autonomes et un homme de papier attaquèrent son altesse pour lui laisser quelques secondes de répit.

    Maili sauta sur l’iceberg et trancha d’un coup net deux des cubes volants. Les deux derniers furent pris au piège dans l’eau. Enfin, une grande conque s’écrasa sur le document jumeau, prenant la majorité de l’arène. Son ouverture faisait face à l’albinos.

    À nouveau la reine planta son épée dans la glace et lança un sort.


    « Qu’est-ce que… Les dents de l’océan ? »

    Le sable fourmilla et de petits coquillages en spirale apparurent autour du géant gelé, poussant du sol comme des griffes démoniaques, raclant le bloc de glace dans un bruit immonde. Ce son de torture résonna dans la conque et parvint à Liesel amplifié, vrilla ses tympans dans la douleur. La plateforme sur laquelle il tenait se dissipa et il tomba en hurlant dans les pics de métal au sol.

    « Liesel !! Non ! »

    Prisonnier de ce hurlement strident ininterrompu, Liesel se tordit de douleur. Pire que les épines qui s’enfonçaient dans sa peau, tout son cerveau semblait sur le point d’exploser. Les vibrations lacéraient son crâne dans une douleur inhumaine. Il gémissait.

    Cela faisait si longtemps qu’il n’avait pas souffert et s’il devait admettre que ça ne lui avait pas manqué, c’était un aspect de la vie extérieure qu’il avait oublié dans sa tour. Il ne put s’empêcher, malgré la contraction insupportable de tous ses muscles, de sentir un peu de gratitude.


    « Générale ! Il faut arrêter le combat !
    — Je n’ai pas… fait tout ça… pour perdre ici… J’ai affronté… pire… »

    Faisait fi de son supplice auquel son adversaire était immunisé, il ouvrit un cercle magique qui dispersa des centaines de feuilles autour de l’arène. Les lames plantées dans le sol s’élargirent et pire la forme d’algues rectangulaires. Les deux combattants étaient maintenant cachés de la vue du public, cachés dans une sphère à la forme bien particulière.

    Liesel se releva. Il sentait les vibrations de la conque sous ses pieds, mais sa chambre anéchoïque le protégeait des dommages. Maili, intriguée, s’arrêta. Toute la chambre sourde devint une armée de flèches qui s’abattirent sur elle.


    « Comment… il a fait ça ?
    — Votre Altesse ! »

    La reine se releva, s’aidant de son épée. Tous les deux essoufflés, les rivaux se sourirent, comme pour se rappeler que ce combat n’avait rien d’hostile. Mais Maili brisa ce sourire en premier. Elle se redressa et la terre se mit à gronder.

     Final.


    Il était temps pour la reine de Taewe de mettre fin à cet affrontement, et elle n’hésiterait pas à broyer son adversaire pour tester ce dont ils étaient tous les deux capables. Une grande vague se leva derrière elle et son sourire en coin informa Liesel de la nature de ce tsunami.

    Impossible d’esquiver le fléau qui s’abattait sur lui… Puisqu’elle sortait sa botte secrète, il était temps pour la sienne.


    « Erinnerung Machen : Neoho ! »

    L’océan s’abattit sur l’arène et la submergea totalement. Liesel tourbillonna, fut bousculé dans tous les sens. Mais protégé par la bulle d’air copiée d’Avel, il était sauf. Il finit par reprendre ses esprits sous les yeux ébahis de la générale.

    « Tu lui as appris la magie taelienne ?!
    — Non !! »

    Nageant à toute vitesse, Maili ne se laissa pas impressionner et fila à travers l’eau en emportant un peu de chair du garçon à chaque passage. Crispé par le sel qui pénétrait ses plaies, Liesel décida qu’il ne capitulerait pas sans dire le dernier mot.

    Qu’il avait grandi depuis Aeternitas. Ces couloirs vides et la compagnie de Sirius. Mais surtout, celle à qui il s’était souvent comparé, son mentor au sein de ce nouveau départ : Nina. Jamais elle n’aurait perdu un tel combat, il la croyait trop fière ! Son inestimable alliée dans sa quête d’éradiquer la corruption d’Asgard… Il allait maintenant rêver d’elle et donner vie à sa mémoire !


    « Nina… j’ai besoin de toi maintenant alors je t’en prie accorde moi cette faveur… Erinnerung Machen : Rafeind !!! »

    Il leva les mains et s’entoura de lucioles dorées et chacune se changea en étincelles. Une boule d’électricité apparut au-dessus de lui et claqua sur toute l’arène. L’onde de choc dégagée par le souvenir figea les deux combattants dans une douleur atroce que l’eau rendait trop réelle. Un dernier sort suicidaire qui signerait la fin du combat, un témoignage des sacrifices que Liesel était prêt à faire pour la victoire.

    L’inondation s’évapora et les deux mages s’écrasèrent contre le sable, épuisés et grièvement blessés. Avel et la générale Laena se ruèrent dans l’arène pour porter secours aux deux combattants inconscients. Il ne restait qu’à l’assemblée de juger du résultat. Liesel était-il apte à pénétrer le temple d’Uelema ?


    « La règle d’Uelema est formelle, et bien que ce soit à contre cœur… l’assemblée a jugé cet étranger apte ! »


    Fiche de RP (c) Miss Yellow

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