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    [Entraînement 12] La Cloche d'Exitia par Nina Andersen Mar 20 Juin 2017, 19:14
    Nina Andersen
    Nina Andersen
    Briseuse de Mythes








    Entraînement 12 ♦ La Cloche d'Exitia (I)
      Apaisée... ?


    Cette fois encore, Nina avait voulu s’isoler un peu avant de retourner à ses activités. Après ses quelques courses dans les boutiques de la guilde, de manière à renflouer ses stocks d’objets et d’armes, elle traîna les pieds jusqu’au lac de l’Est pour les y tremper. L’eau fraîche tonifiait ses membres engourdis par les courbatures et les blessures. Même l’action des onguents de Shirona avait ses limites et la guérison ne serait pas instantanée, elle le savait. Pourtant... Quelque chose qui ne concernait pas son état de santé la taraudait bien plus.

    Malgré le réconfort apporté par le Maître, elle s’en voulait beaucoup pour ce qui était arrivé à sa dimension de stockage enfin... son contenu. Elle avait rendu à Mugetsu la ligne dimensionnelle la constituant et irait la récupérer plus tard, entièrement sécurisée. Jamais, en revanche, n’en retrouverait-on le contenu. Que ce soit le dictionnaire de runique du Maître, son exemplaire dédicacé d’un roman de Theserin Mérédir ou ses précieuses dagues... Nina se demandait encore comment elle ferait face à Dirk lorsqu’elle devrait lui apprendre l’anéantissement de sa dague en or noir.

    Cela étant, il fallait le trouver avant de repartir sur la terre ferme. Un contretemps majeur, néanmoins : son absence. Voilà deux jours, le Nain s’en était allé rejoindre son père, Gloren, à Kazad Thingaz, sans être revenu pour l’heure. Nina ne songea même pas à demander à Sirius de l’emmener au dernier village Nain de Fiore : il lui fallait guérir de ses blessures avant toute chose. Sans quoi... Shirona, et peut-être le Maître en sus, l’assailliraient tout bonnement. Qui sait, peut-être en seraient-ils à envisager la camisole de force...

    Zélos était encore en compagnie de l’Archange, d’ailleurs.

    « Sirius ? demanda la jeune femme en battant lentement des pieds dans l’eau claire. Vas-tu lui effacer la mémoire ?
    — Non, je ne pense pas que ce soit nécessaire – même si j’aurais bien envie, pour le plaisir ! Il n’est pas au courant pour le Chrysokrone, c’est l’essentiel.
    — Je ne sais plus quoi penser.
    — De quoi ? De lui ? Oh non, pas encore un autre gigol-...
    — De tout. »

    Loin de sombrer dans un état de dépression avancée, Nina était effectivement perdue et fatiguée de l’être. Au vent s’ajouta un long soupir et le clapotis des pieds dans l’eau cessa. Elle caressa du bout de ses doigts mouillés la pierre de son collier. Lui, au moins, était toujours là...

    « Penses-tu que je me trompe en suivant Zélos dans le Hvergelmir ?
    — Je ne suis pas en mesure de te répondre, malheureusement. Cela ne tient qu’à toi. Par contre, une chose est sûre au vu de ton apparence : tu as besoin d’un peu plus d’entraînement de terrain. »

    Il était vrai que son cou bandé jusqu’à la mandibule, ses divers pansements partout sur son corps et ses immenses cernes tombés au combat en même temps qu’elle ne la faisaient pas paraître de la première fraîcheur !

    Mais Sirius avait raison. Se battre en permanence contre des adversaire de même niveau n’aidait aucun mage à s’améliorer. Au mieux entretenait-il les stratégies qu’il possédait déjà. Le Hvergelmir ne laissait indéniablement pas une telle marge de fainéantise physique. La chair brûlée du cou de Nina la tiraillait tandis elle avalait sa salive, songeant au monde dans lequel elle évoluait. Sans pitié.

    Au-dehors, sur la terre ferme, celle dont la température n’était pas régulée en permanence, celle où la mort n’était pas outrepassée par un quelconque tour de magie, où tant de choses dépassaient la conscience d’un seul être humain... La capacité à maîtriser la magie était bien trop précieuse pour se contenter du minimum, du suffisant. Lorsque Nina y repensa, Zélos avait eu raison, le soir dernier, à la taverne de Toliman. Son égo était surdimensionné.

    Le froissement de l’herbe derrière elle la surprit. Rien de grave, ce n’était qu’Igni.

    « Coucou toi, sourit-elle. Comment m’as-tu retrouvée ?
    — Négligerais-tu ton dégagement æthernanique, Nina ? C’est décevant.
    — Tiens donc, Hendrik, toujours là pour faire un compliment. »

    L’intéressé lui tendit la main pour l’aider à se relever, profitant du fait qu’elle la saisît pour l’attirer à lui et l’embrasser. Voyant qu’elle ne semblait pas particulièrement emballée, il la détailla et fronça les sourcils.

    « Qu’est-ce qui t’a mis dans cet état ?
    — Et si c’était de ta faute pour avoir été un mauvais mentor ? taquina la brune, ce qui provoqua le voyage d’un ricanement sonore au gré du vent.
    — En tout cas, je suis un excellent scientifique. Je suis venu, initialement, pour te montrer l’avancée de mon travail et, crois-moi, c’est tout sauf décevant ! »

    Le demi-Démon garda la main de la mage, même lorsqu’elle se baissa pour ramasser le pot d’Igni, et l’entraîna vers sa cabane. Ce dernier semblait apprécier Hendrik plus que Zélos, ce qui étonna, quoiqu’amusa, Nina. Peut-être qu’en tant que non-humains ils se comprenaient plus aisément ? Pour preuve, durant la plupart du trajet, ils discutèrent comme si Igni n’était pas le seul à assimiler le sens des paroles de l’autre.

    Quand Nina pénétra dans la cabane, rien ne lui sembla familier. Des feuilles par terre, sur les bureaux, les murs, les chaises et même dans les toilettes à la porte entrouverte ! L’endroit le plus en ordre était le coin chambre de la bâtisse, là où une petite table semblait épargnée par le cataclysme.

    « Tu ne peux pas avoir oublié mes échardes magiques, je me trompe ?
    — Comment pourrais-je. Tu m’en parles tous les soirs quand on se voit.
    — Et pas pour rien. Je me suis souvenu de ce que je faisais exactement à Kura, il y a cent-cinquante ans. Enfin, dans les détails... Grâce à ton "meilleur ami", pesta-t-il sur ces mots, tu es familière avec la psionique ; eh bien, je l’étudiais. Mon intérêt m’a plongé dans un aspect primordial de ce que je développais : cette matière dans laquelle j’étais cryogénisé.
    — Il est vrai que cette magie devait être terriblement puissante pour te conserver intact aussi longtemps.
    — Plutôt, oui. C’est alors que je t’ai rencontrée, ma précieuse Nina, et que j’ai pu avoir accès à la merveilleuse bibliothèque de ta guilde ! Ce sort provient d’une magie perdue liée au temps, mais pas l’arche du temps à proprement parler. Un unique livre en parle et décrit son action sur les æthernanos par son incapacité à être utilisée seule ; en l’occurrence, la magie secondaire du chef de Kura était la glace. »

    Igni piaillait de temps à autre car Nina avait abandonné son pot à terre avant de s’asseoir sur le lit d’Hendrik. Elle le récupéra et caressa doucement sa... peau ? tout en regardant son mentor manipuler un petit cube de cristal, mauve et vaguement opaque.

    « Bref, je t’épargne le reste de mes recherches, d’autant qu’il en manque beaucoup, mais laisse-moi te dire qu’une fois abouties, elles me permettront enfin de créer la magie sur laquelle je travaille depuis... longtemps. Du coup.
    — Tu cherchais à créer une magie ? s’étonna Nina.
    — Il faut apprendre à vivre avec son temps, ma belle.
    — Je refuse que ce soit toi qui me dises ça. Tocard.
    — HAHAHA NINA, ENFIN ! ENFIN !! Tu le dis enfin toi-même, ouuuh... C'est donc ça, un orgasme.
    — Sirius, voyons ! » manqua de s’étouffer l’intéressée tant la surprise fut grande.

    Le fou-rire de l’intelligence artificielle cessa au bout de longues secondes durant lesquelles Hendrik, les yeux exorbités, les ongles rentrés dans le matelas, se demandait quel était le nombre de décimales à ajouter à pi pour que sa longueur dépasse la haine qu’il vouait à Sirius. Ce dernier reprit néanmoins son calme et annonça d’une voix plus audible que Mugetsu attendait Nina pour lui remettre sa dimension de stockage. La jeune femme rabroua donc les questions du demi-Démon à ce sujet et retourna voir son Maître dans son bureau.

    Cette fois, elle promit de devenir plus forte pour ne plus avoir à enfermer le moindre sort à l’intérieur.
    Zélos était avec Mugetsu, d’ailleurs. Sa première rencontre avec Hendrik s’avéra... conflictuelle. En effet, ils manquèrent de se battre aussitôt sortis du bureau ! Nina les sépara d’une dague entre les deux yeux et son aura morbide leur fit rentrer la queue entre les jambes. Leurs ardeurs diminuées, elle rentra à sa chambre, laissant le loisir de leur surveillance à l’impitoyable Sirius. Déjà qu’elle avait besoin de se reposer...

    Deux jours passèrent sans la moindre nouvelle de Dirk. Les soins de Shirona avaient permis aux brûlures de s’estomper et un brin de maquillage se chargea d’effacer le reste des traces. Mais... cette absence devenait inquiétante, se rapprochant de la semaine entière sans la moindre nouvelle, même si Sirius répétait qu’il était en vie.

    « Alors si j’ai bien suivi, s’enquit Zélos en portant un verre de limonade à sa bouche, ce Nain forgeron est ton père adoptif, right ?
    — Absolument. Sirius, s’il te plaît, regarde au moins où il se trou-...
    — Bon sang Nina... Je suis désolé. J’ai été négligent.
    — C’est sa manie de couper la parole aux gens ? » maugréa Hendrik en tripotant Igni.

    Mais le ton employé par l’être immatériel était bien trop inquiétant pour que quiconque s’en soucie. Surtout Nina. Une gravité rare en des circonstances ne le laissant présager. Et il n’était ici pas question de sarcasme face aux exigences de la jeune femme.

    « La... bague de Dirk est en vie. Mais plus à son doigt. »

    Le claquement d’une tasse sur la table, suivi du grincement de la chaise contre le parquet. Nina courrait vers la salle du portail.

    * * *

      Bloodshed


    Kazad Thingaz était à sang de la même manière qu’elle eût été à feu par le passé. Même Nina qui, contrairement aux trois individus qui l’accompagnaient, connaissait les lieux se trouva désorientée par tous les corps jonchant le sol. Sirius les avait menés jusqu’à l’entrée du village mais rien n’était comme elle l’avait laissé. Elle eut un souffle de panique, Dirk, elle devait le trouver !

    L’air était froid. Rien d’autre que la chute d’eau en fond sonore et le fer dans les narines. Zélos, Hendrik et Igni suivaient, sans rien dire, pensifs et dégoûtés par les cadavres parfois mutilés. Le demi-Démon regarda Zélos et d’un regard ils se comprirent. De la magie avait été utilisée par ici. Restait à déterminer si cette tuerie avait été commise par des mages noirs mais, bien que ce fût le scénario le plus probable, ils se demandaient ce qui aurait pu motiver ces actes.

    Le village était plutôt petit ; retrouver la maison d’Orrok, le chef du village, avait été facile. Son corps n’y était pas. Aucun mot n’avait été laissé, non plus, et Nina se contenta de rebrousser chemin, n’ayant rien d’autre en tête que retrouver Dirk. Le reste du groupe avait cessé de la suivre mais peu lui importait ; elle n’aurait pas perdu de temps à les attendre.

    Les maisons se succédaient sans trace du forgeron. En revanche, Gloren, à la barbe maculée, ne respirait plus au pied d’un arbre coupé. La jeune femme s’accroupit et posa ses mains sur le corps glacé, replaça ses bras en croix sur sa poitrine robuste et ferma ses paupières, les siennes déjà humides. Elle ne pipa mot l’espace d’une minute, sentant son cœur se serrer. Gloren d’abord, mais que se passerait-il si elle trouvait le corps de Dirk dans le même état ? Elle faisait tout pour ne pas imaginer une telle scène mais son cerveau lui imposait la vue fantasmée d’un corps abattu.

    Elle ravala un sanglot et releva le buste du Nain pour le remettre droit et termina par une fleur épargnée entre les doigts gantelés.

    Debout à nouveau, elle se pencha pour ramasser d’autres fleurs en parfait état, dans l’idée de commémorer l’ensemble du peuple tombé, mais... Une présence s’immisça derrière elle. Un frisson, elle lâcha tout. Il y avait quelqu’un.

    Lorsque la pointe d’une lame glacée frôla sa nuque, elle usa de sa magie pour repousser l’arme de métal. La présence était encore derrière et quand Nina se tourna...

    « Toi... » murmura l’inconnue...

    ... Ou pas tant que ça. Malgré sa tenue sombre, moulante et parée de ceintures, son cache-œil et sa cape en lambeaux, la silhouette féminine n’était pas étrangère. Sa voix trahit son identité plus que n’importe quel autre détail, comme ses cheveux blancs et sa petite taille, par exemple.

    « Queen ? »

    Elle

    Outre le fait qu’elle eût préféré croiser n’importe quel mage noir en ces lieux, Nina s’étonna de la présence de cette fille ici, à Kazad Thingaz. Sans sa voix nasillarde, plus encore que pouvait l’être celle de Zélos lorsqu’il faisait l’idiot – autrement dit souvent –, elle aurait été méconnaissable. Ses cheveux raccourcis, son apparence plus mature et surtout sa tenue y étaient pour beaucoup.

    Elle pointait toujours Nina de sa dague tout en maintenant une certaine distance néanmoins.

    « Qu’est-ce que tu fais ici ? Tu as un rapport avec ce qu’il s’est passé ?
    — Je me permets de te retourner la question. »

    Les deux femmes continuaient à se regarder en chiens de faïence alors qu’accouraient, interpelés par les voix un peu trop fortes, Zélos, Hendrik et Igni.

    « Nina, on vient de trouver ça par terre ! Mais à qui tu... Oh, bien le bonjour, sublime demoiselle, roucoula le premier.
    — Je... retire ce que je viens de demander, Princesse. Il n’y a aucun moyen pour qu’une bande pareille soit à l’origine d’un tel carnage.
    — Les garçons, je vous présente la meilleure amie que j’aie jamais eue : Queen. Ne retenez pas son visage ou son nom, cela encombrerait vos cervelles pour, au final, pas grand-chose. »

    L’atmosphère changea. La lourdeur qui régnait fit place à une tension si palpable que des éclairs crépitaient sur le corps de Nina. Hendrik jugea bon de passer son bras autour des épaules de cette dernière, sous l’œil surpris de Zélos, pour la reculer. La discussion s’envenimant, ils décidèrent de s’écarter des morts, par respect. Lorsque Queen apprit que le père adoptif de Nina avait disparu ici, elle prit sur elle et décida de lui expliquer tout ce qu’elle savait et d’où elle venait. Non sans une certaine aigreur.

    « Après le naufrage, King, Ace et moi n’avons plus eu la moindre nouvelle de Joker et Spade. Alors nous les avons cherchés, jours et nuits, en Minstrel. Jusqu’à les trouver.
    — C’est une bonne chose, tout de m-...
    — Morts. »

    Le regard de Nina se durcit, son cœur manqua un battement.

    « Joker... Son œil avait été privé de ses pouvoirs. Je ne sais comment, ni par qui. Bien qu’il fût mort, j’ai échangé cet œil avec le mien, expliqua-t-elle en pointant son cache-œil, espérant encore qu’il puisse se raviver, mais ce fut un échec et depuis, il est aveugle. Après tout ça, nous avons entrepris de rentrer en Fiore pour reprendre notre traque des mages noirs, en mémoire de Joker et Spade. Je suis devenue le Maître de Kabaret, mais... King est mort en mission. Les jumelles sont parties, elles n’aimaient que Joker. Finalement... (Elle serra le poing avec colère.) Il ne reste que moi avec le tatouage de ma guilde. »

    La décimation de la guilde Kabaret sembla finalement peu affecter Nina. Elle avait vite rogné Joker de sa vie, pour le peu qu’il y fût entré. Peu lui importait, même si elle pouvait comprendre le désespoir de Queen.

    La raison qui avait mené l’acrobate ici était simple ; l’idée même de tout abandonner la rendait malade. Pour la mémoire ceux qui l’avaient quittée, elle avait choisi de continuer la traque en tant que mercenaire ; décision l’ayant portée jusqu’aux hauteurs de Kazad Thingaz.

    En l’occurrence, ses services avaient été loués par le comté dans lequel se trouvait Shiero. Aux prises avec Stella depuis peu de temps, le Comte cherchait à reprendre l’avantage sur la nation de Yakmund. Cela commençait par une enquête dans la ville la plus assiégée du domaine et Queen avait accepté le contrat, ne se doutant pas que Nina serait impliquée, directement ou pas. Par ailleurs, elle n’imaginait même pas la revoir un jour – et cela lui aurait bien plu !

    Mais l’évocation de Shiero ne laissait jamais Nina indifférente. Quelque chose se tramait dans sa ville, et quoi de plus normal puisqu’elle était dirigée par des Stellans ! L’inertie du royaume de Fiore lui donnait envie de vomir, bien que tout un tas de raisons contraires à ce principe lui vinrent en tête. La sécurité, notamment... Une chose était sûre, si Stella préparait quelque chose chez elle et que cela impliquait le massacre du village des Nains, elle ne le tolérerait pas.

    « Queen, cela me tue d’avoir à te dire ça mais prends-moi à Shiero avec toi. Tu me diras en chemin ce qui se passe, en ne négligeant aucun détail, et j’insiste là-dessus.
    — En quel honneur je te prie ?
    — En l’honneur de ta vie, à moins que tu ne préfères que j’y mette un terme sur-le-champ ? menaça la noble au plus fort de sa détermination.
    — Peuh ! »

    Difficile de dire si la peur avait poussé Queen à tout révéler de sa mission à cette femme qu’elle détestait ainsi qu’à deux inconnus – doués de parole.

    Le petit groupe n’eut pas à prendre le train. La mercenaire avait volé une voiture magique en ville avant d’en partir et une fois Hendrik aux commandes, pestant par pure fainéantise et regret d’avoir été impliqué, la vitesse atteinte leur permit de rejoindre Shiero plus vite, assurément. En assez de temps, au moins, pour peaufiner les explications.

    « Si cela peut te rassurer, Princesse, il y a de fortes chances pour que ton papounet soit en vie bien au chaud dans un cachot stellan. Il est forgeron, c’est ça ? Ce sont eux, leurs cibles. Le problème c’est que, depuis le début, j’ai un temps de retard sur les missionnaires. Ils sont doués pour se déplacer vite et sans laisser de trace, alors l’enquête a traîné... Si seulement j’étais arrivée plus tôt... ! »

      Shiero


    Près d’une demi-journée à la vitesse permise par la magie d’un puissant semi-Démon suffit pour atteindre les abords de Shiero. Déjà l’on apercevait les plus bas quartiers. Il ne fallait pas oublier que la ville se vantant d’être la plus haute de toute la chaîne des Iris n’était pas plus égalitaire que les autres. Que les quartiers populaires devaient, par une sorte d’agrément tacite à la plupart des cités, se distinguer des plus riches. Rien, cependant, ne pouvait entacher la blancheur de tous les murs de la ville. Hormis le fait qu’ils fussent maculés de Stellans.

    D’après Queen, il était impensable que les missionnaires qu’elle avait découverts dans son enquête ne soient pas ceux qui avaient attaqué Kazad Thingaz. Préférentiellement, Yakmund et ses décideurs privilégiaient les petits groupes puissants pour leurs missions d’envergure, vouant une confiance solide en la milice magique professionnelle. Cette fois-ci, ils devaient être trois, ou quatre peut-être.

    La ville ne s’encombrait pas d’un checkpoint, pas plus à la sortie de la gare qu’à l’entrée des murs. Nul ne se plaindrait car tout le monde avait quelque chose à se reprocher, au moins du point de vue des administrateurs de Shiero, que ce soit par leur identité ou leur simple présence au côté d’indésirables.

    Le groupe, qui avait alors déposé la voiture en secret au détour d’un certain bois haï par Nina, put passer les quelques gardes en armure, heaume sous le coude, pas bien craintifs. Ceci fait, la progression dans l’enceinte des rues et la grimpée vers les hauts quartiers se fit en silence, la marche menée par la native au pas décidé.

    Chaque fois qu’elle avait posé les pieds ici depuis son retour, son estomac avait semblé se tenir renversé, et cette visite ne faisait pas exception à la règle nouvellement forgée. Pourtant, savoir, au moins se persuader, qu’elle serait l’anticorps qui détruirait la maladie rongeant sa ville natale l’emplissait de détermination.

    Le problème à se poser devint rapidement celui de l’entrée dans la tour de Shiero. Monument en lieu et place du manoir natal de Nina, il s’agissait du bâtiment administratif de la ville, totalement centralisée. Même si ce n’était pas à cet endroit que se trouvaient Dirk et les autres forgerons, peut-être même Orrok dont le corps n’avait pas été retrouvé, le groupe songeait à y récolter un tant soit peu d’indices. Et si par là même Nina pouvait mettre la main sur quelques pions stellans et y apposer sa marque... Elle n’en serait que plus satisfaite. Ceux qui servaient de gré Yakmund Ier avaient droit à autant d’égards de sa part qu’un mage noir de la pire espèce.

    Quant à l’élaboration d’un plan... Finalement Zélos et Hendrik, en se découvrant le point commun de n’avoir rien compris aux histoires des deux femmes, apprenaient à s’apprécier, enfin, à se tolérer. Ils eurent pour principale utilité d’aller faire des achats dans plusieurs boutiques de vêtements de la ville tandis que Queen et Nina, accompagnée d’Igni, sirotaient comme deux amies qu’elles n’étaient pas une limonade bien fraîche à la terrasse d’un salon de thé.

    « Il est impensable que je pénètre dans cette tour sans un déguisement.
    — Comme s’ils te connaissaient...
    — Malheureusement, il y a de fortes chances que ce soit le cas ! Tu as déjà oublié ce que je t’ai dit ? Non seulement je suis native de cette ville, mais je suis également la seule fille de l’ancien Vicomte qu’ils n’aient pu capturer. Ou anéantir. Ils ont eu ma sœur, ils sont dans ma ville ; à moins d’être particulièrement bête, personne ne négligerait un détail tel que moi. Surtout s’ils ont eu vent de mes activités de mage. Et puis... Avant que j’intègre ma guilde, des soldats à la solde de Yakmund se faisaient une joie de me rencontrer... si ton misérable cerveau parvient à saisir le message que je cherche à lui faire passer.
    — C’est typiquement la raison pour laquelle je te hais, Princesse. J’ai hâte que tu te tordes la cheville à force de tordre du cul sur tes échasses de cristal.
    — Mouche-toi avant de parler. On en rediscutera quand tu n’auras plus cette voix distordue par tes narines emplies de ta propre stupidité. Elle a tendance à me donner envie de crever mes tympans... ou de te trancher la gorge. »

    L’électricité reprit place autour de Nina qui regardait Queen de haut, fixement, avec toute la pitié que ses iris pouvaient peindre. Autour de la mercenaire planait une aura ténébreuse et son visage assombri lorgnait celui de la native.

    « Les femmes sont vraiment des créatures impitoyables... souffla Zélos, chargé de sacs, qui observait la scène d’un peu plus loin.
    — Puiii, pui puii.
    — Qu’est-ce qu’il baragouine ?
    — Il dit, traduisit Hendrik dans un ricanement presque pas camouflé, "Ne rejette pas sur les femmes ton triste célibat, rouquin".
    — Alors déjà mes cheveux ne sont pas roux mais ROUGES ! commença Zélos, outré. Mais surtout, pour qui elle se prend, la boule de morve ?! (Lorsqu’Hendrik lui annonça qu’Igni rétorquait "Pour un être supérieur, manant", Zélos sentit la colère se condenser derrière ses yeux et se saisit avec force de la créature.) Un machin comme toi...
    — Zélos ! cria Nina depuis sa chaise. Lâche Igni tout de suite ou tu auras affaire à moi. »

    Les sourcils froncés, puis affaissés, Zélos jeta les sacs de shopping dans les mains d’Hendrik et s’en alla dans une rue adjacente, prétextant aller aux toilettes. En réalité, bien entendu, il n’en fut rien. Il préféra cogner dans la première poubelle venue et lancer un regard ébène au gamin qui en fut témoin, lequel s’enfuit sans demander son reste.

    Du côté de Nina, en revanche, se trouvaient une grande quantité de sacs de shopping. Hendrik lui expliqua qu’ils avaient pris un article dans tous les magasins de prêt-à-porter du quartier, comme convenu pour ne pas attirer l’attention. Enfin... pas trop. Les deux hommes, ainsi qu’Igni, étaient inconnus de l’armée stellanne. Ce n’était pas le cas pour Queen mais ayant déjà su s’infiltrer dans la tour une fois, elle considérait qu’une seconde ne serait pas inenvisageable. D’ailleurs, elle en profita pour vanter ses talents d’infiltration.

    * * *

      Infiltration haute en couleurs


    « T’es la meilleure, Nina.
    — Pour porter cette tenue sans mourir de honte sur le coup ? J’imagine que oui, en effet. (Elle toussota.) Les cigarettes étaient-elle vraiment indispensables ?
    — Non, non... » ricana Queen à voix basse.

    Parfois, le meilleur moyen d’être discret était de ne surtout pas chercher à l’être. Nina portait un accoutrement que jamais, en la croisant dans la rue sous son jour habituel, l’on ne la croirait capable de le porter. Les collants résille jaune poussin, la robe noire nacrée de bleu et vert, sans oublier les fourrures, roses et dentelles disséminées sur sa tenue et sa chevelure lui irritaient tout particulièrement les rétines... Mais la honte qu’elle ressentait au plus profond d’elle laissa bien vite place à son envie d’écraser ceux qui avaient détruit le village de son père, tué ses habitants et kidnappé ceux qu’ils avaient daigné préserver. Pour leurs besoins personnels.

    Nina. Oui.

    Alors que Queen partait de son côté pour s’introduire par une bouche d’aération laissée sans surveillance, Nina et Hendrik, Igni caché sous le borsalino blanc de ce dernier, s’avancèrent vers la porte d’entrée de la tour, soumis aux regards dubitatifs des passants. Zélos n’était toujours pas revenu mais le plan ne prendrait pas de retard par la faute de ses caprices.

    Dans le hall tout de marbre blanc, une hôtesse leva les yeux de son travail lorsqu’elle sentit l’aura colorée de l’œuvre post-moderne vivante à peine entrée.

    « Bon... Bonjour, madame ! Que puis-je pour vous ? »

    Si Queen ne voulait pas passer un sale quart d’heure plus tard, la mage songea qu’elle avait tout intérêt à ne pas s’être trompée dans ses informations. Nina s’approcha du bureau d’accueil, éteignit sa cigarette à peine allumée dans un cendrier posé à côté – sans quoi elle ne se serait pas gênée pour brûler les ravissants formulaires de revendication populaire à sa droite – et posa son avant-bras sur la longueur du bord.

    « Je suis le professeur Mugler de l’École Militaire Supérieure de Stella, chuchota-t-elle en regardant l’hôtesse droit dans les yeux. Je suis venue avec un élève, comme demandé par monsieur Khamis, du département scientifique. Enfin... vous savez. Excusez notre avance mais... (Elle laissa traîner sa voix grinçante sur ce mot en appuyant plus fortement sa cigarette dans le cendrier.) Je déteste faire attendre.
    —  Ah, oui... Effectivement, le docteur Khamis m’avait annoncé la visite d’une femme de votre trempe, Madame. Allez-y, je vous prie, l’ascenseur se trouve juste à droite. » sourit l’hôtesse, les traits forcés.

    Sans un merci, le groupe d’intrus se dirigea droitement vers le couloir indiqué sous le regard froid de la femme de bureau. Nina appela l’ascenseur qui mit quelques secondes à descendre au bon étage. Une fois à l’intérieur, elle libéra un champ magnétique perturbateur dans la cage, au cas où une lacryma de surveillance aurait été installée. Après quoi elle lâcha un profond soupir et appuya sur le dernier bouton qui lui était proposé, comme Queen l’avait indiqué. Quatrième sous-sol.

    « L’avantage, fit remarquer Hendrik avec cynisme, c’est que tu n’as pas eu à jouer beaucoup la comédie pour paraître désagréable, kehehe...
    — Je t’en prie ! Ah, et si tu laissais respirer Igni, un peu ?
    — C’est vrai. Ça va, bonhomme ?
    — Pui ! » répondit l’élémentaire, tout excité.

    Bien qu’elle ne comprît toujours pas la raison du comportement de Zélos, Nina se surprit à penser à lui avec une pointe de déplaisir, se demandant par là même comment ils se retrouveraient après les événements... en espérant que tout se passe bien.

    Arrivés au bon sous-sol, la mage envoya une onde électromagnétique sur le lecteur de puce face à la seule porte du couloir. Celle-ci s’ouvrit sans la moindre alarme, permettant aux intrus de se glisser au-travers. Le marbre avait laissé place à la pierre.

    Il faisait plutôt froid ici-bas, mais c’était plus agréable qu’autre chose. Les seules sources de lumière et de chaleur étaient des torches magiques et Igni, lequel avait repris sa forme de flammèche pour pallier le manque de visibilité. Quelques portes n’étaient pas verrouillées le long du couloir, néanmoins rien d’intéressant ne se trouvait derrière si ce n’étaient des étagères remplies d’ouvrages de démonologie. Quoi de plus normal de la part d’un pays travaillant de concert avec ces créatures... Hendrik lui-même n’aimait pas les Démons, ainsi le montrait-il en crachant sur quelques livres.

    Ils étaient censés retrouver Queen dans une grande sale dotée d’une fenêtre aux mêmes proportions, un semblant de laboratoire. C’était la dernière qu’elle avait pu visiter durant sa première infiltration... et celle où elle avait appris que Kazad Thingaz était la prochaine cible des Stellans. Visiblement, elle s’y trouvait déjà.

      Le laboratoire


    Entrée du laboratoire

    Effectivement, la pièce était vaste. En face, beaucoup de livres tantôt posés par terre, tantôt sur des chaises dépourvues de table. Une armure dotée d’une hache se tenait inutilement à côté de l’une d’entre elles, par ailleurs. Juste à droite de la porte, une étagère-bibliothèque et une mappemonde étaient les deux seules attractions tandis qu’à gauche, une immense vitrine remplie de potions se dressait, éclairée par la lumière traversant la grande fenêtre, digne d’une petite église. Juste à côté se trouvait sa jumelle. Il y avait comme une odeur de renfermé et une sorte de moiteur rendait l’ambiance très désagréable malgré sa certaine beauté.  

    « C’est ici que je me suis arrêtée dans mes recherches, la dernière fois, posa Queen. Le couloir reprend par ici, c’est maintenant qu’il nous faut redoubler de prudence. Prêts ?
    — Prêts.
    — Pui ! »

    Tentant malgré tout de rester silencieux, le groupe s’avança par-delà la grande salle, vers le couloir duquel un concert de sons métalliques s’échappait. Il n’était pas bien différent du premier, simplement plus large. La porte de bois noble masquant le bout du chemin s’écarta sans que Nina eût besoin de lever le petit doigt grâce aux divers éléments d’acier la composant.

    Là, tout était plus rouge, plus ignescent. Une poignée de Nains, chacun enchaîné de son corps au plafond, travaillait le fer rouge au marteau. Les toisant de sa masse indéterminable, grande comme cinq ou six hommes, une cloche. Brune et ornée d’arabesques en construction, celle-ci était retenue par de larges câbles de cuivre abîmés et autant de poulies rouillées.

    Dirk se trouvait parmi eux.

    « La cloche vous plaît ? » susurra une voix masculine.

    La cloche d’Exitia

    La voix se tenait derrière Nina, plaquant avec aisance sa longue épée à la forme inusitée contre son cou, comme si elle n’avait pesé que quelques grammes. Hendrik, quant à lui, cernait la nuque et les tempes de l’inconnu avec ses échardes magiques, le regardant d’un œil mauvais.

    « JE me fais menacer alors que VOUS êtes les intrus ? Vous avez un de ces sens de l’humour, vous autres, les Fioriens... Sara, s’il te plaît ?
    — Tu me déranges, Veron.
    — Qu’importe, viens ! » ronronna-t-il.

    Une jeune fille à la peau étrangement bleue surgit à pas lent depuis l’arrière de la cloche. Son corps était recouvert de peu de tissu et y étaient dessinés bien des tatouages tribaux, longeant ses membres et ses muscles. L’enthousiasme se lisait mieux sur tout autre visage que le sien. Quant à l’homme, aux longs cheveux rosés poussant dans tous les sens, paré d’une cape vermeil, celui-ci souriait, sûr de lui.

    Sara

    Veron

    Queen n’était plus aux alentours.

    Les Nains, sous l’effet du grabuge et comme plus personne n’était là pour les menacer s’ils ne travaillaient pas l’espace de quelques minutes, braquèrent leurs regards sur la scène en train de se dérouler. Dirk, bien qu’un peu plus éloigné et malgré l’accoutrement ridiculement incongru de Nina, reconnut sa fille et ses yeux s’écarquillèrent.

    « Nina, qu’est-ce que tu fais là ?!
    — Quelle question, papa ! Les Stellans t’ont-ils grillé le cerveau ?
    — Hum, ce n’est pas que je désire abréger vos retrouvailles familiales mais... Vous n’avez rien à faire ici, vous autres, posa Veron d’une voix claire. Si Seressa vous voit ici en vie, j’ai peur de l’état dans lequel terminera la cloche d’Exitia après la bataille... »

    Mais c’étaient des menaces en l’air aux oreilles de Nina et son groupe. Elle avait retrouvé Dirk, maintenant plus rien n’importait sinon anéantir ce trio Stellan, leurs vies comme leurs projets. Et le ramener à la guilde.

    En revanche, le nom prononcé par Veron surprit Hendrik au point d’offrir une ouverture à la fille bleue, laquelle ne s’en rendit compte que trop tôt et propulsa d’un coup de pied le demi-Démon contre la cloche.

    En se relevant, retenant ses pulsions revanchardes, il expliqua à Nina qu’Exitia était un artefact d’essence démoniaque forgé voilà des siècles par des mages noirs entièrement dévoués à Zéref. Le son qu’elle émettait, paré d’enchantements runiques, suffisait à lui seul pour invoquer des Démons sans nécessiter une quelconque invocation.

    « Voyez-vous, acquiesça l’épéiste, à partir d’une certaine puissance, les Démons ont besoin d’être invoqués via un rituel plus ou moins complexe pour venir sur Terre. Effectivement, cette cloche a – enfin, aura, lorsque nous vous aurons tués et que nous l’aurons terminée – le pouvoir de les faire venir. Rien qu’un coup suffit, mais pourquoi se priver lorsqu’une nuée entière peut venir à nous ? »

      Contre Stella


    Nina ne comprenait pas comment fonctionnait le cerveau des mages noirs et des criminels démonistes. Sûrement moins bien qu’un modèle ordinaire. Ou bien Veron fut-il simplement trop confiant en ses capacités ? Des deux Stellans, c’était lui qui semblait le plus puissant, mais tout de même, révéler tant d’informations...

    La jeune femme profita de son monologue pour repousser avec force son épée en acier et asséner un coup de tête violent contre son menton !

    Sara se rua sur elle pour l’attaquer mais la voix du bretteur, plusieurs octaves plus bas, lui ordonna d’arrêter. Elle n’était qu’à quelques centimètres avant de se figer telle une statue.

    « Sara. Envoie celui aux cheveux blancs auprès de Séressa. Il est trop puissant pour nous. »

    Avant même qu’Hendrik n’ait eu le temps de comprendre les gestes esquissés par la jeune fille bleue, un anneau doré tramé d’une bulle bleu profond passa au travers de l’homme et l’engloutit. La seconde d’après, il n’était plus là non plus.

    C’est alors qu’une dague vint entailler l’épaule de Sara. Queen venait de jaillir de l’ombre de la cloche et fondait sur elle. Échec.

    Un nouvel anneau d’or et de bleu fit disparaître les deux combattantes, Dieu seul savait où. Igni avait été absorbé lui aussi.

    « Comme ça, nous aurons le loisir de nous amuser tous les deux sans être dérangés... »

    Il s’était mordu la lèvre et semblait en tenir fortement rigueur à Nina. D’un coup, il l’attrapa par l’épaule et la projeta de toutes ses forces dans le couloir au point qu’elle le traversa entièrement. Un cri de Dirk retentit mais la jeune femme était déjà en train de racler le sol de pierre de la salle aux fenêtres. Tant bien que mal, elle plaqua ses pieds et ses mains au sol et se releva avant qu’une longue épée ne vienne lui transpercer le foie.

    Elle enjamba les quelques mètres la séparant de Veron et porta à son ventre un coup de poing chargé d’æthernanos, mais il para. Elle se recula, lui aussi ; face à face, sans un mot. L’épée revint d’elle-même à la main de son possesseur.

    Nina psalmodia la rune Ēoh même si l’homme l’attaquait à distance, lançant son épée, manquant de la toucher à chaque reprise. Veron remarqua le glyphe sur le front de la jeune femme et décida de se méfier. Le pouvoir du symbole pouvait être n’importe quoi.

    Mais lorsqu’elle portait Ēoh, Nina n’avait plus peur de s’aventurer au corps à corps. Elle s’arma de deux dagues, faisant voler le reste derrière elle avec une dizaine de sphère d’Akvarel, fusa sur l’homme, para son épée d’un côté et trancha son veston mauve de l’autre. Elle pivota en même temps que lui et réitéra, cherchant une faille dans ses mouvements, sans succès.

    Il bondit vers l’arrière et son épée se dressa à la verticale, préparant un coup ascendant que Nina bloqua grâce à sa puissance magnétique. Mais elle fut projetée contre l’armure à la hache ; le coup de genou fut sans pitié, pourtant... il ne s’agissait que d’æthernanos concentrés. Nina ne décelait aucune magie dans ses actions.

    Soit. S’il ne voulait pas se donner à fond, cela ne lui imposait pas de faire de même !

    Elle projeta ses dagues vers Veron au fur et à mesure que celui-ci évitait ses assauts. Lorsque certaines étaient parées d’une Akvarel, le choc des coups provoquait une petite détonation électrique. Rien de suffisant pour impressionner le chevalier qui, par ailleurs, peut-être en guise de provocation, bâilla. Ēoh cessa par là même.

    « J’espère que ce n’est pas tout ce que tu peux faire ? Je m’attendais à un combat épique ; je me retrouve à bâiller... Aaaah...
    — Si tu t’investissais, peut-être ferais-je de même, pesta Nina.
    — Puisque c’est si gentiment formulé... »

    Rien ne changea sitôt la phrase terminée.

    Rien, sinon l’afflux d’æthernanos autour de Veron qui sembla tripler. Il n’était pas si éloigné du niveau de Nina mais la différence de poids se faisait clairement ressentir.

    L’épée ne fut soudain plus dans la main du Stellan mais contre la cuisse de Nina. Le collant résille ridicule fut transpercé et se teinta d’une couleur carmine trop peu désirée...

    « Mon arme est comme une prolongation de mon propre corps. Elle ne me quitte pas, me revient quand je la lance... et ne rate jamais sa cible. »

    Il quitta sa position et Nina le retrouva dans son dos, prêt à abattre un coup biseauté. Un temps de retard la fit se retourner avant d’agir et elle fut tranchée par l’épaisse lame. La chaleur du sang sur sa peau.

    Comprenant qu’il était trop dangereux de le quitter des yeux, Nina s’entoura d’Akvarel et de ses dagues à nouveau. Deux sphères crépitantes parèrent ses mains.

    Tel le bec d’un pivert, la lame de Veron s’abattit frénétiquement sur Nina, détruisant le sol de pierre sur son passage, tandis que son manieur, d’une pirouette, flanqua son coude contre la plaie de la jeune femme. Nina s’écarta, non, se contenta d’esquiver les dix prochaines attaques pour se mettre en sécurité, guettant le bon moment pour riposter.

    Elle dégagea soudain une immense charge électrique qui se condensa en rayon, puis en sphère, détruisant les meubles sur son passage. La vitrine de potions sombra dans un bruit fracassant de verre anéanti ; à côté, une boule de foudre de la taille des fenêtres se formait, se préparait, avant de s’abattre sur Veron qui, cette fois, n’esquiva pas.

    De la poussière s’envolait en écran de fumée. Nina ne vit pas la poigne du Stellan l’attraper de nouveau pour la projeter dans le couloir. Mauvaise idée... car un nouveau rayon électrique, plus intense encore, rasa les murs et emplit la salle adjacente, brisant les éclats de verre et les fenêtres. Le bruit s’associa au cri de Veron.

    Au sol, à peine relevée, Nina remarqua une porte ouverte dans le corridor. Dès que le son de ses talonnettes frappant le sol de pierre eût retenti, un nouveau cri se dégagea des quatre murs après l’encadrement.
    L’épéiste, ébahi, savait ce qui se trouvait derrière cette porte. Il s’y précipita, ignorant Nina.
    Il n’en ressortit jamais.

      Contre Stella


    « Lui aussi, il fallait s’en débarrasser ? De rien, au fait. »

    Assis sur un bureau, Zélos fit tournoyer sa dague avant de la rengainer, un sourire satisfait collé aux lèvres. Après quoi son regard s’arrêta sur les yeux écarquillés de Nina. Celle-ci s’avança, enjambant sans considération le cadavre égorgé de Veron au pied de la table.

    « Qu’est-ce que tu fais là... ?
    — On dira que c’est une excuse pour être parti promptement et... Le talent du grand Zélos pour retrouver les gens grâce à leur énergie ! J’accepte les remerciements en baisers... roucoula-t-il, charmeur, avant de se reprendre. Je plaisante, je plaisante ! Je suis là depuis quelques minutes. Il y avait un vieil homme, ici – bon, maintenant, il traîne par terre là-bas. (Il pointa le sol à côté du fauteuil mordoré.) Je crois que c’était quelqu’un d’important pour ce qui se trame ici, car l’autre s’est littéralement précipité pour le voir et m’atta-... Où sont les autres ? »

    * * *

    Le vent soufflait dans le parc principal de Shiero, totalement déserté. Sara se tenait droite, tachée de sang et marquée çà et là de brûlures, scrutant les environs. Igni, au pied de la Stellane, ne semblait plus conscient.
    La jeune fille commença à marcher, sans perdre de vue ses arrières où se trouvait, notamment, son ombre.
    Queen n’était pas assez forte pour combattre Sara sans réfléchir.

    « Pourquoi fuis-tu ? Tu n’as pas envie de rendre visite aux oiseaux... avant de tomber du plus haut de Shiero ? »

    Le pouvoir des anneaux dimensionnels de Sara pouvait, si l’acrobate se laissait avoir par l’un d’entre eux, causer sa mort en un seul coup. La téléportation couvrait une large zone et son adversaire ne manquait pas d’idées pour lui offrir une mort originale. Et c’était bien la seule chose qui empêchait la Stellane d’abandonner ce combat d’ennui. Queen avait été désignée comme cible à abattre, alors elle serait abattue.

    Un nouveau couteau de lancer se risqua vers la fille à la peau bleue depuis l’ombre d’un banc. Chaque fois qu’elle effectuait une telle tentative, sa présence était dévoilée, la forçant à se montrer de nouveau. Risquant, bien entendu, de côtoyer une bulle de téléportation. Malheureusement... le seul moyen pour elle de vaincre Sara était de s’en approcher.
    Queen bondit de banc en banc, d’arbre en arbre, évitant les anneaux dimensionnels sur sa route. Chaque mètre de distance qu’elle effaçait entre elles, Sara le remplaçait en marchant dans la direction opposée. Chaque dague qu’elle lançait disparaissait Dieu savait où dans la ville. Ou aux abords, d’ailleurs.

    Comme toujours lorsqu’elle était mise en difficulté, Queen pensa à Joker. De son vivant, rien de l’âge ou de l’origine n’avait pu empêcher son amour pour lui. Dans la mort, il la hantait toujours. En la mémoire de celui qui l’avait jadis sauvée, elle ne pouvait pas perdre. Et... Mourir ici signifierait mourir pour Nina.

    Et elle le refusait.

    Sara s’impatienta. Derrière elle, un immense cerceau d’or se matérialisa. La fine pellicule dimensionnelle, bleu nuit, dessinait une nébuleuse. Ondulant doucement au vent.

    L’air autour de lui commença à vrombir, les feuilles se décrochèrent des arbres et les bancs du sol. Lui s’effritait, la poussière tournoyait. La dimension aspirait tout autour d’elle, formant un ouragan aux yeux comme aux oreilles. Queen glissa dans l’ombre d’un tronc abattu. Elle entendit en route le petit piaillement d’Igni... Il était vivant et elle rassurée. Lui qui s’était si vaillamment battu malgré sa faiblesse...

    Queen jaillit de l’ombre sylvestre juste à côté du cerceau d’or. Elle bondit dessus, l’escalada, s’y porta sur les mains et, en moins d’une seconde, avant que son écharpe miteuse n’eût le temps de disparaître au plus loin du cosmos, effectua une retombée, genoux pliés.

    Sara remarqua la présence de Queen et s’apprêta à éviter le coup ! Mais une gerbe de flammes lui dévora le mollet et, dans ce moment de douleur et d’égarement, elle perdit son réflexe et disparut. En même temps que son anneau. Queen put se réceptionner au sol, haletante, l’adrénaline retombant avec elle.

    « Puii... ! »

    La jeune fille se précipita à quatre pattes sur la créature et la pris dans ses mains. Elle était plus liquide qu’à l’accoutumée...

    « Tu es bien plus gentil que ta maîtresse, tu le sais, ça ? Et bien plus adorable. (Constatant qu’elle était obligée de plaquer ses mains contre sa poitrine resserrée pour qu’Igni ne coule pas sur le sol, elle bégaya.) Je... Je vais te trouver un récipient... »

    * * *

      Contre Stella


    « Tu es doué, demi-Diable. Au point de donner du fil à retordre à mon si cher Arslan. Tiens-tu tant que cela à continuer le combat ? Je sais que je devrais t’éliminer mais j’ai... huhu, toujours eu un faible pour les créatures des Enfers. » avoua-t-elle d’une voix avide.

    Après avoir essuyé un mince filet de sang au coin de ses lèvres, Hendrik ricana. Il était vrai que la beauté de cette femme dépassait celle de Nina. Ses cheveux cendrés tombant en cascade sur son dos semblaient aussi légers que le grain de sa peau. De corps, elle n’était pas de celle qu’un magazine refuserait pour faire sa couverture. De surcroît, elle dégageait beaucoup de majesté, et pas seulement grâce à la présence de l’immense lion mauve et doré sur lequel elle se tenait assise. Qui se battait avec elle depuis le début.

    Mais...

    « J’ai des principes. Je possède déjà quelqu’un pour me tenir ce genre de compagnie, et... cette personne voue une haine parfois effrayante aux suppôts de Yakmund.
    — Sa fille, mon cher, sa fille. Séressa, cinquième fille de sa Majesté, enfin... haha, de celles suffisamment importantes pour avoir été reconnues ! »

    Elle poussa un ricanement mégalomaniaque digne de son ascendance sous le regard dégoûté d’Hendrik. Il aimait les femmes de caractère. Pas les mégères.

    * * *

    Au quatrième sous-sol de la tour de Shiero, l’alarme avait été déclenchée. Nina et Zélos s’affairaient à déchaîner les Nains forgerons. Sitôt qu’elle le pût, Nina serra Dirk dans ses bras avec tout l’amour d’une fille. Mais la douleur qu’elle lut dans son regard à l’annonce de la mort de Gloren...

    Les autres Nains expliquèrent qu’Orrok, leur chef, était parti également. La rancœur de leur voix, le dégoût de leurs propos. La cloche avait besoin d’un sacrifice pour être fonctionnelle. Le sacrifice de quelqu’un doué d’une forte résonnance avec la magie, quand bien même ce fut un trait rare chez un Nain. Orrok était un guerrier runique ; son affiliation à la magie était moins forte que celle d’un Nain forgeron mais plus que pour un Nain guerrier. Les Stellans en avaient donc fait leur agneau.

    Nina était écœurée.

    « Détruisons cette tour ! Dammaz !! »

    Ce Nain avide de vengeance fut vite rejoint par le reste de la troupe, mis à part Dirk, qui en savait bien plus qu’eux sur cet endroit grâce à sa fille.

    « Nina... commença Sirius. Explique-leur qu’il est impossible de mener à bien une quelconque attaque contre Shiero pour le moment. Hendrik combat une mage puissante mais il y en a d’autres en ville. La seule option pour le moment est la fuite avant que la garde magique ne débarque.
    — Oui, j’en suis consciente. Peux-tu me conduire au bas de Kazad Thingaz avec les Nains ? S’ils s’accrochent à moi, ils seront affectés par la téléportation. Ensuite...
    — Ensuite je te ramène pour récupérer les autres, oui.
    — Il faudra penser à demander une bague au Maître pour toi, Zélos, expliqua Nina à voix haute. En attendant, je vais les emmener en lieu sûr. Reste ici, je reviens. »

    L’homme acquiesça et Nina fit part du plan aux Nains forgerons. Une minute plus tard, elle avait effectué deux voyages jusqu’à Kazad Thingaz et se sentait fatiguée et mal à l’aise. Rien de grave, elle avait ressenti cela les premières fois, également. La panique jouait beaucoup.

    Nina et Zélos rejoignirent Queen et Igni, lesquels s’étaient déjà approchés de la tour. Non sans soulagement, Igni put retrouver son pot et sa maîtresse. Après avoir réitéré les explications, il ne restait plus qu’à récupérer Hendrik... avant qu’il ne commence un carnage au bas de la ville contre cette femme.

    Le groupe se téléporta aux abords du bois de Shiero ; Nina manqua de dégobiller tant les téléportations successives lui mettaient le corps sens dessus dessous. Hendrik faisait face à la femme, genou à terre, celle-ci à peine blessée.

    « Oh, voilà donc tes amis cafards. Je constate qu’ils ont tous un faible pour les accoutrement ridi-...
    — Hendrik, nous partons. Qu’importe ton combat. » coupa Nina sans se soucier de la femme profondément vexée d’avoir été ainsi interrompue.

    La jeune femme savait, de toute manière, qu’elle ne pourrait pas la tuer. Autant ne pas s’embarrasser de plus d’émotions néfastes comme la haine et la colère pour le moment.

    « Tu plaisantes ? Laisse-moi comprendre comment sa magie fonctionne et je ne te donne pas cinq minutes pour...
    — Hendrik, je ne veux rien savoir ! »

    Nina se saisit du bras du demi-Diable et le reste du groupe s’évapora au contact de la jeune femme. C’était presque la dernière fois. Elle tiendrait.

    * * *

      Home Sweet Home


    Queen était repartie en solitaire, comme elle était arrivée. Sa mission avait échoué. Elle avait été incapable de détruire la cloche d’Exitia et le lendemain, sa sombre silhouette projetait son ombre sur Shiero sans que personne ne se doute de quoi que ce soit. Les Nains n’avaient pas pu terminer le travail, mais... ce n’était qu’une question de temps avant que Stella ne trouve un nouveau village à massacrer. Queen voulait tous les trouver et les protéger.

    Hendrik, ouvertement furieux contre Nina et lui-même pour ne pas avoir mené son combat à bien, s’était cloitré dans sa cabane avec ses recherches. La jeune femme n’avait rien à se reprocher, aussi refusa-t-elle de passer la nuit suivante avec lui lorsqu’il revint la voir la queue entre les jambes. "Occupe-toi tout seul, ça changera", avait-elle sifflé avant de lui claquer la porte au nez sous les jubilations de Sirius.

    Elle soupira, une limonade à la main. Dirk était déjà retourné à la forge, frappant de son marteau pour oublier sa haine au moins pour un moment. Nina lui avait promis des représailles et elle n’y manquerait sous aucun prétexte. Et pour l’aider à devenir plus forte, il s’affairait déjà au forgeage de sa plus belle, sa plus grande, sa plus puissante arme à ce jour. Qu’il parerait d’or noir et de rubis et graverait au nom de sa fille.

    Igni dormait sur la tête de Zélos, lui-même en train de ronfler allègrement sur le fauteuil le plus confortable de la chambre de Nina, un ours en peluche dans les bras. De temps à autre, Igni coulait sur son visage et l’homme sursautait en maugréant des syllabes aléatoires, ce qui faisait rire l’hôtesse qui n’en pouvait plus d’être énervée, déprimée. De penser au malheur du monde, au sien, à celui de ses proches. Cela l’éreintait.

    Stella attendrait. Sa vengeance attendrait. Pour le moment, dans cette guilde qui lui en avait déjà fait voir plus qu’une vie ordinaire ne pouvait supporter ; sous le son des râles, des coups de marteau, des piaillements, des ronflements, elle s’endormit toute habillée.

    by Nina

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    Re: [Entraînement 12] La Cloche d'Exitia par Raziel Jeu 31 Aoû 2017, 23:23
    Raziel
    Raziel
    Mage
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    Ranking : S+

    Base : 4 670

    Perfection : non

    Fautes : « pour la mémoire ceux qui l’avaient quitté » => « pour la mémoire DE ceux »
    « Hendrik lui-même n’aimais pas les Démons » => « n’aimait »
    « une dizaine de sphère » => « sphèreS » donc

    Cohérence : indeed. 100 points.

    Originalité : ding-dong ! 50 points.

    Histoire : très intéressante, disons 400 points.

    Rendu : comme toujours : 100 points.

    Humour : non. Même si le début est léger. Orrok. Gloren. Néveur forjèt. Je mets 40 points pour la séparation des deux coqs.

    Rédaction : 290 points.

    TOTAL : 6 650 points.

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